Les trois mondes 1 : Healsia

7 ~ Plumes

Le crépuscule pointait déjà le bout de son nez et l'air commençait à se rafraîchir. Je regrettai de n'avoir rien pris d'autre qu'une simple veste fine et frissonnai à l'idée de retrouver mon lit une fois que j'aurais finis ce que j'étais venus faire ici.

J'arrivais enfin dans la rue ; dans sa rue. A quelques maisons de la sienne, j'entrepris d'escalader une façade d'un bâtiment, ici ce serait parfait ! Le quartier était un peu reculé, près des bois, et personne n'y prêterait attention.

Le vent glacial qui soufflait en hauteur me congela presque instantanément une fois arrivé sur le toit. J'en fis pourtant abstraction et continua de m'accrocher aux ardoises pour me retrouver au sommet. Le plus difficile avec ce genre de toitures, c'est qu'ils étaient obliques, contrairement aux immeubles du centre-ville. L'ascension en était plus pénible mais une fois en haut, il était plus agréable de s'y assoir. Enfin, ça, ce n'était que mon avis !

Essayant de garder mon équilibre, je me plaçai de façon stratégique. Je calculai rapidement l'angle de vue, la distance ainsi que le temps. A la seconde où je l'avais prévu, je retirai ma veste. Sans même jeter de coup d'œil à sa fenêtre, je savais qu'il m'avait vu. C'était donc le moment d'agir.

Je fermai lentement les yeux en me concentrant sur l'air environnent. Rapidement, je me focalisai sur mon dos et de petites déchargent filèrent sur ma peau. La conscience d'une nouvelle partie de mon corps émergea ensuite dans mon esprit et deux grandes ailes de plumes noires jaillirent de mon dos. Je les sentais comme je sens mes jambes et mes bras, comme un membre à part entière. Je les faisais exister que par ma propre volonté. Ces ailes faisaient parties de moi depuis toujours et ceci dans toutes les dimensions.

Une fois entièrement déployées, je les secouai légèrement pour les étirer puis les replia avant de m'assoir sur le toit. Il ne me restait plus qu'à patienter désormais. Lorsque, vingt minutes plus tard, je vis sa tête dépasser du toit, un sourire satisfait s'afficha sur mon visage. C'est avec un peu de peine et visiblement fatigué qu'il se hissa jusqu'à moi.

- Ça te ressemble bien ! me lança-t-il.

- De quoi tu parles ?

- Te poster sur un toit comme ça, face à ma fenêtre. Que tu viennes directement me voir m'aurait étonné c'est sur.

- J'avoue, répondis-je en riant. J'aime appâter les gens que veux-tu.

J'essayai d'être assez agréable pour une fois mais son humeur laissait clairement percevoir que ça ne servait à rien. Visiblement, il était encore vexé. C'est donc avec un air renfrogné qu'il me dévisagea des pieds à la tête.

- Des ailes... c'est nouveau ça ?

- Un détail que j'avais omis de te faire part, tout simplement, répondis-je d'un air innocent. Mais pour le petit exercice que j'ai décidé de te faire faire ce soir, j'en avais besoin.

- En plus de cette épreuve d'escalade je présume.

Sans rien n'ajouter, je me levai et tendis ma main devant lui. Une petite sphère translucide se matérialisa au creux de ma main. Elle était légèrement bleutée et parsemée de veinures de la même teinte, ondulant lentement à la surface de l'objet. Owl considéra la sphère quelques instants avant de relever les yeux vers moi d'un air perplexe.

- Heu... OK... fit-il en levant un sourcil.

- Prends là, imbécile !

Il s'exécuta, non sans hésitation, et analysa la sphère sous toutes les coutures.