5. « Maman, s'il te plaît... J'ai mal. »

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Un verre qui se brise.

Une injure.

Le silence.

Jimin ne se levait même plus. Il connaissait la scène par cœur, les moindres détails étaient gravés dans sa tête : son père, debout au milieu de la cuisine, une bouteille à la main, une autre brisée à ses pieds. De multiples marques, allant de l'hématome douteux au suçon répugnant, recouvrent son corps. Ce regard noir qu'il lui lance avant de se précipiter vers lui. Ses mains qui l'agrippent, ses ongles qui le griffent tandis qu'il arrive à lui faire lâcher prise pour retourner dans sa chambre. Chaque soir, la même scène, le même bruit, à une différence près : Jimin avait arrêté de descendre au bout du troisième jour, estimant que son calvaire était bien assez intense la journée pour ne pas en plus en rajouter quand le soleil était couché.

Cela faisait deux semaines que son père lui avait promis de lui pourrir l'existence et deux semaines qu'il tenait cette promesse. Jimin ne comptait plus les coups qu'il avait reçu, les plaies qu'il avait pansées ou encore les repas qu'il avait sautés. Il s'était considérablement affaibli et, bien qu'il fasse tout pour le cacher, Taehyung l'avait questionné. Il avait mentit, encore, mettant sa faiblesse sur le compte d'insomnies dues au stress des examens. Il s'en voulait de lui cacher la vérité mais au fond, il savait que celle-ci ne serait pas d'une grande utilité à son ami.

Sa mère, quand à elle, vivait dans une sorte d'ignorance volontaire. Elle jouait l'aveugle pour que sa conscience ne lui ordonne pas de s'interposer dans un combat perdu d'avance. Il essayait de ne pas lui en vouloir, il tentait de lui trouver des excuses. Il ne voulait pas que le mot « lâche » puisse un jour qualifier sa propre mère. Pourtant, après plusieurs jours de souffrance passés sous silence, la rancœur s'était peu à peu immiscée en lui.

Il était sujet à des insomnies de plus en plus fréquentes. Les rares fois où ses sombres pensées ne l'empêchaient pas de trouver le sommeil, la douleur s'en chargeait. Son torse, son dos et ses jambes étaient recouverts d'horribles ecchymoses et de coupures à moitiés cicatrisées. Certaines nuits, le moindre mouvement lui arrachait une grimace de douleur. C'était le cas cette nuit là. Son père n'y était pas allé de main morte.

Assis sur le comptoir de la cuisine, Jimin termine de manger. En voyant l'heure sur l'horloge murale, il accélère, espérant avoir le temps de s'enfermer dans sa chambre avant l'arrivée de son père. Alors qu'il allait finir, la porte d'entrée s'ouvre avant d'être claquée violemment. Il se fige. C'est trop tard. Il tente de se préparer psychologiquement à la scène qui va suivre mais se sent tout de même pâlir quand celui qui hante ses cauchemars pénètre dans la pièce. Il semble encore plus débraillé que les fois précédentes. Sa cravate est défaite, pendant mollement sur son épaule, sa chemise est hors de son pantalon, les premiers boutons défaits, laissant apercevoir nombre de suçons sur son cou gras et son torse. Son état est pitoyable.

Jimin avise la bouteille presque vide que son père tiens dans la main. « Du scotch. » constata-t-il intérieurement. Il ne tente même pas d'engager la conversation, voulant en finir au plus vite. Il pose sa vaisselle dans l'évier et se tourne vers son paternel. Ce dernier le regarde sans le voir, l'esprit embrumé de haine, de dégout et d'alcool fort. Il s'approche de lui. Jimin ferme les yeux et inspire profondément, tentant de calmer les tremblements qui commencent déjà à secouer son corps. Il attend le coup, mais celui-ci ne vient pas. Étonné, il entrouvre les paupières, hésitant. L'homme le regarde droit dans les yeux et, dans un mouvement brusque, lui agrippe les cheveux. Il tire tellement fort que Jimin sent les larmes lui monter aux yeux et, alors que la douleur devenait insupportable, il le balance contre le comptoir. Les côtes de Jimin frappent violement contre le marbre froid avant qu'il ne s'effondre par terre, le souffle coupé par le choc. Mais son père ne s'arrête pas là. Il s'approche de lui et avise son corps frêle roulé en boule dans une vaine tentative de protection. Il ricane et, sans que Jimin ne puisse faire quoi que ce soit, lui assène un coup de pieds dans le dos, lui arrachant un cri de douleur. Il rit encore avant de se pencher vers lui et d'attraper une fois de plus ses cheveux pour lui relever la tête :

Help me -y.minOù les histoires vivent. Découvrez maintenant