« Donc, nous allons devoir passer encore une semaine dans un train ? demanda Célia qui appréhendait très mal ce nouveau trajet en transport.

— Alexander nous a déjà pris les billets. Tu vas voir, il parait que c'est très agréable comme voyage. »

Célia n'était pas convaincue. Non pas qu'elle n'ait jamais pris le train, la jeune femme faisait souvent des déplacements à travers l'Angleterre pour les affaires, cependant, jamais le trajet ne durait pas plus de d'un jour et demi et c'était déjà bien trop long pour elle.

D'ailleurs, c'était assez étrange pour une femme d'affaire qui travaillait dans le négoce du thé de n'être jamais allée plus loin que la ville de Dover. Il faut pourtant comprendre que Célia était très jeune et n'avait pas encore eu le temps ni l'occasion de voyager plus loin. De plus, la plupart de ses accords avec les clients et fournisseurs se faisaient à Londres même. C'était, en quelque sorte, l'avantage de vivre dans la capitale, car Célia n'était pas patiente et les transports représentaient, en soi, une perte de temps. Enfin, il fallait bien que la jeune femme commence à se déplacer un peu plus loin que l'Angleterre, elle aspirait à ouvrir une filiale en Chine et serait donc obligée de voyager plusieurs fois par an le moment venu, du moins dans les premiers mois pour rechercher des cultivateurs qui passeraient un contrat avec l'entreprise. Pourtant, c'était décidé, elle ne prendrait plus le bateau, car ce transport fut de loin la pire chose qu'elle ait eu à endurer.

Les affaires de Mary étaient enfin rangées. Après plusieurs minutes, les deux femmes quittèrent enfin la pièce. Célia jeta un dernier coup d'œil sur la magnifique suite dans laquelle elle et sa famille avaient fait le trajet. Spacieuse et très bien décorée, elle était digne des plus grands hôtels londoniens. Auparavant, elle avait déjà voyagé en première classe, mais jamais dans de telles conditions de confort et de luxe.

« La famille Butler est vraiment très riche », se dit-elle.

Pendant qu'elle contemplait une dernière fois ce lieu maudit dont elle ne vit la véritable beauté qu'une fois le bateau accosté, les employés du paquebot s'occupèrent des nombreuses malles de Mary. Puis, les deux sœurs se dirigèrent vers le pont principal. Le père de Célia, Harold, et Alexander les attendaient.

« Qu'est ce qui vous a pris autant de temps ? demanda le vieil homme un peu bougon.

— Mary rangeait ses affaires, papa, répondit Célia.

— Le train part dans deux heures et nous ne sommes pas encore à la gare. Tu n'aurais pas dû prendre autant de vêtements, Mary. Dépêchez-vous !

— Détendez-vous, Mister Campbell. Nous y seront à temps, dit le fiancé sans affiché la moindre expression sur son visage. Si cela permet à Mary d'être aussi jolie alors elle peut prendre autant de vêtements qu'elle désire. »

Mary se mit à rougir, flattée par sa remarque. Célia quant à elle, leva les yeux au ciel. Tout ce débordement de bons sentiments lui filait la nausée. Comme elle ne fut pas discrète, Alexander remarqua son mépris.

« Vous avez peut-être quelque chose à ajouter, Miss Campbell ? demanda le bel homme à la sœur de sa fiancée.

— Pas du tout Sir Alexander. Je suis juste heureuse de voir combien vous vous occupez des affaires de Mary. Vous êtes tellement attentionné. »

Remarquant son sarcasme que Mary ne vit pas, Harold décida de changer de sujet.

« La voiture est arrivée, allons-y maintenant. »

Suivit de près par de jeunes indiens à la peau sombre, coiffés de turbans colorés qui transportaient leurs bagages, ils s'approchèrent vers le fiacre tandis que les employés hissèrent les lourdes malles sur le toit.

Tea & Coffee : Le Crime du Darjeeling-Express (livre I)Where stories live. Discover now