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Je crois que j'avais trop bu. Je fixais les étoiles. Mes pieds ne sentaient même plus la caresse de la mer et je pleurais. Ou peut être que non. Peut être que l'humidité sur mes joues était juste l'embrun marin. J'avais l'impression de tanguer, de tanguer en même temps que les vagues, de ressentir le monde, le monde sous mes pieds. Je pouvais deviner la façon dont la terre tournait, dont le vent balayait l'air. Je sentais les astres au dessus, et la chaleur de la lave qui devait couler sous mes pieds, tout ces choses que l'on ignore d'habitude, car on a si peu le temps de s'y attarder. Je prenais conscience de mon corps, pour la première fois. Du poids sur mes pieds, de la lourdeur de mon cou, du balancement lent de mes épaules. C'était agréable, de se deviner si petit et si fort à la fois. De se dire qu'il suffirait que je plonge dans l'océan maintenant, pour ne plus jamais rien ressentir. Pour disparaître. Et être remplacé par quelqu'un qui réussirait peut être mieux que moi. Ou peut être pas.

Une main s'est déposée dans le creux de mon dos. Chaude et rassurante. Une deuxième entité venant se lier à la mienne. Et mon corps n'était plus seul dans la nuit, il y avait quelqu'un d'autre pour soutenir mon poids. Comme une ramification qui venait de s'ajouter à ma colonne vertébrale.

- Qu'est ce que tu fais ?

- Rien, je pense.

Harry a enroulé son bras autour de moi. J'ai fermé les yeux et je me suis laissé aller contre lui. Je sentais son souffle dans sa cage thoracique, et les battements de son coeur. Tout était si calme, tout était si juste, à sa place. La façon dont il me tenait, la façon dont mon corps se fondait contre le sien, sa respiration s'échouant dans mon cou, les boucles de ses cheveux caressant ma joue et mes doigts jouant avec les siens.

- J'ai envie de me baigner.

- Maintenant ?

- Pourquoi pas ?

On s'est déshabillé en silence, laissant nos shorts et t-shirts sur le bord de la plage avant de plonger. La lune éclairait les vagues, et le corps d'Harry me semblait laiteux sous sa lumière. Je me suis rapproché de lui, attiré comme une luciole par une ampoule électrique. Il souriait. J'ai repoussé les boucles qui étaient venues se coller à sa joue. Il a attrapé mon poignet. Une seconde après j'étais sous l'eau. J'entendais son rire au dessus de moi, au dessus de l'eau. Je ne voulais pas qu'il reste à la surface, sans moi. J'ai tiré sur ses jambes. On a coulé tout les deux, serrés l'un contre l'autre. J'avais le visage contre son épaule et son bras serrait si fort mes hanches. C'était agréable. Et un peu effrayant. On est remonté à la surface, essoufflé. Il regardait mes lèvres à quelques centimètres de sa propre bouche. Ses doigts toujours sur mes hanches me brulaient. J'avais lu un livre, une fois, où l'héroïne marquait tout ce qu'elle touchait. J'étais sûr qu'Harry pouvait me faire ça. Que ses doigts glissant sur mon corps y laisseraient des milliers de petites cicatrices et d'autres milliers de caresses. Pour l'instant c'était son regard qui m'effrayait. Parce qu'il n'avait jamais été aussi intense, aussi froid et brûlant à la fois. Je me suis raclé la gorge.

- On pourrait mourir si facilement.

Il a froncé les sourcils, un peu. Ses yeux ont fait de lents aller retour entre mes lèvres et mes yeux. Et puis il s'est mis à rire. Je savais que j'avais rompu le charme. Exprès.

- Ouais, c'est vrai.

Après ça on est retourné sur la plage. On est resté allongé l'un contre l'autre, à étendre de sécher. On a regardé les étoiles, et parfois Harry en pointait une et me disait son nom. Je crois qu'il en inventait, et au fond je m'en foutais. C'était juste agréable, sa voix pour moi, dans la nuit.

Je ne sais plus à quel moment je me suis retrouvé appuyé contre lui. J'avais oublié la peur qui m'avait fait fuir. C'était différent. Tout était différent. Sa main caressait lentement mon dos. Ses lèvres traçaient une ligne de baisers contre mon cou. Et j'étais bien. Et comme tout à l'heure, tout semblait si naturel. J'avais envie de lui dire que j'étais heureux, si heureux qu'ils me serre de cette façon, que j'avais entendu depuis si longtemps, que je voulais tout de lui, que j'acceptais de lui donner mon âme, mon coeur, mon sang, tout ce qu'il désirait. J'avais envie de lui dire trop de choses alors je me suis tu.

On s'est embrassé, longtemps. Juste ses lèvres et les miennes. Mes mains appuyées dans le sable, ses mains appuyant sur mes joues. Nos deux coeurs en fusion qui battaient au même rythme, nos respirations si lourdes et si basses et la chaleur rassurante de sa peau collant à la mienne. Je n'avais pas envie de plus alors, juste de ses baisers. Je me suis reculé en premier. J'étais assis sur son bassin, et je pouvais sentir son sexe contre ma cuisse. Comme une présence rassurante, et vivante, presque autant que la lumière au fond de ses pupilles. On s'est regardé longtemps. Harry respirait très calmement, et je me suis dit que si tout à l'heure je ressentais mon propre corps, à présent c'était le sien qui prenait mon espace. C'était le sien que je devinais, si fort, si précisément. Comme si je m'étais fondu en lui. C'était étrange. Un peu inquiétant. Et surtout agréable.

Harry a fini par fermer les paupières et je me suis relevé. J'ai enfilé mon t-shirt, mon short, et je suis retourné regarder la mer. Les vagues avaient l'air énormes à présent, et le vent les frappant gémissait. J'ai eu à nouveau envie de plonger, de nager jusqu'à ligne trouble de l'horizon. De découvrir ce qu'il y avait de l'autre côté ou de me noyer.

- On rentre ?

Harry était habillé. Il ne me regardait pas, mais sa main tendu m'attendait. J'ai entrelacé nos doigts et on a remonté la dune. Au dessus de nos têtes les étoiles riaient sûrement.

Regarde Moi - Larry StylinsonHikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin