5 : L'invitation

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Karl n'a pas passé ses examens de fin d'année. Stan lui en voulait de ne pas s'être présenté au lycée à cette période de l'année alors qu'il était en terminale et si prêt d'avoir son diplôme, mais ce qui l'inquiètait le plus était bien le fait de n'avoir absolument aucune idée de l'endroit où il se trouvait, et surtout dans quel état.
Il n'a pas cessé de voir son ami mort dans ses rêves. Soit il se trouvait couché dans la mer, les lèvres bleutées, soit il était attaché au lustre du salon de sa mère, soit il était couché, en bas des escaliers de l'école, la tête flottant dans une mare de son propre sang.

Stan l'avait imaginé dans tant de situations que ça l'empêchait de dormir. Il ne profitait plus du moment présent, l'esprit trop prisé par toute cette inquiétude.

Le dernier jour de cours, Stan avait des cernes immenses, les cheveux décoiffés à souhait et avait vraiment l'air mal. Azalée s'en est rendue compte aussi vite qu'elle lui ait dit bonjour.

   -Qu'est-ce qu'il se passe pour que tu sois aussi mal physiquement?, a gentiment questionné l'organisatrice des meilleures fêtes.

Stan lui a brièvement expliqué qu'il avait des problèmes avec son meilleur ami, sans jamais cité le nom de ce dernier; il n'en avait pas honte mais voulait éviter de se faire critiquer à ce sujet. Pourtant, Azalée a deviné très vite quel était le meilleur ami en question.

   -Comment sais-tu que je parlais de lui?, a demandé Stan, avec surprise.

   -Je suis plutôt observatrice et j'ai bien vu que tu venais à toutes les soirées que j'organise avec lui et j'ai aussi remarqué qu'il ne vient plus aux cours depuis un petit moment. Je trouve que c'est une merveilleuse coïncidence.

Stan n'a pas cherché à répondre quoi que ce soit à la jeune fille, n'ayant absolument aucune idée de ce qu'il aurait pu dire. Il est resté silencieux, marchant aux côtés de son amie jusqu'à l'arrêt de bus. Là-bas, une idée lui a frotté l'esprit.

   -Tu as le vertige?, a-t-il demandé du tac au tac à la fille aux longs cheveux.

Cette dernière a haussé les épaules, ne comprenant pas le but de cette question, avant de prononcer le mot non.
Stan a alors proposé à Azalée de venir passer la soirée chez lui, pour parler et pour lui montrer le plus bel endroit des alentours. La jeune fille a tout de suite accepté la proposition du grand blond; ils s'entendaient très bien et étaient assez proches que pour ne pas considérer cette invitation comme quelque chose de galant.

Ils se sont alors arrêtés au cinquième arrêt et ont marché durant une dizaine de minutes, jusqu'à ce que l'immeuble dans lequel vivait Stan se trouvait devant eux.
Le bâtiment était laid, délabré et avait l'air d'avoir vécu la guerre mais le garçon n'en avait pas spécialement honte. Il avait vécu toute sa vie au dernier étage de ce dernier et avait toujours pu jouir du toit qui se trouvait juste au dessus.

Certes, vivre dans un quartier comme celui-là n'est pas toujours une fierté mais avec le temps, il a réussi à l'assumer et à accepter de le montrer aux autres. Il s'en foutait donc des pensées que devait avoir Azalée en montant l'escalier ambiguë du grand immeuble.
De plus, Stan avait assez confiance en la petite blonde alors il l'a faite rentrer à l'intérieur de son appartement. Il était mal rangé mais bien décoré.

Aucun membre de sa petite famille ne s'y trouvait alors il lui a proposé de lui servir un jus d'orange. La jeune fille a accepté mais ne semblait pas à l'aise, comme si elle se sentait oppressée au sein de cette petite maison.

   -Tu ne veux pas aller prendre l'air?, a-t-elle osé demander au blondinet après avoir ingurgité l'entièreté de son verre. Il fait beaucoup trop chaud, ici.

Stan a accepté avec nonchalance, alors que sortir de ce lieu était la chose qu'il attendait le plus. Il détestait faire rentrer qui que ce soit dans son appartement familial, alors lorsque ça se produit, il est toujours pressé de le quitter.

Une fois hors de son lieu de vie, Stan a sommé Azalée de le suivre. Ils ont emprunté l'escalier en fer, qui les a emmenés sur le toit de l'immeuble. Cela était certainement l'endroit le plus beau et le mieux entretenu du haut bâtiment.
La blonde s'est directement exclamée d'une onomatopée d'extase, trouvant probablement la vue troublante et magnifique. Qui aurait cru que l'Allemagne avait de si belles vues dans un quartier aussi pourri que celui-là?

   -J'adore cet endroit, a commencé Stan. Je le trouve merveilleux et il me permet de m'évader, de devenir beaucoup plus serein. C'est un peu comme mon jardin secret, sauf que tous les habitants d'ici y viennent aussi.

   -Pour arroser les plantes, je présume, a intelligemment deviné l'adolescente, en montrant les différents pots de fleurs y trônant.

Après cela, les deux amis ont beaucoup discuté, debout l'un à côté de l'autre, le regard bien devant eux pour ne jamais quitter la vue des yeux.
Azalée était impressionnée et trouvait cet endroit splendide. Elle était presque déçue de n'y avoir été invitée que seulement maintenant alors que Stan était déjà venu à plus de dix de ses fêtes.

Stan, lui, n'était plus vraiment obnubilé par les hauts immeubles, les arbres fleuris et la vue d'ensemble de son quartier; il connaissait chaque recoin du village vu d'en haut à force de toujours se réfugier là-bas.
Stan pensait plutôt à Karl et au fait que habituellement, c'est lui qui se trouve à ses côtés. Ils ne parlent pas beaucoup plus mais l'atmosphère est si différente que ce qu'elle est avec la fêtarde. Karl dégage quelque chose de tellement plus sincère, plus troublant.

Azalée a relancé un sujet de conversation en questionnant son ami quant à ses projets de vacances et d'études futures. Tout le monde s'en foutait de ce genre de choses mais Stan y a répondu. Ça lui permettait de penser à d'autres choses qu'à son meilleur ami.

Pendant leur conversation, les escaliers en fer ont émis un bruit. Aucun d'eux n'y a vraiment fait attention, pensant certainement tous les deux que c'était la vieille femme du troisième étage qui venait hydrater ses orchidées.
Néanmoins, très vite, les deux paires d'yeux se sont tournées vers le bruit. Dorine y était en sueur, comme si elle avait couru un marathon.

   -Stan, descends, il y a quelqu'un pour toi, a-t-elle lancé avant de faire demi-tour.

Suite à cela, Azalée a remercié le jeune homme mais a pris la décision de rentrer chez elle pendant que Stan allait voir ce que cette personne lui voulait.

Et on souriaitNơi câu chuyện tồn tại. Hãy khám phá bây giờ