> Chapitre I

2.8K 377 78
                                    

Il réfléchit, longuement. Leur histoire est complexe, tellement indéfinissable que les mots lui manquaient.

« -Nous ne nous sommes pas vraiment rencontrés, nous nous sommes simplement aperçus. Je connaissais son prénom, avant de lui parler pour la première fois. En réalité, je n'ai fait que l'observer pendant environ un mois, sans un mot. Beaucoup de gens racontaient qu'elle était bizarre, mais je la trouvais tout à fait normale... Enfin, elle avait cette habitude de s'habiller principalement de noir, de rigoler à voix haute et mastiquer un chewing-gum à chaque pause. », un haussement d'épaules de la part de l'adolescent...

« -Je ne la trouvais pas spécialement belle, mais elle ne voulait pas qu'on le pense, en réalité elle s'en fichait particulièrement, je crois. Cette fille, c'était pas un copier/coller des autres. Je l'ai observé tous les jours, c'est comme ça que j'ai appris à la connaître. Elle me fascine. Tout chez elle, de ses cheveux bruns décoiffés jusqu'à ses vieilles converses noires. »

La mère du jeune homme, Miriame, le regarde des étoiles pleins les yeux, telle une enfant de cinq ans qui écoute une histoire.

« -Elle est unique. »

Les mots lui viennent naturellement, il a l'air de s'expliquer à lui-même sa propre histoire plutôt qu'à sa mère et un policier. Ce qui est peut-être le cas, au fond.

« -Quelques fois, quand l'envie lui prenait, elle me faisait un sourire rayonnant de vie. Je lui répondais avec le même, mais elle ne savait sûrement pas que ce petit geste illuminait ma journée. Ses amis, eux, ne me remarquaient pas, mais ce n'était pas grave. Tout ce que je voulais était qu'elle me voit, qu'elle me regarde, juste elle. Le week-end, je me surprenais à y penser, voir même à attendre impatiemment le lundi. Puis, ce fameux lundi, la première fois où je lui ai parlé. Ce n'était que quelques mots, même pas une conversation. Rien de très intéressant, en soi. Je lui suis juste rentré dedans, alors j'ai bredouillé un "Excuse-moi.", elle m'a fait un hochement de tête avant de continuer son chemin. Elle avait un parfum, un putain de parfum. Je ne saurais le décrire, mais il était magique. »

Après avoir passé rapidement sa main dans ses cheveux bruns, l'adolescent fronce les sourcils en décidant de se contrôler. Un commissariat n'est pas encore un journal intime.

« -Puis, environ une semaine plus tard, elle est passée à côté de moi. J'avais remarqué qu'elle semblait gênée, mais je n'ai rien dit. Elle s'est assise pas loin, avec ses amis. Ils pouffaient doucement en me regardant, les joues de Maelys étaient rouges. Tout le monde se demandait ce qu'il se passait, même mes amis. Ce jour-là, elle ne m'a pas souri, elle évitait mon regard. »

-Avait-elle l'air mal, triste ? Demande Girrot.
-Non, juste gênée.
-Tu peux continuer.

« -Le lendemain, quand je suis arrivé en cours, tous les gens de première me regardaient, ce qui était particulièrement étonnant. Quand je suis allé voir mes amis, ils n'ont même pas pris le temps de me saluer avant de me dire toutes ces paroles.

-Mec, tu sais quoi ?
-Non ?
-Tu vois la meuf bizarre, la brune ?

Je serrais les poings de toutes mes forces, pour ne pas le frapper.

-Oui, qu'est-ce qu'il y a ?
-Tout le monde dit qu'elle te trouve mignon.
-Parce que je ne le suis pas ?

Je me suis pris un léger coup de poing dans l'épaule. Apparemment, c'était un problème sérieux, même si cela ne me dérangeait pas vraiment.

-Mais tu comprends pas, mec. Ça craint.
-Pourquoi ?
-Elle est timbrée, en plus d'être moche.

Tous les regards se sont posés sur moi, ils attendaient que j'aille dans leur sens, c'est ce que j'ai fait. J'avais pas le choix, enfin je croyais. »

Les yeux du bouclé se ternissent, il regrettait.

« -Pendant la journée, je m'attendais à la voir, mais elle était absente. Ses amis n'avaient aucune nouvelle non plus, je l'avais su en épiant leur conversation. »

La Fugue (2016)Where stories live. Discover now