La Fugue (2016)

> Chapitre X

« -Le lundi qui suivait, j'ai aperçu une tête nouvelle qui passait les grilles du lycée. C'était un garçon, il devait avoir environ deux ans de moins que moi. Ses cheveux roux étaient attachés en une queue de cheval. Il avait de longs cils pour entourer ses yeux bleus. Sa mâchoire était carrée et ses épaules larges. Il était vraiment musclé. Avec ses colliers à clous, sa veste en cuir noir et son débardeur kaki, il faisait peur à voir. Son regard s'est ensuite posé sur moi, il m'a fait un sourire arrogant, puis a continué son chemin.

-Pas besoin d'un punk, en plus de la gothique !, rigola mon amie.

J'ai haussé les épaules, puis suis allé à mon casier. Je l'ai aperçu discuter avec quelqu'un à la pause, mais je n'arrivais pas à voir qui. Son dos se secouait légèrement, il devait rire. Je me suis alors dit que malgré ma curiosité, il était inutile que je fasse attention à lui. Je m'apprêtais à détourner le regard, quand il s'est décalé légèrement, me laissant apercevoir avec qui il se tenait.

Je l'ai vu, elle.

Une folie pure me prit, j'avais une soudaine envie d'aller montrer que c'était mon amie et pas la sienne. Je ne comprenais pas pourquoi elle le laissait lui parler en présence d'autres personnes, alors qu'elle ne m'a jamais laissé faire. Qu'avait-il de spécial ? J'imaginais plusieurs moyens de tortures à exercer sur lui quand mes amis m'ont fait revenir à moi, à l'aide d'un coup de coude bien placé. J'ai serré la mâchoire et ai pris sur moi pour ne faire aucune remarque à Maelys.

Le soir venu, j'avais reçu un message de sa part, elle me demandait de venir au parc. J'étais encore relativement énervé et voulais lui dire que je ne comptais pas venir. J'ai tout de même accepté, sa présence me manquait trop. Ma faiblesse face à elle m'agaçait, je ne comprenais pas ce qu'il m'arrivait. »

-Attendez, je me permets de vous stopper, il faut que je pose une question à mon fils. Depuis quand sors-tu autant, sans me tenir au courant ?, questionne la mère.

-Maman, je ne crois pas que c'est le moment approprié...

-Je m'en fiche, réponds !

Axel est agacé, il se retient pour ne pas crier face au policier.

-Tu travailles tout le temps de nuit, à l'hôpital. Ce n'est même pas en douce puisque tu n'es jamais présente !

Miriame se tait, son fils a raison. Elle passe la plupart de son temps à l'hôpital et ne reste pas souvent à ses côtés.

-Je peux reprendre ?

Elle acquiesce  et Girrot se permet d'émettre un faible rire qui lui vaut un regard noir.  

« -Arrivé, je l'ai vu. Elle était plantée là, à regarder les gouttes de pluie tomber sur l'eau du lac.

-Qu'est-ce qu'il y a, pourquoi m'as-tu demandé de venir ?

Surprise par ma question et le ton employé, elle ouvrit la bouche mais aucun son n'en sortit. Elle se ressaisit et fronça les sourcils en levant les yeux au ciel.

-J'attends.

-Depuis combien de temps je ne peux plus te demander de me rejoindre au parc ?

-Peut-être t'aurais dû proposer à ton cher punk. Lui au moins, il a l'air de te faire rire., ai-je grogné.

-Ah, c'est ça ?

Un sourire amusé s'est installé sur ses lèvres. Elle était magnifique, et avait l'air joyeuse. Cela me fit ressentir un sentiment de joie infinie quelques secondes avant que je secoue la tête pour remettre mes idées en place.

-Quoi ?

-Tu es jaloux, Axel ?

-Hein ? Non, mais n'importe quoi ! Comment pourrais-je être jaloux d'un punk ?

Maelys fit un rire insultant en serrant les poings, elle recula d'un pas. Je savais que je l'avais énervée, mais je n'avais aucun moyen de revenir en arrière. J'allais sûrement m'en vouloir en rentrant.

-Moi, j'suis bien la gothique. Pourtant tu n'avais pas l'air de m'en tenir rigueur !

J'ai croisé les bras mais n'ai pas répondu. Elle se doutait probablement que ce n'était pas ce que je voulais dire mais elle a préféré continuer d'hausser le ton.  

-Tu m'énerves, je n'aurais même pas dû t'envoyer ce message !

-Et moi, je n'aurais pas dû venir !

Elle s'est retournée, puis est sortie du parc sans un regard. »