Chapitre 7.

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Une semaine s'est écoulée depuis que j'ai accepté l'offre d'apprendre l'anglais, et tout est bizarre désormais. J'ai l'impression que tout le monde agit bizarrement avec moi, même si ce n'est pas dans un mauvais sens. Ils discutent plus souvent avec moi, même si je ne comprends absolument pas ce qu'ils disent. J'ai l'impression d'être un bébé quand ils doivent m'apprendre le nom d'un objet. Ils répètent le nom plusieurs fois et me montre l'objet, puis ils me forcent à répéter. Ayat, Maïa et ses frères ne me parle plus dans ma langue. Leur raison c'est qu'il faut que j'écoute l'anglais pour que ça s'imprègne dans ma tête, comme un bébé. Le gens ne me laisse plus seul. Ils m'apprennent constamment des mots et essais de me faire dire des phrases de bases, mais c'est épuisant et frustrant. C'est frustrant de vouloir dire quelque chose sans en être capable. C'est frustrant et fatiguant d'avoir l'impression d'être un bébé qu'on encourage à parler. Je n'en peux plus, mais je ne le montre pas.

Je comprends parfaitement que les gens soient contents pour moi. Ils ne sont pas jaloux, au contraire, ils essaient de m'aider. J'ai l'impression qu'ils veulent que je parle parfaitement la langue en une semaine. Je ne connais que quelques mots, comme comment saluer quelqu'un, demander quelque chose, m'excuser et surtout comment appeler John. Je sais également les couleurs, compter jusqu'à vingt et quelques parties du corps. J'ai vraiment l'impression d'être un enfant.

Le plus étrange c'est comment John agit avec moi. Je ne sais pas trop comment le décrire, mais c'est instable. Parfois, il est dur avec moi, il est rude et garde son visage arrogant. Parfois, il est joueur, tactile et il m'aide même à apprendre quelques mots. Les moments qui me dérangent le plus est quand il est tactile. Il frôle souvent mon dos avec ses doigts et il chuchote à chaque fois, désolé. J'ai compris ce que ça voulait dire : il s'excuse. Il pense peut-être que je ne le comprends pas ou que je ne l'entends pas, mais j'entends cette litanie trois ou quatre fois par jour, qu'il soit rude ou joueur. Il s'excuse à chaque fois qu'il touche mon dos. Au début, je pensais qu'il s'excusait parce qu'il me touchait, mais j'ai fini par comprendre qu'il s'excuse pour les cicatrices. Et à chaque fois, c'est étrange. Je ne sais pas comment réagir, alors je le laisse faire.

Je ne sais pas non plus comment agir face à son père quand je le croise dans la maison. Son visage inspire le sadisme et je le trouve effrayant. Il ne m'inspire guère confiance et je crois que tout le monde le méfie, même son fils. Je le vois seulement en sa compagnie quand il lui apporte sa pipe. J'ai aussi remarqué que John ne me laisse jamais seul avec son père. Je ne sais pas pourquoi il fait ça. J'avais posé la question à Maïa et elle avait répondu qu'il me protège. Je ne comprends pas pourquoi il me protège, et je voudrais bien le savoir.

On est le matin et je me suis réveillé très tôt. Les coqs n'ont même pas encore commencé à chanter. J'ai mal au dos et il ne sera pas jour avant plusieurs heures. Mes blessures sont presque guéries, mais c'est toujours douloureux, surtout quand je dors sur le dos. Et cette nuit je me suis tourné sur le dos. Je sais que la pommade est dans la chambre de John et que le thé que Maïa m'avait préparé est dans la cuisine. Malheureusement, je dois absolument passer par la chambre de John pour prendre le thé et la pommade, mais je ne veux pas le réveiller. Finalement, la douleur prend le dessus sur ma conscience et je me lève sur la pointe des pieds pour aller chercher le thé. J'ouvre la porte menant à la chambre de cheveux doré en marchant discrètement. Heureusement, je suis silencieux et je traverse la chambre rapidement.

Je descends pas à pas dans la cuisine, et je bois le thé même si c'est froid. Je remonte aussitôt dans la chambre, car même si c'est calme, cette pièce me donne froid dans le dos. J'ouvre doucement la porte de la chambre de John pour me diriger vers ma chambre, mais au moment de rentrer dans la petite pièce, le lit grince et je m'arrête aussitôt.

-Mboutu ?

Je retiens ma respiration et je ne réponds pas, mais je me fais prendre en flagrant délit lorsqu'une chandelle s'allume. John me surprend en pantalon, sur la pointe des pieds et une grimace sur le visage. C'est ridicule.

-Mboutu ?

-Oui monsieur.

-Qu'est-ce que tu fais ?

J'ai appris cette phrase hier, et heureusement sinon je ne l'aurai pas compris.

-Moi boire... Maïa... eau brune.

C'est frustrant, je ne sais pas comment dire thé.

-Thé, ça s'appelle du thé.

-Oui, moi boire Maïa thé.

-Tu as mal au dos ?

Ça je ne l'ai pas compris.

-Moi pas comprendre.

-Toi...dos... aouch ? il fait semblant d'avoir mal et je comprends ce qu'il veut dire.

-Oui monsieur.

-Toi veux pommade ?

-Oui monsieur.

Il me fait signe de m'asseoir sur son lit, et j'obéis. Je sens aussitôt quelque chose de froid sur mon dos et je comprends que c'est de la pommade. C'est froid, mais quand ça touche mes cicatrices, ça fait du bien. Son toucher est délicat, il ne me fait pas mal. Un souffle tiède vient réchauffer la pommade et une intense vague de frisson m'envahit. Je ne m'y attendais pas. C'est toujours comme ça quand il me touche, ou même quand il me frôle. Il me donne des frissons, et même si j'ai du mal à me l'avouer, j'aime ça. J'aime beaucoup ça, mais ce n'est pas normal. Je ne peux pas ressentir ça quand on me touche, surtout quand un homme me touche. Ça me déstabilise à chaque fois et c'est encore plus frustrant de ne pas pouvoir en parler.

-Merci, dis-je quand il finit ses manœuvres.

-De rien, tu peux rester ici. Je n'ai pas sommeil moi non plus.

-Moi pas comprendre.

-Moi pas dodo, toi rester ici.

J'ai compris, enfin presque, mais j'ai compris l'important. Il veut que je reste avec lui et bizarrement, je n'ai pas envie de refuser. 

Let me break your chains... [bxb, terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant