I need a hero

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Une nuit de plus, les yeux grands ouverts, les bras croisés derrière la nuque, à réfléchir dans le noir. Encore une nuit qui m'abîme, qui me tire vers le fond. Le noir me scrute et la culpabilité me ronge. Un visage surgit, je le chasse en cachant mes yeux de mes mains. Mais on ne peut faire disparaitre les morts. 

Je suis si proche et si loin de moi-même. Je ne suis qu'un souffle dans le silence. Comment peuvent-ils dormir ? Dorment-ils ?

Je suis juste un homme. Eux aussi, pourtant rien ne semble les toucher, rien ne semble les atteindre.

Ils ont suspendu leurs âmes.

Je ne peux pas, je ne sais pas mettre de côté mon ressenti, mes pensées, les horreurs comme eux. Je ne sais rien faire comme eux.

Alors que j'essaye encore une fois de fermer les yeux, un autre visage vient rire de moi. C'est un vieil homme, celui de la maison. Celle que moi et ma division nous avons brulé.

Je me souviens des hautes flammes, si belles, qui ondulaient dans les hurlements du vieux, de sa femme et de leurs enfants.

Et maintenant il rit, parce que lui, lui il a trouvé le sommeil, pendant que mes démons hurlent dans ma tête et font saigner mes souvenirs. Je vois ses dents jaunes, son sourire, ses yeux qui pétillaient à l'idée de rouler des soldats. Il disait qu'il ne cachait pas d'arme. Jamais mentir. Ne jamais cacher la vérité en temps de guerre.

Le lieutenant avait hurlé : " Brulez moi ce ramassis de merde ! " et nous nous étions exécutés, courbant l'échine.

"Je n'avais pas le choix ". Se répéter ce genre de litanie ne déculpabilise pas.

Et puis les discours " C'est juste une autre guerre ". Et c'est juste une autre famille déchirée. Un autre tué. Mais personne ne pense comme moi, personne ne m'entend. Ou personne ne veut m'entendre. Se battre pour la paix, c'est le plus grand paradoxe qui puisse exister. Personne ne se bat pour les faibles.

La haine flotte dans les dortoirs, nous prend à la gorge et traine dans les couloirs. On la respire à plein nez, les insultes pleuvent.

Je donnerais tout pour qu'on me sauve de cette haine qui m'entraine, qui m'enlace dans ses bras de terreur.

Parfois j'aimerais juste, juste faire un pas de plus. Celui qui me sépare de ce monde où, même si tu gagnes la guerre, tu as perdu tout le reste.

J'ai juste besoin de quelqu'un. J'aimerais redevenir un enfant, me blottir dans les bras de mon père, qui serait à nouveau mon héros l'espace d'un instant. Pouvoir pleurer sans me cacher.

Juste besoin d'un héros pour sauver ma pauvre vie. 

The songs tell storiesWhere stories live. Discover now