Ou comment se retrouver sur le cul.

Start from the beginning
                                    

- Vas-y, je t'en prie.

- Vous n'entrez pas avec moi ? Questionnai-je.

- Je ne peux rentrer que si tu m'y invites, rétorqua-t-il avec naturel comme si ma question était totalement dérisoire. C'est ta chambre désormais.

Je le regardai un peu plus sceptique encore alors qu'il était soudainement bien protocolaire. Je haussai les épaules et me décidai à ouvrir la porte un peu moins angoissée. J'étais au moins certaine que la pièce ne serait pas aussi horrible que je ne l'avais craint. Jusqu'à présent tout le château semblait en bon état et je pouvais donc en espérer tout autant de mon lieu de vie. En réalité, je m'attendais désormais à une pièce relativement normale. Plutôt petite peut-être mais tant qu'elle était propre et fonctionnelle, cela me conviendrait. Mais j'avais eu tort. Encore une fois. Oh, ma chambre était fonctionnelle. Et tout à fait propre. Mais elle n'était pas petite. Pas petite du tout. Bégayante, je me tournai vers un Andrew visiblement très amusé de ma réaction. Il semblait avoir méticuleusement préparé son coup.

Je jurai tout bas avant de me décider à regarder plus attentivement autour de moi. Sur quoi devais-je d'abord porter mon choc ? Le lit à baldaquin dont les rideaux en tissu vert tombaient avec élégance jusqu'au sol ? Sur l'immense armoire en bois sculptée ? Sur le piano droit installé au fond de la pièce ? Sur les diverses étagères accrochées aux murs et pleines à craquer de livres ? Ou peut-être simplement sur l'ordinateur sorti d'un autre siècle, tout aussi surprenant que le reste ? Je me tournais vers Andrew, dubitative, et il haussa les épaules avec simplicité.

- Elle te plaît ? Tu n'as pas encore vu la salle de bain.

- Je ne la partage pas ?

- Chaque élève de Dacer possède la sienne, affirma-t-il. Afin d'éviter... les accidents.

Cela, je pouvais le concevoir. Si le dortoir était mixte, je me doutai qu'une douche commune était peu envisageable même si je n'étais pas certaine que ce terme « d'accident » avait le même sens pour lui que pour moi. Après une brève hésitation, je tirai ma valise et m'enfonçai dans ce que j'allais désormais devoir appeler ma chambre. Je la hissai sur le lit qui ne grinça pas contrairement à ce que j'aurais pu craindre face à son aspect vieillissant. Mais j'aurai presque aimé que ce soit le cas afin de me rassurer en constatant que cette allure luxueuse cachait une réalité bien moins reluisante. Mais il fallait voir la vérité en face. Ce n'était pas qu'une allure. Qu'est-ce que tout cela signifiait ? Je me laissai lourdement tomber sur le matelas. Moelleux évidemment.

- Vous êtes sûr que vous ne vous êtes pas trompé de chambre ? Je ne pense pas avoir les moye...

- Je suis sûr, me coupa-t-il sobrement. M'invites-tu as entrer ?

- Évidemment, affirmai-je interloquée qu'il soit resté planté dans l'encadrement.

- Tu te feras rapidement au fonctionnement particulier de notre établissement. Pour le moment tout va te sembler assez... étrange mais tu auras les explications en temps et en heure. Pour le moment, profites juste de ce qui t'est offert.

Mon malaise grandissait à vue d'œil. Que devrais-je comprendre en temps et en heure ? Un fonctionnement particulier ? Ça je voulais bien le croire. Ma nervosité devait se faire ressentir car Andrew lui-même semblait quelque peu gêné, ne sachant probablement pas quoi dire pour me rassurer. Cherchant à occuper mon esprit, je me contentai de me lever pour aller feuilleter du bout des doigts les livres soigneusement rangés. Cela allait du livre vieux et décrépis – que je soupçonnais aussi âgé que leurs auteurs –, au roman de jeunesse sorti la semaine dernière et que j'avais eu pour projet de m'acheter. Mon regard finit par se stopper sur une série de livres volumineux traitant tous des mythes et légendes celtiques. J'empoignai avec curiosité la couverture de l'un d'entre eux mais une voix rauque toussota comme pour me rappeler que je n'étais pas seule.

Water LilyWhere stories live. Discover now