STUPEUR

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-Pauvre type va !
Avril balança son vert d'eau à l'autre bout de la pièce, il passa par la fenêtre ouverte. Mais c'était le cadet de ses soucis, ce crétin venait de lui racrocher au nez, en trois mois de relation, jamais il ne lui avait fait un coup pareil. Pour qui se prenait t'il à la fin ?
Si le telephone n'avait pas sonné à cet instant précis, elle ne se serait pas gênée pour debarquer chez lui et lui lançer ses quatres véritées en pleine figures. Elle décrocha le telephone sans entrain.
A l'autre bout du fil, son patron de sa voix coléreuse lui indiqua qu'elle n'avait pas moins de dix minutes de retard.
Las, elle racrocha et se prépara à la hate. Avril se considerait comme plutot chanceuse dans la vie. Elle avait la chance de vivre dans un appartement de la cité universitaire, certe un peu spartiate, mais  non loin du centre. Pour une étudiante c'était un grand luxe. Malgrés la bourse d'étudiante à laquelle elle avait droit, boucler les fins de mois s'avérait parfois difficile.
Elle fut obligée de se trouver un emploi. Être serveuse dans un café du centre, ce n'était pas de tout repos, ni même très bien payé. Il était parfois difficile de mener de front les études et son job. La fatigue l'a gagnait souvent.
À cet instant, Avril n'avait qu'une envie : ce mettre en pyjama, devant l'intégral de Docteur House avec un genereux pot de glace à la vanille. Malheureusement, on ne fait pas toujours ce qu'on veut dans la vie.
Elle éteignit la télévision, ou un présentateur épiloguait sur les inhabituelles chaleures qui faisait transpirer Londres en cette fin de mois de Septembre. Avril claqua la porte de son appartement, le verrouilla et devalla les trois étages d'escaliers qui la séparait de la rue.
Elle marcha d'un pas rapide sur le large trottoir baigné de soleil.

Newington était un quartier de banlieu comme il en existait des centaines autour de Londres. Des alignements de maisons jumelles et d'immeubles en briques rouges, le tout entrecoupés de larges avenues bruillantes et de voies ferrées.
Au coin de la rue, Avril rentra dans la gare de quartier, essoufflée, la chaleur l'étourdissait. Le train orange entra en gare quelques minutes plus tard. C'était une magnifique journée de Septembre comme il y en avait peu dans le sud de l'Angleterre en cette saison. Le soleil brillait ardement dans le ciel d'azur et une brise légere carressa le visage d'Avril. Elle se surpris même à penser, soudainemant, que tout n'était pas si noir dans la vie.

Avril appréciait particulierement les voyages en train. Observer la ville au dehors, les gens qui s'activent dans les rues et la vision du centre et des buildings de la City qui se rapprochaient à chaque gare.
-Tu fais vraiment pitier Ezra !
Avril sortit de ses pensés et se rendit compte que deux jeunes gens s'étaient assis à coté d'elle l'un en face de l'autre.
- Quoi encore ?! Repondit avec mépris le jeune homme.
- Tu vas devenir une vrai baleine à force de manger autant. Dit elle en pointant du doigt le paquet de chips paprica que le garçon avait dans les mains.
-Amy, occupe toi de tes SMS et fou moi la paix tu veux ?
La jeune fille lui lança un regard noir et s'exécuta, frappant avec frénésit sur son smartphone. Elle reprit néanmoins :
-Ils font chiers aussi les vieux, nous demander d'aller acheter des trucs maintenant ! J'avais des choses à faire moi cet après midi putain !

-Ah oui et quoi par exemple ?
-Rien qui ne te concerne.
Ils se fixaient maintenant du regard, on aurait dit qu'ils allaient se tuer. Tels deux animaux enragés.
La fille semblait avoir un peu près seize ans, les cheveux longs et bruns, le garçon semblait du même age, les cheveux court.

Soudain une équipe de policiers municipales debarqua dans le wagon. Ils se faufilaient entre les sieges et semblaient soucieux. Une policiere se trébucha dans le sac du garçon.
Elle se confondit en excuse.
-Rangez ça, nous sommes à la recherche de deux hommes, des pickpockets et des dealers, faites attention à vous. On y retourne ! Dit elle en s'adressant à ses accolites.
Avril, d'un geste machinal, serra son sac à main contre elle. Decidement, le danger est vraiment partout dans ce monde.

Le train arriva rapidement à la gare de King's cross-St Pancras. Avril descendit du train et fut troublée par un detail. Il y avait, normalement toujours un monde fou dans le grand hall de la gare et sur les quais.
Mais aujourd'hui, à la surprise générale, il n y avait personne. Les quai étaient vides, et dans le grand hall régnait un silence pesant.
Avril se mit à marcher d'un pas rapide, quelque chose ne tournait pas rond ce matin. Comme si un événement exceptionnel s'apprétait à tout bouleverser, ou peut être était-ce deja fait.
Derriere elle, les passagers de son train avait cette même expression dérangée, étrange.

Avril s'engouffra, comme à son habitude dans les profondeurs de la gare, et attendit patiemment son métro, comme elle le faisait chaque matin.
Il régnait dans le métro une odeur spécial, elle flottait dans l'air des l'entrée. Ce mélange caractéristique d'urine et de détergent, et de fer brulé.
Avril comprit au bout de dix interminables minutes, qu'aucun train ne viendrait. Décontennancée, elle se résigna à terminer son trajet à pied.

Un petit attrouppement s'était formé devant la sortie principale de la gare. Décidement quelque chose d'anormale ce passait.
Une cinquantaine de personnes se tenaient presques sans bruit, le regard plein d'angoisse et d'incompréhension. Certains chuchotaient entre eux mais la plupart restaient silencieux, tétanisés, comme pétrifiés par ce qu'ils observaient à l'exterieur, par la porte.
Avril se faufila comme elle put à travers la foule, jusqu'à atteindre les portes automatiques. Elle fut bouche bée par ce qu'elle vit au dehors, elle en lacha son sac à main, il tomba au sol et sembla faire un bruit apocalyptique dans le silence ambiant.

À cette instant, la vie d'Avril, et celles de 89 autres personnes venait de changer à jamais.

DisparusWhere stories live. Discover now