Angel et Marie - T. 1 - Prix du meilleur roman indé 2017, catégorie romance

Chapitre 13 (1ère partie) : Promesse

Ils étaient de retour, après la fête, dans la chambre de Marie. Angel semblait soucieux, il marchait de long en large, l'air absorbé dans ses pensées. Marie, allongée sur son lit, patientait. Elle supposait qu'il avait besoin de temps pour se calmer.

- Angel, calme-toi. Je comprends que Sophie t'ait blessé, mais elle était ivre et jalouse. Il vaut mieux ne plus y penser, finit-elle par lui dire.

- Non, ce n'est pas ça. Je suis calme mais je suis inquiet, lui répondit-il.

- Inquiet pour quoi ? demanda-t-elle.

- Combien y a-t-il encore de soirées d'anniversaire prévues dans les semaines à venir ? s'enquit-il sans répondre à la question de Marie.

- Il y a celle de Benjamin, et peut-être la mienne si j'arrive à convaincre mes parents de me laisser l'appartement.

- Nous ne pourrons pas aller à la soirée de Benjamin et il vaut mieux que tu n'organises pas de soirée pour ton anniversaire.

- Mais pourquoi ? A cause de Sophie ??

- Oui à cause de Sophie.

- Mais je ne suis pas d'accord ! Il n'est pas question de laisser Sophie me gâcher ces fêtes et puis, d'ici là, elle se sera sans doute calmée. Ce n'est pas si grave, elle a juste pété un plomb !

- Non, Marie, c'est grave. Plus grave que tu ne l'imagines, répliqua-t-il en venant s'assoir au bord du lit.

Angel affichait une mine sinistre. Il avait l'air d'avoir pris l'incident avec Sophie très au sérieux. Certes la conduite de cette dernière était inqualifiable. Elle avait publiquement insulté Angel. Mais aucun participant à la fête n'avait accordé le moindre crédit à ces allégations injurieuses. Tous sous le charme d'Angel, ils avaient regardé Sophie comme une folle prise d'un délire soudain. Ils mettraient sans doute bientôt tout l'épisode sur le compte de l'alcool et l'oublieraient ou en feraient une anecdote mémorable à raconter.

Surtout, Marie ne voulait pas renoncer à ces fêtes qui célébraient leurs dix-huit ans, passage vers la majorité dont elle souhaitait marquer la portée symbolique. Ses amis et elle devenaient officiellement adultes, citoyens de plein droit, libres et responsables de leurs actes et de leurs choix. Cette perspective la grisait et elle voulait faire en sorte que les festivités lui permettent d'en garder une trace inaltérable toute sa vie.

- Tu ne dramatises pas un tout petit peu ? Ecoute, je parie que demain Sophie viendra présenter ses excuses. Et nous lui pardonnerons parce qu'elle était sous l'emprise de l'alcool et que tout le monde a le droit à l'erreur, suggéra-t-elle à Angel.

- Il ne s'agit pas de cela, Marie. Pas d'un incident lié à l'alcool. Il s'agit de son aura.

- De son aura ? demanda Marie, surprise.

- Oui, son aura s'assombrit. Or Sophie, jusqu'à notre rencontre, était une âme claire. Mon contact la pervertit. C'est à cause de moi qu'elle est en train de sombrer du mauvais côté, lui répondit Angel avec un regard douloureux.

- A cause de toi, non ! A cause d'elle-même ! C'est elle qui choisit de trahir notre amitié ! C'est elle qui choisit de mal se conduire avec toi ! Moi aussi je suis à ton contact et pourtant mon aura n'a pas viré au noir que je sache ! lui répliqua-t-elle avec véhémence.

- Ce n'est pas dans l'ordre des choses que j'entre en contact avec des âmes claires. Je suis censé ne tenter que des âmes grises ou noires. En fréquentant des âmes comme la tienne ou celle de Sophie, je contreviens à l'ordre prévu. Toi, miraculeusement quelque chose te protège.

- Cela n'a rien à voir avec un quelconque miracle ! protesta-t-elle. Je t'aime, Angel ! Et aimer, ce n'est ni mal, ni diabolique, ni pervers ! Ce qui me protège c'est la force de mon amour !

- Tu as sans doute raison. Le problème avec Sophie, c'est justement qu'elle ne m'aime pas. Elle veut seulement me posséder. Ou plutôt, au-delà de moi, ce qu'elle veut posséder, c'est l'objet élu par son amie. C'est de la pure rivalité.

- Alors cela se serait produit avec n'importe qui d'autre, du moment qu'il aurait été mon copain !

- Peut-être ... mais ce n'est pas certain. N'oublie pas que je suis un ange Tentateur. Je représente une tentation quasi-irrésistible. C'est pour cela que je ne mène des missions qu'auprès des âmes dont la perdition doit être confirmée et accélérée. Or ce n'est pas le cas de Sophie. Ce n'était pas le cas. Maintenant elle est en danger. Et nous avec.

- Nous avec ? Pourquoi ?

- Parce que ma présence ici contrevient à l'ordre du monde. Il n'est pas prévu qu'un ange et une humaine tombent amoureux l'un de l'autre. C'est en violation de ce qui est normalement permis et possible. Tant que notre amour restait pur et sans conséquence, je pense qu'il était toléré. Mais dès lors qu'il enfreint les règles, qu'il perturbe le cours normal des choses jusqu'à mettre en danger une âme claire, alors je crains qu'il ne soit plus longtemps admis.

- Une fois de plus, tout cela est totalement injuste, protesta-t-elle. Nous ne faisons rien de mal à nous aimer. Notre amour est vrai, il est beau, il est bon. Si plus de personnes dans le monde éprouvaient un tel amour, je crois que la terre s'en porterait mieux. Il serait complètement injuste que nous soyons punis à cause des fautes de Sophie. Et puis, je te le redis, je parie que Sophie va venir nous demander pardon et tout rentrera dans l'ordre.

Malheureusement, la journée du lendemain lui donna tort.