Chapitre Quatre-Vingt-Douze

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     Alyssa

Mon corps tourne. A droite. A gauche. Encore et encore. Un grognement d'agacement franchit la barrière de mes lèvres tandis que je finis par me redresser de mon lit. L'obscurité présente dans la pièce me permet toutefois de dissocier la forme des meubles. Immédiatement, mon regard est dirigé de son côté. Pourquoi est-ce que je ressens un tel vide ? Agir ainsi ne rime à rien. C'est tout bonnement ridicule. Je ne peux pas me résoudre à jouer les enfants sages alors que quelque chose de grave se produit en bas.

«Comme si je pouvais dormir sereinement dans une situation pareille... Je ne me savais pas aussi hypocrite.» Murmurais-je.

Je décide de repousser mes draps pour me rendre vers la salle de bain. Me rafraîchir le visage et l'esprit au passage me fera le plus grand bien. Mes yeux sont finalement attirés par mon reflet dans le miroir. J'ai du mal à m'y reconnaître. Je n'ai pas tellement changé extérieurement parlant et pourtant, je vois bien que quelque chose n'est plus pareil. Il suffit d'observer les cernes sous mes yeux ainsi que la souffrance dans mes traits pour le comprendre. Je suis loin d'être celle d'il y a un an. Tout. Tout a changé. Ma vie a complètement basculé du jour au lendemain et j'ignore encore de quel côté la balance est-elle tombée.

Il faut que je fasse quelque chose. Je ne peux pas rester sagement dans ma chambre à attendre que l'on vienne à moi. Surtout pas en sachant qu'à l'heure actuelle mon cousin et mes deux amies sont sans doute entrain de se battre en Enfers pour sauver mon père. Mes poings se serrent à cette pensée et je me retiens de ne pas envoyer mon poing frapper la glace. J'aurais dû agir. Ce n'était pas à eux mais à moi d'agir ainsi. Pour le bien de tous. Je ne tiens pas à être protégé alors que je suis responsable.

«Quelle idiote... Si seulement j'avais...»

Mes mots restent en suspend comme coincés dans ma gorge. Chut. Tais-toi Alyssa. Tout ceci ne te servira à rien. Cherchant à me ressaisir un minimum, je laisse mes mains me claquer les joues pour me donner un coup de fouet avant de partir enfiler mes chaussures et une veste. Il faudra bien que j'affronte ces vieux cauchemars un jour ou l'autre. Pour le moment, la meilleure chose que je puisse faire c'est de prendre l'air.

[...]

Le moins que l'on puisse dire c'est que l'ambiance est plus que pesante. Les mains enfoncées dans mes poches, je continue tant bien que mal d'avancer. Peu d'élèves sont présents dehors, sûrement occupés à guetter les alentours ou à se protéger dans leurs dortoirs. Et pourtant, malgré ce peu de monde, un sentiment désagréable me traverse à chaque pas.

J'ai toujours eu l'habitude d'attirer l'attention sur moi depuis mon arrivée ici. Et ce, pas toujours dans le bon sens du terme. Néanmoins, cette fois-ci, les choses sont encore différentes. Je peux très clairement sentir une aura presque meurtrière chercher à m'atteindre à tout moment. Chacun de leurs yeux sont braqués sur moi. Certains me regardant avec effrois ou méfiance. La différence entre Démons et Anges n'est même plus prise en compte. Je ne suis qu'un malheur ambulant à leurs yeux.

«Ainsi, les rumeurs disaient vraies. Tu es vraiment de retour.»

La surprise doit sûrement se lire sur mon visage au vu de l'air de mon interlocuteur. Je ne tarde pas à me ressaisir lorsque les souvenirs de nos quelques échanges me reviennent en mémoire. Depuis mon arrivée, elle n'a jamais su m'apprécier. Je me souviens encore très bien de la sensation de mon chocolat chaud sur mon corps par sa faute. Je dois bien reconnaître que de toutes les personnes encore présentes ici, je ne m'attendais certainement pas à la revoir. Je m'en serais bien passé.

A croire que tôt ou tard, le passé nous rattrape toujours comme on nous le dit si souvent. Dans mon cas, cette règle s'applique assez souvent.

«Tu as vraiment du culot... Revenir ici et te promener fièrement comme si rien n'était arrivé. Je le savais. Je l'avais prédit depuis le début que tu ne nous attirerais que des problèmes. Tu aurais dû rentrer chez toi. Les Sangs-Mêlés comme toi ne sont jamais une bonne chose pour notre peuple. C'est à se demander pourquoi ils t'ont accepté ici.»

Ne te brûle pas les ailesOnde as histórias ganham vida. Descobre agora