Dix sinon rien !

1 - Chrysten

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Fragma - Memory

Boston

Massachusetts

Chrysten

Oh non ! Bélina de l'émission « Saluuut Boston » s'égosille déjà à la radio ! Je refuse de me lever, de mettre un pied l'un devant l'autre ou même d'ouvrir un œil. J'ai un putain de mal de crâne à vous arracher la tignasse !

« — Saluuut, Boston ! Comment allez-vous, les loulous ? Ce matin, le soleil est de retour et les oiseaux chantent dans l'atmosphère féerique des fêtes de fin d'année. OMG ! Du studio, j'aperçois un jeune couple qui se roule une pelle phénoménale ! Ahahahahah ! Et du côté de chez vous ? Votre amoureux, vous embrasse-t-il avant de quitter le lit ? C'est parti avec le premier auditeur de cette belle matinée ensoleillée ! »

Je hausse lentement la tête pour vérifier l'heure à mon réveil, dépitée à l'idée d'aller travailler. Ma nuit a été courte après cette soirée arrosée entre filles. Avec toute cette tequila ingurgitée et inhalée, j'ai la sensation d'être passée sous un camion de marchandises. Ça m'apprendra à vouloir jouer les guerrières jusqu'à trois heures du matin !

Allez, Chrysten !

Debout !

Je soulève la couette et entends le cri strident de mon chat, qui s'agrippe comme il peut au rebord du lit. Je m'assois et attrape un cachet sur ma table de chevet que j'avale avec un grand verre d'eau.

Quoi ?

Vous n'avez pas d'aspirine ou de bouteille sur votre table de nuit ? Comment ça, j'avais déjà pris le coup ? Ce sont des éléments essentiels à ma survie, tout comme certains ont un stick à lèvres ou des préservatifs. Non, oubliez cette dernière proposition. Évidemment que j'ai des capotes dans mon tiroir... Mais elles sont certainement périmées.

En mode zombie, je m'étire de tout mon long et traverse la pièce en remettant de l'ordre dans ma crinière. Mac continue de feuler à la mort, mais je suis bien trop fatiguée pour lui porter secours. Abandonné à son triste sort, il finit par s'effondrer sur le sol avant de me rejoindre dans la salle de bains attenante à ma chambre.

Mac est mon chat...

Un chartreux blanc comme neige et des yeux bleus à faire tomber toutes les petites chattes du quartier. Certes, il a déjà cinq ans et n'est plus un bébé, mais c'est le mien !

Un soir, alors que je sortais mes poubelles, je l'ai trouvé en bas de mon immeuble. Âgé de quelques semaines, il était là, livré à lui-même dans l'obscurité effrayante de la nuit. Je n'ai pu me résoudre à le laisser et l'ai immédiatement adopté. C'est un petit être aimant et affectueux, empli de sensibilité et de tendresse. Le hic est qu'il n'y a que moi qui lui connais ces qualités-là, vu qu'il est plutôt grincheux et sauvage lorsque quelqu'un passe le seuil de notre appartement. Le vétérinaire met cela sur le compte de sa jalousie obsessionnelle et maladive. Selon son diagnostic, il ne supporte pas de me partager avec qui que ce soit. Moi, je trouve ça plutôt touchant, mais mes amies et ma famille l'ont pris en grippe.

Dans la salle de bains, je grimpe sur la balance pour ma prise de poids journalière. Rien de tel pour nous mettre d'humeur joviale de bon matin... ou pas. Pourtant, mon instinct me somme de ne pas commettre une pareille erreur, mais mon entêtement légendaire reste sourd à son avertissement. Il faut dire que les tapas d'hier soir ont certainement déjà posé bagage sur chacun de mes cuissots.

Tout juste avant de poser un pied sur cette machine de guerre, je me frappe le front en secouant la tête.

— Mais non, suis-je bête !