Chapitre 11

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La défense prend la parole, le suspect plaide coupable, l'accusation lui reproche de mentir en se disant atteint d'un trouble de l'identité. La salle se réveille quand le juge frappe de son marteau sur le bois. Et on dit que c'est l'âme des victimes qui s'expriment quand le silence revient dans le palais de justice.

Dans la nuit noire commença cette histoire, sur les quais d'Alexandria. L'accusé y laissa sa première victime nue et presque noyée dans l'espoir que le corps soit dévoré par les poissons. Le coeur plus dur que le métal, j'y ai vu l'oeuvre d'un être diabolique. Nombreuses furent les femmes assassinées après celle-ci. Il faisait équipe avec un homme. Menacé par les forces du mal, il l'élimina.

Le juge Claude Frolo combat le vice et le péché, d'un monde corrompu et qui doit être purifié.

"Vous ne pourrez cacher vos coupables actions aux yeux de nos jurés. Vous ne tromperez personne en plaidant la folie." L'accuse le procureur.

Qu'on l'enferme quelque part, à l'abris des regards. Cette créature n'a pas sa place dehors. L'homme peut-il être un monstre ou ces êtres sont des monstres sous l'apparence d'hommes ?

"Experte psychiatre chargée de l'accusation, j'appelle Mademoiselle Shay Cooper."

Mon nom n'est pas Shay et je ne suis pas non plus psychiatre. Cependant j'ai passé plus de temps avec l'accusé qu'il n'en faudrait pour écrire sa biographie en 500pages.

Je passe le portillon séparant la cours du public de curieux venus en masse pour l'occasion. Les tueurs en série restent un phénomène de société. On tient à les voir, à savoir à quoi ils ressemblent, s'ils sont... comme nous.

Je prends place à côté du Président :

"Levez la main gauche et dîtes "Je le jure"

- Je le jure."

Je m'assois et tous font de même. Je prends une profonde respiration, il n'y aura pas d'hésitation dans ma voix, je suis absolument certaine de moi. Il n'y aura pas non plus la moindre compassion pour cette homme dans le box des accusés. Il ne m'a que trop menti. Il m'a sous-estimée, trop pathétique pour assumer ses actes. Grâce à mon don je crois pouvoir dire que je suis impartiale, formelle et factuelle. Je ne peux pas me tromper car ils ne peuvent pas me tromper.

"L'audience d'aujourd'hui vise à déterminer si l'accusé peut être reconnu irresponsable de ses actes. Nous parlons ici de 17 assassinats commis entre le 20 Avril 1997 et le 13 Mai 1999. Monsieur Patrick Rossi, souhaitez-vous plaider coupable pour ces 17 chefs d'accusations ?

- Oui votre honneur.

- La parole est à Mademoiselle Cooper.

- Merci votre honneur." Je m'adresse à l'accusé et non à l'assistance. "Après avoir passé de très nombreuses heures avec Monsieur Rossi, mon avis vient conforter l'expertise de mes confrères psychiatres. Je suis d'accord pour admettre que Monsieur Rossi souffre d'un trouble du comportement, il s'est isolé pendant plus de 10ans et a vécu tel un marginal durant toutes ces années ce qui l'a rendu incapable d'adresser la parole aux femmes. Je soutiens que ce trouble n'a aucun effet sur sa capacité à comprendre la réalité et la gravité de ses crimes. Il souhaite nous en parler comme s'il s'agissait des actes de quelqu'un d'autre." Je dis en le regardant droit dans les yeux. "Mais en revenant sur certains détails, je l'ai vu sourire et revivre ses crimes. Tous les incidents qui ont affecté l'intégrité physique et mentale de Monsieur Rossi ne peuvent être considérés comme une défense concrète, réelle et honnête dans ce procès qui l'oppose à l'Etat de Virginie."

Je vais garder pour moi l'arrogance terrible dont il a fait preuve lors de nos premiers entretiens, croyant pouvoir m'impressionner, étant certain de pouvoir m'effrayer. Ce n'est au final qu'un petit homme minable et impuissant.

"J'ajoute que lors de nos entretiens, Monsieur Rossi s'est très souvent contredit pour me faire croire qu'il souffrait d'un trouble de la personnalité multiple, ce qui le disculperait aux yeux de la loi." Qui reconnait cette affection comme maladie mentale altérant le jugement. "Sa prestation n'a pas été convaincante." Je dois conclure. "Aujourd'hui, et même si la défense cherche à soutenir le contraire, Monsieur Rossi est parfaitement conscient de ses actes. Pour preuve, il a éliminé la seule personne qui aurait pu témoigner contre lui : son complice. "

Et même si je crois qu'il regrette, rien ne peut être effacé.

C'est ce dont je dois me souvenir lorsque je ferai à nouveau face à Chris, il reste l'Etrangleur et je ne peux me laisser séduire par son magnétisme.

Je suis convaincue par la repentance de certains tueurs comme Jeffrey Dahmer. Je reconnais également ceux qui mentent pour échapper à la peine de mort ou faire traîner leur procès.

Je n'attends pas les délibérations. Je veux rejoindre le FBI au plus vite avant qu'ils ne transfèrent Chris Ford dans une prison d'Etat. Je roule bien trop vite sur la 495 pour relier Springfield où je fais une halte pour appeler Matt. Il a toujours besoin que je le rassure lorsque je pars loin de lui. Il n'aime pas que j'aille travailler dans un autre état. Il n'aime pas que je travaille tout court.

L'un de mes confrères m'apprend que Rossi a été condamné à 17 peines de perpétuité, soit 957ans de prison. Son air triste et les quelques regrets qu'il a exprimé durant le procès ont apparemment suffit à le faire échapper à la peine de mort.

Je dépose mon café dans le porte gobelet avant de redémarrer. Je laisse mes pensées vagabonder sur la 95 vers Quantico. Je dois mettre la radio au volume maximum et y superposer une playlist de mon portable pour que cessent enfin les questions dans ma tête.

Je me gare dans les sous-sol. L'ascenseur me ralentirait dans ma course alors je choisis les escaliers. Je presse le pas dans les couloirs. J'ai peur qu'il ne soit plus là.

Pour rassurer Matt, je ne suis pas venue depuis deux jours. Je ne veux pas que l'on me croit obsédée par l'Etrangleur.

Mais comme je crains de ne pas avoir l'accréditation pour lui rendre visite en prison avant des semaines voir des mois, je considère que c'est ma dernière occasion de voir Chris. J'avance jusqu'au plus grand des bureaux et me penche pour poser mes lèvres dans le cou de mon petit ami. Il tourne sur sa chaise et je viens m'asseoir sur ses genoux.

"Tu m'as manqué." Il dit avant de m'embrasser.

Je caresse sa nuque, profitant qu'il porte un tee-shirt et non une chemise. Je suis fatiguée par le voyage alors je me cale contre son corps. Nos moments tendres commencent à me plaire. C'est drôle pour quelqu'un qui n'a jamais été très tactile. Mais Matt a su s'imposer dans ma vie. J'aime bien être près de lui. Sauf quand il me dit :

"Chris Ford sera transféré demain matin."

Je n'ai aucune réaction, je ne fais pas un geste. Je sais me contrôler. Je respire le parfum de sa peau et laisse aller et venir mes doigts par dessus le tissus couvrant son ventre. Je ne dois pas donner l'impression de supplier :

"Est-ce que je peux le voir ?"

Death Battle (sous contrat d'édition HQN)Where stories live. Discover now