Chapitre 13

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    « Donc tu resteras à mes côtés dans la joie et la tristesse, dans la santé et la maladie, dans la fidélité et l'infidélité?» 



   Je remarque que son cerveau réfléchit aussi sans arrêt. Peut-être même plus que le mien. Toujours cette question d'infidélité... Non justement, moi non plus je ne pardonne pas l'infidélité. A ces mots, il esquisse un petit sourire que j'interprète comme la validation de ma réponse.

« Si tu marches seul, tu arriveras plus vite ; mais si tu es accompagné, tu iras plus loin. » Ce proverbe chinois résume parfaitement la vie à deux. Mais qu'est-ce qu'une vie à deux ?

Soutien, honnêteté et confiance sont les maîtres mots d'un couple. La joie d'être accompagné, dans la richesse de l'honnêteté, solidifiée par la confiance. Ce sont aussi les maitres mots obsessionnels de ce bel andalou. Une peur d'être seul suivit d'un doute permanent, une envie d'y croire mais une crainte d'être abusé.

Mes recherches continuent. Je veux comprendre, je veux savoir ce que signifie cette obsession, pourquoi ma vie change du jour au lendemain, comment peut-il m'aimer puis me haïr. J'ai besoin de comprendre, pour lui, pour moi, pour nous. Retour au profil bordeline, ou trouble de la personnalité limite.

« Une instabilité stable ». L'article que j'étudie détermine la vie de ces personnes par un oxymore. Une instabilité qui se répète, un changement de position fréquent, cette « stabilité qui me manquait ».

Quand on a peur, on panique. Quand on panique, on n'a pas le temps de réfléchir.
Quand on est très heureux, on est excité. Quand on est excité, on ne réfléchit pas vraiment non plus. Les extrêmes. Evidemment, avec des émotions qui arrivent subitement, il est difficile de contrôler les évènements. Tout est soit blanc, soit noir, sans passer par le gris.

Dans ce fonctionnement de la pensée, l'idée qu'on se fait des autres est identique. Une personne sera vite appréciée, idéalisée mais rapidement détestée, car dite « mauvaise ». Les relations interpersonnelles se compliquent, s'enflamment et se brûlent. Cette fragilité, cette instabilité qui vacille d'un extrême à l'autre. Le « je t'aime » et « je te déteste ».

Qui dit extrême dit intense. La joie se transforme en passion, puis la colère en rage. La tristesse est désespoir et l'envie se mélange au besoin. Un ascenseur émotionnel particulier, à la vitesse maximale. Il est difficile de connaitre les raisons de ce changement d'émotions. Les spécialistes parlent de peur. Qu'elle soit une peur de l'échec, de la rupture ou de l'abandon, c'est bien une peur qui anime ces changements de position. Mais la peur entraine la panique. Et la panique donne naissance à des paroles insensées.

Arrive l'impulsivité. Et c'est une entrée théâtrale ! Défile le « je ne veux plus te voir », influencé par « protège-toi » et convaincu avec « seul, tu es en sécurité ». Evidemment, les accusations suivent. Elles doivent être prononcées, des doutes que l'on veut confirmer, cette conscience qu'on veut rassurer. Dans un monde qui bascule d'une minute à l'autre, le doute est bien-sûr toujours présent. Ce n'est pas évident de vivre dans une remise en question permanente de soi, des autres.

La traduction de cette dernière scène est complexe. Il faut entendre « ne me laisse pas », car le « protège-moi » se renforce par « j'ai peur ». Les doutes sont les craintes, celles qui font partie de chacun, celles qui doivent être tranquillisées. Les spécialistes de mon article parlent aussi de nécessités. Un couple étrange entre le besoin des autres et l'obligation de les éviter. Comme un besoin démesuré de soutien qui s'accompagne d'une protection obsessionnelle.

Chez Alejandro, la personne de son cœur est très forte. Ses nécessités sont incontrôlables, ses désirs sont extrêmes et ses paroles prouvent ses envies. Mais il est difficile de croire un homme qui prévoit des projets en quelques semaines de relation. Donc la désillusion s'installe à cause du manque de patience et des désirs confondus avec les besoins. Suivent les peines, les douleurs, les déceptions car les espérances étaient trop hautes. Mais la peine, ce sentiment de tristesse difficile à gérer, cherche à disparaitre. Et voici la personne de l'esprit, celle qui veut se protéger, celle qui veut déterminer le coupable de cette souffrance, celle qui accuse.

Une idéalisation souvent vécue grâce à l'espoir mais détruite par la raison. Une relation intense entre un départ précipité et une arrivée fracassante.

Lorsque l'envie se mélange au besoin, il est impossible de résister. L'exemple connu est l'accumulation de rapports sexuels non protégés. C'est une envie puissante alimentée par le goût du risque qui s'empare d'un corps.

Lorsque l'envie s'arme de courage, les projets se concrétisent. Grâce à la grande variété de leurs capacités, ces personnes sont capables d'entreprendre un nouveau projet, une nouvelle vie, une nouvelle entreprise assez facilement. Leurs qualités sont multiples et ouvrent plusieurs portes. Mais le manque de confiance en soi prend place et l'abandon des projets s'installe.

« Tout ce que je commence, je ne le finis pas. » Une remise en question constante, un besoin d'être soutenu, un manque de confiance qui revient, dans un monde instable et insécurisé.

Donc, avec des envies et des émotions trop fortes qui arrivent sans prévenir, se contrôler devient difficile. Mais pour se contrôler, il faut se comprendre. Et c'est plus facile à dire qu'à faire.    

Un homme, deux mondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant