A l'occasion de mon 100ème abonné, j'ai proposé à ce nouveau venu de me lancer un défi. Il n'en fallait pas plus pour ouvrir un nouveau chemin vers d'autres possibles...
Au rendez-vous : tout plein de textes brefs qui repoussent les limites de mon e...
Décrivez une course poursuite et intégrez y une conversation, quelle qu'elle soit, entre deux personnages qui fuient le "méchant".
Astuce : Quand on a peur pour sa vie, on n'entame pas de long monologue. Après, vous pouvez contre balancer en prenant le parti de l'humour ^^
Have fun !
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— Mate ces deux-là !
Le policier en planque pousse doucement son coude dans les côtes de son collègue en pouffant.
— Un mâle et une femelle, ouais, j'ai vu.
Murmurée avec un tremblement de délectation par anticipation, la réponse flotte dans l'habitacle obscur du véhicule de patrouille caché par les fourrés.
— Tu préfères être au-dessus ou en-dessous ? relance le premier
— En-dessous, lâche l'autre sans réfléchir.
— J'ai toujours su que t'étais une tapette ! raille le premier en se coulant dans la nuit.
L'autre le suit plus difficilement, peinant à se glisser par la portière à cause de son embonpoint.
Le plus athlétique des deux agents ne l'attend pas et file ventre à terre par une sente qu'il connaît bien et qui trace une ligne pentue mais droite entre les lacets du chemin principal afin de doubler leur cible par l'amont. Avec la neige qui étouffe ses pas, il se sent l'invulnérabilité d'un prédateur chassant sous la lune. Et qui sait que ses deux proies ne lui échapperont pas. Surtout qu'elles n'ont probablement plus de chaussures.
Un rictus dévoile ses dents dans un sourire métallique. Il sent l'adrénaline et l'attrait de la peur de ses cibles. Il accélère en tâchant de ne pas déraper dans la descente.
Arrivé au coude avant la sortie de la forêt, il se tapit dans un buisson et écoute sans bruit.
Le petit couple arrive. Il l'entend déjà.
— Soon, sweety ! We'll soon be safe !
Le policier reconnaît bien là l'accent arabe d'un Syrien dans la voix étouffée de l'homme.
— Too tired. Sorry. Can't walk more. Baby comes...
Il parierait sur une Kenyane... Ou peut-être une Rwandaise. Une Négresse, en tout cas : il en jurerait sur la tête de ses deux mômes !
Il en vient tellement depuis l'Italie, ces derniers mois, qu'il a appris à les reconnaître à leur accent.
Il attend le moment. Ça ne devrait plus tarder.
Lorsque les deux clandestins arrivent à deux mètres de sa position, il surgit devant eux en leur braquant sa torche dans les yeux et en hurlant :
— Police ! Vos papiers !
Passé l'instant de choc et d'aveuglement, les deux réagissent comme prévu : ils crient et rebroussent leur chemin avec effroi, remontant vers le col.
En souriant, le policier leur emboîte le pas en poursuivant ses cris :
— Vos papiers, j'ai dit ! Police !
À chaque fois que sa voix claque dans la nuit, le couple d'intrus se presse un peu plus.
Leurs pieds nus glissent dans la neige, et cette vision cocasse le ferait rire s'il ne devait pas économiser son souffle pour rester sur leurs talons.
La peur donne des ailes ! pense-t-il.
Ils ne sont plus très loin du col, maintenant.
Bientôt, ils arriveront au niveau du collègue.
On va bien se marrer !
Et, de fait, à l'endroit convenu, le gros Dédé apparaît en gueulant comme un gros ours sur le flanc du sommet, et le petit couple fait un écart, épouvanté, vers l'à-pic.
— Run ! crie l'homme à sa compagne, sans doute pour l'encourager.
Elle peine à le suivre, toute gémissements pathétiques et silhouette lourde trébuchant dans la poudreuse.
C'est l'instant idéal : Dédé et lui resserrent les mailles de leur piège et se mettent à aboyer furieusement des ordres en pointant flingues et lampes sur les grimaces terrifiées et ridicules de leurs proies.
Paniqués autant qu'éblouis et désorientés, ils reculent en vacillant et tombent à la renverse vers la vallée d'Aoste, dans l'ombre du Grand Paradis qui s'auréole doucement des premiers halos de l'aube.
— Deux que le chef nous reprochera pas de ramener au poste ! s'exclame Dédé, essoufflé.
— Et que les Italiens ne se plaindront pas de voir revenir !
Les deux agents retournent alors en s'esclaffant vers leur véhicule en pensant au bon café chaud qui les attend au commissariat.
