La vérité attend. Seul le mensonge est pressé.

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Alexendru Vlahuta.

Une sensation de vide le frappa bien avant qu'il n'ouvrit les yeux. Cela le réveilla à plusieurs reprises pendant sa courte nuit. Étant habitué à ce genre de sensation, il ne se leva pas. À quoi bon de toute façon ? Il savait que rien ne pouvait la retenir quand elle ressentait le besoin de prendre la route. Comme à chaque fois, il serra les dents.

Cependant, peu avant son réveil, il ressentit un malaise plus violent. Un de ceux qui vous entravent le cœur, si lourdement, qu'il sentit sa vie s'en échapper. L'ami se leva d'un bond, ce n'était pas normal ! Il ne prit pas le temps de s'habiller correctement ; ayant à peine un pantalon décent sur le corps. Il passa de maison en maison, déplaçant à peine assez de vent pour soulever un faible nuage de poussière grise. Il était encore pelotant et déjà couvert de sueur. Son pauvre vieux cœur battait à tout rompre, se débattant contre ses entraves. Il se sentait mal à chaque fois qu'elle s'en allait, ayant toujours l'impression qu'il lui manquait une partie de son corps quand elle disparaissait. Puis leur monde était beaucoup moins beau sans elle à ses côtés.

Ses tripes, comme il aimait le dire, lui hurlaient, à chaque fois, qu'elle reviendrait, qu'elle ne l'abandonnerait jamais ! Cependant, cette fois, quelque chose clochait. Il y avait bien sûr cette sensation de vide dans son corps, celle qui étranglait son propre cœur, mais aujourd'hui c'était pire, il se sentait encore plus mal. Il avait l'impression de recevoir un uppercut en plein visage et à chaque fois qu'il essayait de se relever, il recevait un autre coup qui le collait au sol. Encore et encore. Il avait aussi l'impression que son corps était rongé par de l'acide. Que chaque respiration, chaque mouvement, l'anéantissait sans jamais le tuer.

La porte d'entrée d'Ana claqua et rebondit contre le mur. Son bruit résonna dans la rue et un corbeau s'envola en silence.

- Ebat' ! Rugis une première fois le colosse.

Sa voix était si rauque que les murs tremblaient et une nouvelle fissure dans le bois vit le jour. Il remuait dans tous les sens, sans vraiment savoir quoi faire et où aller. Il regardait sans voir. Ses yeux n'auraient pu se fixer que sur sa silhouette de toute façon.

Il passa au crible toutes les pièces en une poignée de seconde. Il savait pertinemment qu'elle ne serait pas là, mais il fallait qu'il s'en rende compte-pas lui-même. Quelque part, l'ami avait besoin de cette torture, il fallait qu'il voie cela de ses propres yeux.

- Ebat' ! Hurla-t-il à plein poumon quand il se retrouva au plein milieu de son salon.

Avec ses bras le long de son corps et sa respiration erratique, il aurait très bien pu passer pour un fou.

Peut-être l'étaient-ils tous un peu après tout ?

La pièce principale était minimaliste et pratique ; un bahut rempli aussi bien d'armes que de munitions, une table avec quatre chaises en bois, seule touche d'originalité vu qu'il n'y en avait pas deux identiques, et enfin, un bureau sous la fenêtre. D'ailleurs, celui-ci attira tout particulièrement son attention. Il était trop bien rangé, chose exceptionnelle, et aucune bouteille vide ne trainait au sol. Chose encore plus rarement. Ana détestait tellement son petit bureau, qu'elle avait tendance à le recouvrir avec absolument tout ce qui lui passait sous la main. L'ami n'avait jamais compris pourquoi elle le maudissait autant.

Depuis bien des siècles maintenant, ils avaient pris la mauvaise habitude de boire, pour calmer leurs esprits. Ils noyaient leurs mauvais souvenirs sous des litres et des litres d'alkogol', sans jamais ressentir la moindre ivresse salvatrice.

L'ami planta ses deux mains de part et d'autre du petit bureau, il trembla légèrement sous son geste. Un tas de feuilles légèrement éparpillé attira son regard. Elles semblaient toutes provenir d'un carnet, elle en avait des tas. La jeune femme avait peur d'oublier. Cette angoisse lui était venue avec le temps ; plus elle prenait de l'âge sans jamais vieillir, plus cette crainte lui enserrait la gorge. Elle ne voulait pas oublier d'où elle venait et qui elle était. Alors elle écrivait, elle notait tout ce qui lui semblait important et/ou futile.

Vybor Kosilki, le choix de la faucheuse. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant