Bienvenue au Ghana

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Le lendemain matin je me réveillai et allai sur le chantier de construction de l'école pour l'association « My dream ». Comme tous les matins il faisait extrêmement chaud et sec ; c'est normal nous étions au Ghana. La chaleur étouffante de ce pays me serre la gorge encore aujourd'hui. Sortie de ma campagne bourguignonne je ne m'attendais pas à un tel dépaysement. Je faisais la rencontre de la pauvreté pour la première fois. Certes nous n'étions pas fortunés en France. Je faisais partie de ce qu'on appelle aujourd'hui la classe moyenne. Mais c'était assez pour perdre mes repères.

Dès l'atterrissage à l'aéroport, le premier pas dans ce paradis infernal était insoutenable. Ces hommes noirs comme des panthères s'arrachaient mes bagages, mendiant un peu d'argent. J'étais blanche donc pour eux j'étais riche cela va de soi.

Cette rencontre avec la misère me bouleversait au fond de moi. Il n'y avait pas un tréfonds de mon âme qui arrivait à soutenir le regard de ces jeunes africains. Mais ce dont je fus étonné de trouver parmi toute cette gueuserie ce fut la joie. En effet, malgré leur condition on sentait une réelle joie émaner de ces hommes, femmes et enfants. C'est ainsi que je découvrais le Highlife. Cette musique ghanéenne endiablée rythmée par une basse démoniaque. 1, 2, 3,4. 1,2,3,4. La basse suit sa voie sur ce style endiablé. Bien que j'en avais peu, je commençais à remuer mon popotin sur cet air diablotin. La guitare ajoutait quelque chose de magique à l'affaire. Aérienne, isolée, elle me transportait dans ce vaste continent d'infortune. La richesse des chanteurs et du clavier rajoutaient de la beauté à ces rythmes traditionnels. Ô timide batterie, fais ta loi ! Fais-toi entendre ! Bada bada bada bada badum tsss.

Après une bonne demi-heure de marche dans cette fournaise, j'arrivais enfin à l'école. Nous avions presque fini les travaux à faire sur le toit. Nous étions contents de l'avancée de notre travail. Ce n'était pas si facile de faire tenir ces bouts de tôle et, à plusieurs reprises, je mettais fait mal avec le marteau à tenter vainement de les clouer. Mais le résultat ne nous rendait pas peu fiers. Au contraire, même si ce n'était pas une école européenne avec tout le prestige qu'elle implique, ça restait le meilleur endroit pour ces enfants. Ces pauvres enfants s'amusant avec des boites de conserve et leur imagination comme moteur. Tantôt balle de football, tantôt talkiewalkie, ils savaient s'amuser d'un rien les bougres !

Une fois la matinée finie, je rejoignis mes amis pour aller déjeuner dans ce qu'on considérait être un petit parc pour manger du fufu, une sorte de pâte faite de plantain et manioc pilé. Je prenais du poids à manger la nourriture locale mais peu m'importais. Là-bas, les codes de beautés n'étaient pas les mêmes. On n'était pas sous le joug des magazines de mode où les tops model sont squelettiques. Sur ce continent les femmes sont bien en chair. Et quelle chair ! Si voluptueuse les courbes et les formes ! Un délice pour le regard et le toucher. Les fesses potelées et rebondies sont un vrai régal pour les vermines que sont ces hommes malingres et chétifs.

Je reprenais la journée. Il faisait tellement chaud c'était à peine supportable. Je bus un peu d'eau de ma bouteille et me remis au travail. C'est dur mais la souffrance était supportable. Je sentais les endorphines me soulager de ma douleur. C'était expiateur. Je tapais avec mon marteau sur la tôle brulante. Toc. Un clou. Toc. Je me mets à repenser à cette soirée au bar et cet homme mystérieux. J'aimerais le revoir. « Est-ce qu'il sera là si je retourne ce soir au bar ? » me demandais-je. Il n'avait pas l'air d'être un habitué. Ni même d'être ici depuis longtemps, il avait le teint blafard. Un étranger ?

« Lucie ! Oh Lucie !

— Oui monsieur Chalumard, répondais-je sortie de mes songes.

— Je vous présente votre nouveau partenaire de travail, il s'appelle euh...pardon mais comment vous vous appelez déjà ?

— John...simplement John, répondit le nouveau.

Casus BelliWhere stories live. Discover now