Le piano monochrome continuait inlassablement la même mélodie sans faute, sans défaut, sans aucune distinction avec une symphonie déjà existante, sans que rien n'empêche le jeune homme de balader ses fins doigts sur les touches noires et blanches. Le rythme s'accentuait, formait une graduation au fur et à mesure des notes qui se trouvait sur le papier à la couleur du café dilué, les signes se faisaient remplacer par d'autres s'ils ne convenaient pas à leur propriétaire. Il regardait méticuleusement chaque ligne, chaque symbole, chaque chose qui pouvait embellir la symphonie. Il cracha un juron à une fausse note, signifiant la défaite vis à vis de son travail qu'il trouvait à présent laborieux. C'est dans un petit conservatoire qu'il se rendait chaque soir, s'endormant la plupart du temps sur les jolies touches de l'instrument. Il se sentait épié, et il avait de quoi le ressentir. Un garçon, un peu plus jeune que lui, venait chaque même soir pour voir son prétendu artiste à l'oeuvre, jusqu'à que son corps s'échoue sur le piano devenu usé après ses mille et une répétition. Son corps commença à fatiguer dû à son dur labeur, malgré tout, il voulait finir sa composition, mais le sommeil l'en empêchait.
Le détenteur des lieux, qui était autre que l'admirateur du plus vieux, regardait le sommeil prendre en grippe l'artiste, ses yeux se closent timidement dans un geste lent, ses mains fines, se recroqueviller sur l'instrument, son corps se mélanger avec l'environnement, les traits de son visage devinrent plus paisible, sa peau comme du sucre, livide était sans plus aucune émotion, mise à part, peut-être une dose de satisfaction qui se discernait lorsque ses paupières s'étaient closent.
Le plus jeune apposa timidement une couverture bleuâtre aux bordures argentées sur les épaules de celui qu'il admirait, il voulait éternellement le voir jouer à ses heures perdues dans un endroit où à part eux deux, personne ne connaissait l'existence, au bord de cette ruelle sombre, l'amour commençait à souffler dans l'esprit de l'un, sans que l'autre ne se rende compte de sa présence.
