Les Noctambules T.1 - Désirs Nocturnes

Chapitre 2 - Pari masochiste

Musique : AC/DC — Rock or Bust

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Derrière le comptoir, je remets nerveusement mes cheveux derrière mes oreilles. Finalement, j'aurais dû me défouler sur cet abruti. Maintenant que je suis coincée à Olya entourée par des ivrognes au tempérament insupportable, une migraine me laboure lentement le crâne.

Je me masse les tempes pour tenter de diminuer la douleur. C'est sans compter sur Uriah, un employé du bar et ami de longue date, qui change la playlist par du rock. Lorsque j'entends « Rock or Bust » de AC/DC, je sens que je vais subir cette soirée. Uriah se met à chanter à tue-tête les paroles en mimant un solo de guitare.

Je grimace face à sa performance. Non, être une créature de la nuit ne donne pas de prestance ni de compétence de chant, à part pour les Sirènes... Bref ! C'est une tout autre histoire.

Lorsque la musique passe à la suivante, Uriah se déplace en dansant à mes côtés tout en secouant un shaker pour un client. Il me lance un vigoureux coup de hanche pour m'inciter à le suivre dans sa chorégraphie. Son comportement m'arrache un sourire.

Ses yeux croisent les miens. Est-ce que son client avait décelé leur couleur or si étrange ? Certainement pas. Les gens doivent s'arrêter sur ses bras recouverts de tatouages ou sa carrure d'athlète. Repérant mon regard sur son corps, il me fait un clin d'œil avant de tirer sa langue dans ma direction et de me montrer son piercing.

Je me mets à remplir des verres de bière en me déhanchant au rythme du son. Je suis incapable de faire plus avec la douleur dans ma jambe. Mon ami devra faire avec cette faible tentative rythmique ! J'en profite pour observer les alcooliques accoudés au vieux comptoir, les fêtards qui jouent aux fléchettes ou au billard ainsi que les pochards incapables de tenir correctement en place sur les chaises en bois éparpillées dans la pièce. Cette scène, je la connais par cœur depuis ma majorité. Autant que je connais que la plupart des invités. Les vieilles habitudes ne changent pas et les Noctambules aiment cet endroit, un repaire pour les créatures nocturnes loin des humains.

Les commandes se calment un peu et me laissent le temps de souffler. Uriah se place à mes côtés, accoudé sur le comptoir et le menton dans sa paume de main noirci par l'encre. Il me dépasse facilement d'une tête ou deux et, avec la musique, impossible de se parler autrement.

— Est-ce que Momo est partie chasser ? me questionne-t-il. Sans m'emmener ? se plaint-il.

Uriah fait la moue, vexé. Mais impossible de penser qu'il est un enfant avec sa taille imposante, ses cheveux noir corbeau et son style de biker. Sans compter sa nature profonde !

— Tu veux dire : sans emmener sa fille ! répliqué-je, mauvaise.

J'ai besoin de me défouler. Et quoi de mieux que de taper sur des créatures nocturnes qui désobéissent aux règles ? Cette fois, son expression désolée est sincère. Momo n'est pas un nom sérieux, mais sa propriétaire, si. Il faut dire que son physique d'ange innocent lui a permis plusieurs fois de faire baisser sa garde à ses... cibles ? Agresseurs ? Non, victimes.

Des éclats de voix plus forts que la musique attirent notre attention vers le centre de la pièce. Un homme aux cheveux d'ébène se tient devant la table de billard. Même de dos, je sens qu'il est confiant, beaucoup trop pour ce genre d'endroit. Face à lui, je vois Keith, notre client le plus fidèle. Et avec sa fibre naturelle pour l'Aérokinésie, le contrôle des mouvements de l'air, un jeu de précision est perdu d'avance pour son adversaire. Il semble que les paris sont lancés autour d'eux.