IV - Il faut souffrir pour être belle

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Hôtel particulier Francart
Paris, ?????

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Me voilà maintenant seule avec Roseline dans la chambre. J'eus à peine le temps de me retourner qu'elle avait déjà traversé la pièce pour aller dans le cabinet de toilette et en ressortir avec une robe de chambre. Mon palpitant battait encore bien fort quand elle la posa sur mes épaules. Elle repartit dans l'autre sens pour disparaitre dans le couloir menant vers la chambre d'enfant. J'avais l'impression de voir le lapin blanc dans Alice au pays des merveilles en train de courir après le temps. Elle réapparut avec deux magnifiques robes qu'elle allongea sur le lit avant de s'approcher de moi.

- Le secrétaire de « Monsieur » est venu m'annoncer que « Monsieur » rentrerait avec Monsieur son frère pour dix-huit heures trente. Il ne nous reste plus beaucoup de temps pour nous préparer à diner avec Monsieur et « Monsieur ».

Je n'arrivai pas à contenir mon sourire bien longtemps. Elle m'amusait. La voir s'affoler de la sorte donnait l'impression que sa vie se jouait sur cette soirée. Sur le ton de la plaisanterie, je ne pus m'empêcher de la taquiner.

- Que de Monsieur dans une même phrase Roseline ... Vous n'auriez pas oublié un Monsieur par hasard ?

- Non, je vous assure Madame, il n'y aura que « Monsieur » et Monsieur son frère. Enfin c'est ce que m'a dit Monsieur son secrétaire, Madame.

A sa réponse, je compris que Roseline ne connaissait pas le second degré. J'arrêtai tout de suite mes blagues et lui répondis en arborant mon sourire le plus rassurant du monde.

- Je vous crois Roseline, je vous crois.

Ses épaules se détendirent une fraction de seconde avant de reprendre un air sérieux. J'eus le pressentiment qu'elle allait me faire un reproche. Mais lequel ?

- Madame, vous auriez dû me sonner si vous aviez besoin de quelque chose. Vous auriez pu attraper la mort habillée ainsi.

N'importe quoi ! C'était évident qu'en chemise de nuit dans une maison chauffée, il y avait des risques. Quelle drôle d'idée, j'avais eue ... ! Mais une fois de plus je préférais la ménager et acquiesça avec la docilité d'un agneau.

- Euh ... Oui, Roseline.

Même si au fond de moi, je pensais que le chemin que nous avions pris au retour était plus propice à attraper la mort, comme elle me l'avait si bien fait remarquer, je m'abstins : c'était quand même elle qui m'avait fait passer par l'extérieur alors que j'étais pieds nus. Enfin bref, passons !

- Madame ! Et si quelqu'un vous avait vu dans cette tenue, qu'aurait-il pensé de moi ?

Nous y revoilà, pourquoi quelqu'un aurait-il médit sur le fait que je sois en chemise de nuit à cinq heures de l'après-midi chez moi. Encore une question à laquelle je ne pouvais répondre. A mon époque j'aurais ri, mais j'étais loin d'être en position de pouvoir le faire à cet instant. A nouveau je rangeai mes convictions au placard pour lui répondre.

- Excusez-moi Roseline, j'aurai dû effectivement mettre ma robe de chambre.

Satisfaite de ma réponse elle se tourna et s'affaira à sortir mes accessoires et notamment cet objet de torture afin de m'habiller. Un frisson me parcourut le dos en regardant tous ce qu'elle posait sur le lit. Puis elle s'arrêta nette et me questionna.

- Quelle robe pour le dîner. La bleue ou la rouge ?

J'étais sur le point d'apprendre une deuxième chose sur ma femme de chambre, elle faisait les questions et les réponses en même temps. Je n'eus donc pas le temps d'esquisser un semblant d'avis qu'elle m'assura.

Le pendule de Huygens [Tome 1] : La synchronisation des balanciersWhere stories live. Discover now