Titre trop long.

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Va quérir la dignité en enfer s'il le faut ! Et refuse l'humiliation, même au paradis.

Al-moutanabbi 




Que reste-t-il quand tout vole en éclat ? Que reste-t-il quand nos quelques convictions partent en fumées ? Si Ana avait eu plus de force elle aurait peut-être pu se poser ce genre de question. Pour elle, plus rien n'avait d'importance, quelque chose au fond d'elle était brisé à tout jamais. Quelque chose que rien ni personne ne pourrait réparer ou même rafistoler.

Ana était bousillé, complètement détruite.

Pendant un temps elle s'interdisait de s'alimenter, refusant catégoriquement de manger ce que le gros lui balançait. Elle s'était dit que si elle le pouvait encore elle se donnerait la mort en s'affamant. Puis, la douleur d'un estomac qui se tord n'était rien comparé à celle cuisante des sévices qu'elle subissait quotidiennement. Elle se rendit bien vite qu'elle était incapable de se laisser ainsi, pas par envie ni par instinct, mais par quelque chose de bien plus fort dont elle n'avait jamais été eut connaissance jusque là. Cette infime lueur lui faisait tenir le coup contre sa volonté et peut être que si la jeune fille était moins épuisée peut être aurait-elle ressenti de la colère ?

Le cadavre de l'autre gamine trônait à ses côtés depuis plusieurs heures maintenant, Ana l'avait vue mourir. Elle l'avait enviée.

Le vent s'était intensifié, tous faisaient de leur mieux pour consolider leurs baraques et beaucoup échouèrent. Cette nuit là, le vent maudit s'était appliqué à détruire le plus de demeures possible, les survivants se planquaient là où ils le pouvaient sans grand espoir de voir le jour se lever.

La jeune fille ne se sentait pas nerveuse contrairement au gros qui suait comme un porc. Au fond d'elle, elle se disait que peut-être elle allait être libérée aujourd'hui ? Que peut-être grâce à ce vent maudit elle ne subirait plus jamais les attouchements du gros et de ces amis ?

Pendant un instant elle s'imagina libre en sécurité et surtout vivante, cette idée était absurde. Impossible, cela la froissa grandement.

Dehors de fortes bourrasques secouaient les planches, le gros se mit à trembler et Ana à sourire.

Dans la forêt, Anton ne risquait rien. Bien sûr les arbres tanguaient dangereusement dans tous les sens et bien sûr les animaux fuyaient vers un lieu inconnu. Mais, dans sa cahute, creuser à même le sol et renforcer par de longues heures d'effort et de la pierre le colosse ne risquait absolument rien. Il avait bien assez d'eau et de nourriture pour tenir un moment sans se rationner. Entre ses murs, le silence était accablant, trop lourd. Il en avait toujours eu horreur. Depuis plusieurs jours maintenant l'image du gros du village et de la bonne femme qu'il avait vue il y avait bien plus d'un mois maintenant, lui revenait. Cela l'agaçait, d'une part il ne comprenait pas pourquoi cette image le hantait et d'autre part il se doutait qu'un enfant avait beaucoup souffert depuis ce jour-là.

Anton se retourna pour la dixième fois au moins, sur sa couche. Il était stressé et le vent n'y était pour rien. Il se promit d'aller une fois de plus au village quand il pourrait sortir de chez lui. Il n'aimait pas être dans le flou, ne pas comprendre, ni pouvoir interpréter ce qu'il ressentait. Depuis la mort de son père, Anton était devenu un homme angoissé par l'inconnue.

Plusieurs heures plus tard, peut-être même une journée il put enfin sortir de chez lui pour se rendre au village. Il y alla d'un bon pas, sans se fier aux branches qui lui griffaient les jambes ou au paysage chaotique qui l'entourait. Lui qui avait toujours trouvé que la forêt était ordonnée là il ne la reconnaissait plus. Des arbres avaient été arrachés, des roches avaient volés ou éclatés dans tous les sens et plus aucun animal n'erraient dans les parages. Anton se sentait seul et épies à la fois, il accéléra un peu plus le pas. Si bien qu'il se mit à courir.

Vybor Kosilki, le choix de la faucheuse. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant