Chapitre 15 - Adèle

525 76 5
                                    

Il se jouait de moi. Il avait perçu mon émoi et s'en amusait. Il voulait du thé, il allait avoir son thé, et bouillant cette fois. Je lui servis moi-même et me reculai, tête basse telle une bonne petite servante. Je voulais surtout le voir lorsqu'il se brûlait la bouche.

Mais non, il prit sa tasse, huma les effluves de thé noir et la reposa.

— Je voudrais vous parler d'autre chose.

— Oui ?

— Un livre. Mon ami Miller m'a parlé d'une œuvre hindoue pour laquelle il y eut un litige entre lui et votre époux.

Il était au courant de cette affaire et me l'annonçait aussi sereinement !

— Un litige ? Vous appelez cela un litige ? Il m'a menacée ouvertement afin que mon mari cède et cesse la transaction. Vous appelez cela un litige !

What ? Miller, vous êtes sûre ?

— Bien entendu que j'en suis sûre, je l'ai reconnu lors de la vente. Je craignais qu'il ne m'achète juste pour se venger de cet affront, il avait juré la perte de mon époux.

— J'avoue que je ne sais plus qui croire à présent. Il m'a raconté une tout autre histoire, que vous aviez dérobé ce livre.

— Cette histoire n'est que mensonge ! Je pourrais vous le prouver, mais pas ici. Nous sommes dans ma résidence secondaire, ces documents de la transaction de vente se trouvent à Bombay.

— Si je veux être certain, je dois donc vous accompagner là-bas.

— Je comptais y retourner de toute manière, du moins si vous m'en laissiez l'occasion.

— Alors nous irons à Bombay.

— Pas avant des mois, je venais de rater le bateau le jour où je fus enlevée.

— Vous faites erreur milady, il a été retardé. C'est pour cette raison que je suis encore au Caire et non en pleine mer. L'un des ravitaillements de charbon est arrivé à Mocha avec beaucoup de retard. Il devrait prendre la mer dans deux jours.

Mocha était la dernière escale sur la mer Rouge avant de rejoindre le golfe d'Aden puis la mer d'Arabie, direction les Indes. Et le bateau avait absolument besoin de combustible sous peine de tomber en panne. Je pourrais alors rentrer chez moi ! Et sous protection ! Je ne pus empêcher un sourire de soulagement, ce qu'il remarqua. Profitant de l'occasion pour prendre ses aises et poser ses pieds sur le coin du bureau. J'avais comme l'impression qu'il commençait vraiment à se plaire dans son nouveau rôle.

La femme de l'antiquaireWhere stories live. Discover now