2-Clyde

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«Si vous traversez l'enfer, continuez d'avancer.»

-Winston Churchill.


Je me hais.

Il en a pas toujours été ainsi bien-sûr, la haine est un sentiment très intense, elle met des années à s'installer, à se dessiner jusqu'à se fondre dans le paysage, jusqu'à ce qu'il soit trop tard pour s'en défaire.

Je hais celui que je transparais être devant les gens, celui que je suis devenu. Je sais que ma mère mépriserai aussi cette personne que je prétend être aujourd'hui, elle me donnerait probablement la gifle de ma vie pour me remettre les idées en place. Cela ne servirait à rien, le mal est une maladie dont il est bien difficile de guérir, elle se révèle très souvent meurtrière.

Certaines personnes vivent très bien avec cependant. Le meurtre, le trafique d'êtres humains, le viol, les atrocités de ce monde, ce n'est pas un problème pour eux. C'est la vie qu'ils ont choisi.

Cela n'a pas été mon cas.

On m'a forcé à choisir cette destinée, à me transformer en monstre, en meurtrier sans pitié. Ce sont les aléas de la vie, on a pas toujours de la chance. Mais bon, dans mon malheur je peux toujours me dire que la situation aurait pu être bien pire.

Au moins, j'ai survécu.

Mon coup partit une nouvelle fois contre le sac de frappe alors que je lâchais un cris, mes jointures me faisaient souffrir. Soufflant bruyamment, je saisissais un linge , le pressais contre mon front et quittais la sale d'entrainement. Descendant les escaliers pour rejoindre le rez-de-chaussée, je me figeais en entrant dans le salon. Jared était assis à même le sol, la tête penchée vers la table devant une rail de coke.

-C'est une blague?! m'exclamai-je alors qu'il se retournait précipitamment.

La peur se lisait dans ses yeux. Il avait bien raison de me craindre en ce moment.

J'attrapai mon meilleur ami par le col de son T-shirt et le plaquai violemment contre le mur.

-Clyde, souffla-t-il, suppliant.

Je serrai d'avantage ma prise et levai mon poing à la hauteur de son visage.

-Qu'est ce que tu vas faire, reprit-il alors, Tu vas me frapper?

-Ne me tente pas Jared, crachai-je en le laissant retomber contre le mur, Merde! Tu m'avais promis que tu arrêterais ces conneries. Tu veux que je te rappelle où on était il y a un mois? Au cimetière! Pour enterrer ton frère à cause d'une putain d'overdose. Tu veux que je te rappelle les pleurs de ta mère quand elle s'est effondrée devant sa tombe, tu veux que je te rappelle ce que vous avez tous ressenti à ce moment-là. Tu es tout ce qu'il lui reste Jared, tu ne peux pas lui faire ça.

Il se leva en posant un regard noir sur moi.

-Ne parle plus jamais de Mickael.

-Parce que quoi? Parce que tu crois que si on en parle pas, ce sera comme si il n'avait pas existé, que la douleur disparaîtra, que tu recommenceras à vivre normalement. Ça ne marche pas comme ça mec, tu ne peux pas rayer un trait sur ton passé sous prétexte qu'il est douloureux. J'aimais Mickael, j'ai grandi avec lui autant que j'ai grandi avec toi mais ça ne change pas le fait qu'il a fait des mauvais choix. Tu n'es pas obligé de faire les mêmes.

Il leva les yeux au ciel et quitta la pièce sans un mot. Je me laissais tomber sur le canapé en soupirant puis je regardais ma montre et soufflais en constatant que j'étais en retard.

Je devais me rendre à un match de boxe dans une heure à peine, un combat dans le lieu habituel. Je n'avais aucun doute sur le fait que je gagnerai cependant je n'étais pas d'humeur aujourd'hui. C'était étrange, cela m'arrivait rarement, d'habitude c'était la boxe ma motivation. C'était ce qui m'avait sauvé, ce qui avait probablement préservé mon unique part d'humanité. La boxe avait été mon échappatoire quand je ne pouvais plus contrôler cette colère qui me possédait, qui me possède toujours.

IndoloreWhere stories live. Discover now