55) Pyeongchang

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Comme prévu Pyeongchang était un tourbillon. À peine atterri je dus tenir une mini conférence de presse dans le hall de l'aéroport escorté par pas moins de six gardes du corps, le bâtiment japonais dans le village olympique avait des allures de zone hautement sécurisé et en effet, Javi n'aurait jamais pu s'y infiltrer, même avec un sourire (et pourtant Javi pouvait vraiment se permettre beaucoup de choses juste en souriant : ça faisait peur). Je ne l'avais d'ailleurs pas revu depuis la sortie de l'avion mais on se retrouverait probablement pour les entrainements.

Je m'étais préparé autant pour les médias que pour ma performance et j'avais donc pu annoncer avec un sourire rayonnant à tout le monde que j'étais en pleine forme et que les antidouleurs étaient le remède à tous mes maux, en oubliant de préciser que j'avais accessoirement un tibia encore bien fracturé pour le moment.
Ce n'était pas juste pour soulager mon pays que je disais ça, mais aussi pour tous les autres patineurs qui attendaient de voir dans quel état le tenant en titre allait arriver à la compétition. Autant dire que les sessions d'entraînements allaient être un vrai jeu de stratégie pour laisser le suspens et les faire stresser : seul Javi savait exactement mon état et je savais pertinemment qu'il jouerait les ignorants.
Les sessions à la patinoire se passait bien, je ne faisais pas de quads pour l'instant et l'angoisse ne suintait pas trop. J'étais aussi en forme que possible avec un tibia en moins et Javi aussi (mais avec un tibia en plus). J'avais vu les autres mais pour l'instant ce n'était pas le moment des retrouvailles ; on verrait ça au gala...

-Continuez comme ça et tout ira bien, sourit Brian à la fin de la séance quand on revint vers lui.

D'un commun accord on ne venait jamais au bord en même temps pendant les  entraînements des compétitions, sauf à la fin : déjà parce que Brian ne pouvait pas se dédoubler et en plus parce qu'on était quand même adversaires et que je n'avais aucune raison d'écouter ce que disait Brian à Javi (et inversement).

-Comment tu te sens à l'idée que deux des futurs médaillés olympiques seront tes étudiants ?, s'amusa Javi.

-Ne vendez pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué, grommela notre coach.

-On sait Brian, on sait. Mais on va quand même gagner, rajoutai-je.

Je donnai un high five à Javi et notre coach soupira.

-Yuzu, tu vas commencer à sauter des quads demain n'est-ce pas ?, demanda distraitement mon petit ami en rangeant sa bouteille.

-Javi, tu ne peux pas lui demander ça !, protesta Brian.

-En fait je lui avais déjà dit, avouai-je sans culpabilité.

-Ça va semer la panique, rit-il en attrapant ses protections.

-Mais enfin, les garçons ! Comportez vous un peu comme si vous étiez rivaux...

-C'est ce qu'on fait, affirma Javi avec innocence.

-Vrai : je profite même de notre proximité pour lui faire des sales coups et m'assurer la victoire, acquiesçai-je en donnant une petite tape vicieuse sur la tête de mon adversaire.

Celui lâcha un bruit outré pour cette grave trahison et bientôt c'était une bataille rangée de tapes, pas très mature certes, mais il fallait bien décompresser.

-Vous n'êtes pas possibles... Heureusement que les caméras ne sont pas admises aujourd'hui.

-On ne rigole qu'à moitié Brian, sourit Javi en passant un bras autour de mes épaules et en s'y appuyant lourdement exprès pour m'énerver. Regarde la tête que font les autres patineurs : ça leur met la pression. Ils voient tous qu'on est suffisamment sûrs de nous pour rire, et pour s'amuser avec un rival en plein JO il faut être soit complètement débile soit très très confiant.

Ice KingOù les histoires vivent. Découvrez maintenant