Smith était toujours brûlant, comme une sorte d'énergie, qui ne s'épuise jamais.

Sans m'en rendre compte, je me relève, en m'asseyant. Puis je saisi mon portable d'une main, pour répondre à mon père à propos de son long message. Bien sûr que j'ai besoin de le voir, moi aussi, mais j'ai peur de la réaction d'Alban si je lui apprends que je me suis servie de mon portable. J'ai conscience que les relations sont tendues, mais un peu plus sereines en même temps, entre nous. Sauf que ça ne m'empêche pas de ressentir une forme d'angoisse s'emparer de mon corps.

Je sais désormais pourquoi il est comme ça. Ce passé est trop brutal et horrible pour un enfant, mais il ne pardonne pas tout ce qu'il a pu faire. Sauf qu'une partie de moi, - celle qui veut le sauver avant de disparaître -, se renforce au fond de mon corps. Je peux la sentir, même la toucher.

Les yeux clos, je respire un bon coup. Puis, je cesse tout mouvement, lorsque j'entends au loin des pas, qui s'arrêtent tout à coup. Mes doigts tremblent à l'intérieur de mes paumes.

- Qu'est-ce que tu fais, Lucie ? Pourquoi as-tu ton portable dans tes mains ? me demande subitement Alban, d'une voix rude.

J'ouvre les yeux, pour le voir seulement vêtu d'un bas de pyjama gris, et donc torse nu ainsi que pieds nus. Son torse si bien sculpté s'offre à ma vue, mais je ne ressens plus cette petite étincelle capable de me couper le souffle. Je crois l'avoir ressenti avec Smith. Vaguement.

Mes souvenirs sont flous.

- Tu as pleuré ? il fronce les sourcils.

Dis-lui la vérité, Lucie.

Dis-lui la vérité.

Rien que la vérité.

La vérité.

J'inspire tout l'air que je peux, pour me donner du courage. Pour espérer que le mauvais côté d'Alban ne ressorte pas maintenant. Je pense que je serais incapable de lui tenir tête, après le message de mon père. Je n'ai même pas eu le temps de pianoter un mot sur mon écran, à cause du regard inquiet et dur à la fois, qu'ose me lancer Alban.

- Mon père veut me voir, j'annonce de but en blanc.

Je baisse les yeux sur l'écran de mon téléphone qui s'est éteint depuis quelques secondes. Brutalement, j'aperçois Alban faire quelques pas vers moi. Comme un réflexe, je me recule, pour lui échapper. Depuis que les paroles de mon père se sont inscrites dans mon crâne, toutes mes armures sont à plat.

Alban s'accroupit devant moi, le visage calme, et les traits tordus par l'inquiétude. Il hésite pendant quelques secondes à poser sa main sur mon bras, me fouillant avec ses yeux. Mais il se rétracte, gardant ses gestes pour lui, en se grattant immédiatement le bras, peut-être de façon nerveuse. 

- Quand est-ce qu'il aimerait te voir ? lance t-il, d'une voix calme.

Trop calme même.

Je relève la tête, pour voir son regard sincère faire écho avec le mien, remplit de larmes, qui aimeraient sortir. Je déglutis difficilement, avant de fixer un point derrière Alban. Je n'ose pas le regarder dans les yeux, en pensant à ce que je m'apprêtais vraiment à faire sur mon portable, avant même que le message de mon père et celui de Smith, m'interpellent.

- Je ne sais pas, n'importe quand, je réponds, un peu perdue.

Lentement, Alban pose ses mains pleines sur mes joues, m'encadrant le visage, me forçant à le regarder dans les yeux. Un sourire fin s'esquisse sur son visage rapidement, avant de s'écraser sur le sol, sans effort.

FIGHT FOR US 2Where stories live. Discover now