Chapitre 29 : Petit dîner entre "amis"

Start from the beginning
                                    

Soudain, l'atmosphère morose se transforme en petite fête ambiante. Caleb rit faussement avec Merry tandis que Dave tente de m'expliquer son point de vue sur les bonnes manières. Absolument soporifique, mais c'est le but. Les paparazzis ont débarqué il y a quelques minutes et braquent leurs appareils de toutes tailles contre la paroi vitrée en espérant avoir « La » photo avec un grand L qui décorera les périodiques féminins et surtout se vendra à prix d'or. Je reste silencieuse en observant de plus belle le spectacle. Je suis affligée et énervée de voir toute cette fausseté.

À un moment, Caleb se lève et s'arrête à mon niveau en caressant mon épaule dénudée. Il se penche vers moi puis me chuchote à l'oreille :

« Il faut qu'on parle, viens avec moi. »

Il me tend sa main que je prends volontiers après m'être excusée auprès de mes amis puis il me dirige vers l'arrière-salle, sa main dans le creux de mes reins. Je suis poussée vers les toilettes des femmes et, après avoir vérifié s'il n'y avait personne, il ferme la porte à clef et me fait face, avec toute sa grandeur.

Je me retrouve contre les lavabos en marbre, avec un homme qui ne devrait définitivement pas être ici.

« Je t'écoute Liv'. »

Interdite, je fronce les sourcils et croise les bras. Lui craque ses doigts avec impatience.

« Tout va bien, je n'ai rien à dire voyons ! Passive agressive.

— Quelle piètre menteuse, tu fais. Dis-moi.

— Ça y est, Monsieur recommence, dis-je, hargneuse. »

Il peste dans sa barbe.

« Désolé okay ? On oublie et on repart de zéro ? S'il te plaît Liv', je vois bien que ça ne va pas. Tu ne parles pas, tu es ailleurs et ton petit jeu n'arrange pas la situation chaotique. Fais un effort merde ! Je ne sais pas moi !

— Faire un effort ? Alors que je fais de mon mieux pour ne pas nous desservir ? Vous êtes à deux doigts de vous entretuer merde ! Tout le monde le voit et jouer le patron modèle avec des employés et sa, je mime des guillemets avec mes doigts, petite amie n'est franchement pas ton fort ! La veine de son cou gonfle et il ferme les poings.

— J'essaie de faire de me lier d'amitié avec Dave et Merry et tu oses me dire que ça ne sert à rien ? Mais tu es complètement folle ma petite !

— Essayer ? Oui, c'est bien le terme, tiens ! raillé-je, les mains sur les hanches.

— Ce n'est pas aussi facile d'être ami avec des personnes qui me détestent ! Et puis, qui a lancé les hostilités cette après-midi ? Qui a demandé de l'aide à ses amis ? Je te le demande, car je crois que tu as un peu la mémoire sélective ma grande.

— Oh oh Monsieur me rejette la faute maintenant ? Magnifique ? Tu veux jouer à ça ? Très bien, on va jouer ! Qui a commencé par fricoter avec une autre femme que celle avec qui il était marié ? Qui m'a imposé ce job sous peine de retourner illico presto chez mes parents ? Qui n'a jamais eu les couilles de s'opposer à son père ? je hurle de toutes mes forces la dernière phrase et me brise la voix au dernier mot. »

Sur le miroir, mon reflet n'est plus qu'une masse déshumanisée, cheveux en bataille, yeux rouges sans avoir pleuré, ma gorge pivoine et mes joues brûlantes. Je n'ai plus rien à voir avec la fille de dimanche matin. Je suis en colère et plus encore, je suis enragée.

Quand je foudroie du regard Caleb, je remarque qu'il est immobile et j'ai l'impression qu'il a cessé de respirer. Sa bouche est entrouverte et forme un O. Il demeure choqué par mes dires et est plaqué contre la porte. Puis Caleb se reprend et agite la tête de gauche à droite.

« Je crois que tout est dit. »

Par la suite, je me retrouve seule, les mains sur les bords du lavabo ovale, les articulations blanchies tellement je les serre, épuisée et tremblante. Il faut affronter la vérité en face, j'ai dit plus que je ne le pensais et j'ai peut-être réduit à néant un bourgeon de relation.

J'ai sans doute détruit en une phrase la confiance que nous entretenions.

Lorsque je reviens à table, la place de Caleb est vide, son manteau d'hiver n'est plus là et les deux personnes restantes me regardent, larmoyante.

« Il est parti ? déduis-je, la voix émaillée.

— Il y a quelques minutes. Il a dit que la mascarade de ce soir ne devait surtout pas se reproduire par la suite. Dave s'interrompt. Liv', qu'est-ce qu'il s'est passé ? Il avait l'air d'être sorti de ses gonds. »

Je réfléchis un instant sur la façon de leur annoncer, mais finalement, je reste assez brève.

« J'ai merdé. Je me mords la lèvre inférieure avec gêne et baisse la tête, honteuse. S'il vous plaît, payons l'addition et partons, la soirée a été éprouvante pour chacun d'entre nous. »

Lorsque nous sortons, plus personne ne nous attend dans la rue. Dans le taxi, seule, je repense aux mots que j'ai pu dire. Je suis morte de honte, mais j'ai une idée.

« Déposez-moi à la supérette la plus proche, mais attendez-moi avant de partir de repartir. J'ai quelque chose à faire pardonner.

— Une dispute avec votre petit-copain ? Mon corps se crispe en entendant ce mot, j'espère que l'homme au volant ne s'en est pas rendu compte, dans le rétroviseur. Je comprends, j'ai eu droit à la même chose avec ma femme récemment, fait le chauffeur.

— Oui... C'est un peu près ça. » 

Chocolat Chaud et Chantilly [Tome 1]Where stories live. Discover now