Petit ami et Compagnie - Partie 1 (Terminée)

Chapitre 25 partie 2 : Le violoniste et la pianiste

Mais comment fait-il pour s'y repérer ? Pour moi, elles sont toutes pareilles, rectangulaires et blanches, ou noires pour celles en superposition.

— Tu ne m'as jamais parlé de ta famille, lui fais-je remarquer tandis qu'il positionne mes doigts empotés sur les touches froides et lisses.

La surprise ainsi que la joie s'installent sur mon visage lorsque j'entends ma toute première note de musique sur un piano. C'est beau, pas seulement à entendre, mais à regarder aussi. Plus on s'approche des rectangles blancs, plus on réalise à quel point ces derniers sont spéciaux, du moins pour une non-musicienne.

— Que veux-tu savoir ? demande-t-il d'une voix posée avant de se relever.

Je crois d'abord qu'il va s'éloigner, mais son parfum qui m'enveloppe depuis une petite minute ne me quitte pas. Tout en passant ses bras par-dessus mes épaules, il pose ses mains sur les miennes et commence à guider mes doigts.

Je devrais me concentrer sur ma réponse ou ce qu'il me fait faire, pourtant je n'y arrive pas.

Enivrée par son souffle dans ma nuque, ses conseils qu'il me murmure au creux de mon oreille en frôlant à chaque fois ma peau de ses lèvres, je fixe mes mains désormais en mouvement sans vraiment les regarder. Il me faut de nombreuses secondes avant de réaliser que c'est à moi de poser une question.

Tout en me forçant à sortir de cette bulle dans laquelle il m'a emportée, je me redresse.

— Comment s'appellent tes parents ? Quel âge ont-ils ? Comment sont-ils ? Où est-ce qu'ils habitent ? Des choses du genre. Ah oui, et tu ne m'as jamais dit où tu vivais avant de déménager.

Jales bouge mes mains et je me concentre sur la note que « je » joue. Sans lui, je m'emmêlerais les doigts sans jeu de mots, car chacun d'eux est utilisé et que je me rends compte que cette gestion de la main n'est absolument pas innée chez moi.

Après quelques secondes de professorat supplémentaire, il finit par s'asseoir à mes côtés tandis que j'essaie de répéter les quelques notes qu'il m'a montrées.

— Ma mère s'appelle Rachel, elle a cinquante-six ans. Richard quant à lui, va bientôt fêter ses soixante ans. Il est de nationalité britannique et a rencontré ma mère durant son année d'étude en Amérique.

Il se lève pour aller chercher quelque chose, mais j'essaie de garder le rythme avec ma petite mélodie. Lorsqu'il revient s'asseoir, je remarque qu'il a un violon dans les mains et je m'arrête de jouer, mais il me fait signe de recommencer.

— Place les accords, je m'occupe du reste.

Je m'exécute bien que sa présence à mes côtés me déconcentre. Ce n'est pas un concerto symphonique, mais de canards que je lui offre malheureusement. Contrairement à lui qui sort de ravissantes notes de violon.

— Ils habitent Chester en Pennsylvanie, m'apprend-il après trente petites secondes de jeu. Je vivais à quelques kilomètres, à Philadelphie. Lorsque l'on m'a proposé un poste dans l'Ontario, j'ai hésité. Ça faisait loin, mais on m'a promis que je ne regretterai pas et que ma place était ici.

Je bouge mes doigts et grimace en entendant une nouvelle fausse note. Décidément, je suis incapable de faire un accord correctement. J'ai du mal à me concentrer sur deux choses à la fois bien que d'habitude je sois plutôt douée là-dessus. Mais jouer du piano ne fait pas partie des tâches que j'ai apprises et que je peux faire sans avoir besoin de concentration.

Je décide d'arrêter de jouer et pense à Bianca. Cela doit être dur pour lui d'être si loin de là où ils vivaient. J'imagine que leur appartement devait être quelque chose d'important à ses yeux, c'était le plus gros souvenir qu'il pouvait avoir d'elle. Tout abandonner pour son job, je ne sais pas si j'en serais capable. Et encore, je n'ai pas le passé de Jales !