ALEXANDRE / L'ARROSEUR ARROSE

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J'attends avec impatience mon verre d'eau, un sourire au coin des lèvres. Je la trouble, je l'ai senti, et j'aime cette impression. Madame je sais tout et j'ai raison sur tout n'est pas si forte que cela.

Ses joues rouges et son air décontenancé m'ont bien plu. Me voici donc dans mon lit à attendre patiemment le deuxième round ! Elle ne va pas s'en sortir si facilement, je vais lui pourrir la vie. Elle ne sait pas à qui elle a affaire. Elle veut rester chez moi tout le weekend, qu'à cela ne tienne, mais je vais lui en faire passer l'envie. Des voix me parviennent je relève la tête et que vois-je ?

Mistinguett, un verre d'eau à la main, et un petit bonhomme dans l'autre. La perverse, elle n'a rien trouvé de mieux que de venir avec un témoin mineur. Mais cela ne m'arrêtera pas. Elle, par contre, m'offre un regard triomphant, elle croit que cet enfant va la protéger ? Elle ignore vraiment qui je suis. Changement de plan, je ne vais pas pouvoir la harceler sexuellement mais je vais bien trouver une autre solution. Je suis sûr qu'il y a mille manières de la rendre folle pendant ces deux jours.

Mon Dieu je deviens fou, je parle tout seul.

- Votre verre d'eau.

Elle s'est approchée de moi sans que je m'en rende compte, j'étais trop concentré sur mes joutes verbales intérieures. Elle a repris ses couleurs normales et son aplomb aussi.

Je tends la main et m'empare du verre, je frôle sa main très vite, et à nouveau son regard me fuit.Un léger sursaut me donne le sourire aux lèvres. Je m'apprête à porter le verre à mes lèvres tout en la fixant profondément quand mon matelas se met à danser la gigue, et bien sûr, je renverse une partie de mon verre sur les couvertures.

- Mathias ! Est-ce que je ne t'ai pas demandé d'être sage ?

Je grogne de mécontentement et me tourne pour fixer la petite chose qui vient de se faufiler sous les draps à côté de moi. Il doit avoir cinq ou six ans, les cheveux châtains, le regard rieur, et entre ses dents, un doudou pend lamentablement. Au son de la voix de sa tante, il la regarde, les yeux grands ouverts.

- Zé pas fait esprès tatie, il est trop mou, le lit.

Incroyable, il vient de parler, la bouche pleine avec son doudou, et tout est compréhensible. Dans cette famille, ils ont tous des talents insoupçonnés, sauf Marie, qui n'est qu'une poltronne sans aucune envergure.

- Sors de ce lit tout de suite, Mathias, on va laisser Alexandre se reposer un peu.

Quoi ? Elle veut partir maintenant ! Non pas question !

Je lâche des yeux la petite tête châtain pour fixer la tantine.

- Pas question que vous repartiez, j'ai besoin de me laver les dents et ensuite il va faut que vous m'aidiez à me... soulager.

Sur les derniers mots, j'ai baissé le son de ma voix, pour n'être entendu que par elle. Je la regarde d'un œil gourmand, un sourire carnassier aux lèvres. Je veux qu'elle comprenne bien le double sens de mes paroles, je veux qu'elle se sente mal à l'aise. Il ne faut pas que je la laisse reprendre le pouvoir. Elle doit comprendre que c'est moi qui dirige les opérations et non l'inverse. Mais cette andouille se met à crier d'un air outragé.

- Vous voulez une prostituée ? Ce soir ?

Je sursaute et me tourne immédiatement vers le petit garçon assis à côté de moi. Il n'a pas l'air choqué ni même perturbé par les mots de sa tante, il se contente de nous regarder les yeux grand ouverts. La colère m'envahit. Mais comment élève-t-elle ses enfants, cette femme ? Je reporte mon attention sur elle, toujours aussi offusquée, et moi toujours aussi en colère.

- Mais non, triple buse. Vous n'avez décidément rien compris. Je sais me soulager tout seul, il faut juste que vous m'aidiez à ...

Mais, elle ne me laisse pas finir ma phrase.

Elle ouvre davantage ses yeux, se précipite sur le petit et lui cache les oreilles. Puis elle me fusille du regard.

- Cessez, s'il vous plait ! Je ne vous aiderai pas à faire ce genre de chose. Je veux bien vous aider à vous laver les dents, mais pour ce qui est de vous soulager, vous devrez vous satisfaire de votre main et rien d'autre. Et merci de faire vos machins dégueulasses quand nous serons tous partis ! Vous n'êtes vraiment pas un type normal.

Je souffle de colère et je me rends compte que je suis l'arroseur arrosé, qu'elle ne m'a pas compris. Plus calmement, j'essaie de rétablir la vérité.

- Je veux juste aller aux toilettes uriner. C'est tout. Vous et votre esprit tordu, qu'est ce que vous avez cru ? Que je voulais me masturber ?

Sur les derniers mots, je reconnais que mon ton est monté d'une octave trop.

Je la vois ouvrir la bouche en grand et une idée perverse me vient d'un coup. Ce que j'aimerais être dans sa bouche ! Je n'arrive plus à détacher mes yeux de cette cavité, si tentante, mes oreilles bourdonnent et mon souffle s'est arrêté dans l'attente de la suite.

- Ca veut dire quoi, maturber ?

Mon souffle revient comme par miracle et mon regard se pose sur le petit. Il me fixe avec un grand sourire dans l'attente de ma réponse. Je suis en enfer, ce n'est pas possible ! Moi l'avocat le plus prisé du département, je me suis mis dans une situation inextricable.

- Tenez, Monsieur Alexandre, expliquez-nous donc ce que ce vilain mot veut dire ?

Et elle en remet une couche ; elle le fait exprès ?

Et là, dans son regard, je vois qu'elle se moque de moi depuis le début. Elle est toute fière d'être parvenue à me faire sortir de mes gonds. Je n'ai pas marché, j'ai couru. Elle avait parfaitement compris la première fois et elle a voulu jouer un peu, je viens de me faire avoir en beauté. Elle est plus maligne que je ne pensais, il va falloir que je peaufine ma tactique pour rendre folle cette fille sans passer pour un pervers ou bien fou.

Mais quels médicaments les médecins m'ont-ils administrés pour avoir toutes ces idées en tête ? Peut-être que j'ai un traumatisme crânien et que mon cerveau est fortement atteint ?

Je reporte mon attention sur le petit et, de ma voix la plus professionnelle, je lui explique.

- Cela veut dire, vouloir uriner.

Je le vois hocher la tête, pensif.

- D'accord, moi aussi ze veux aller maturber.

Mon Dieu, mais qu'ai-je fais ? Comment me sortir de cette situation ? Je regarde autour de moi paniqué et je cherche de l'aide dans la seule personne présente dans la pièce, la tantine fofolle.

Elle se contente de soupirer puis explique calmement à son neveu avec beaucoup de pédagogie.

- Mon loulou, c'est un vilain mot, il ne faut plus jamais le dire à personne. Si tu as envie d'aller aux toilettes, je t'y emmène, mais tu promets de ne plus dire ce vilain mot ?

- D'accord tatie, mais zé beaucoup pipi.

Je ferme les yeux, me cale dans les coussins. Je vais aller en enfer pour ce que je viens de faire.

J'AIME PAS LES AVOCATSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant