Chapitre 57 - La goutte d'eau qui fait déborder le vase

40 7 2
                                    

« T'as entendu la nouvelle musique qui vient de sortir ? » entends-je glousser des filles alors que je pénètre dans l'enceinte de l'école.

Je fais un vague signe de la main à Hélios qui est dans la voiture, avant de tourner les talons et m'engouffrer dans le bâtiment, sans la moindre motivation. J'ai le moral dans les chaussettes et je suis d'une humeur terrible, maintenant que ma peine et mon angoisse m'ont quittée. Je n'arrête pas de repenser à Thésée et à ses mots.

Il semblait vraiment en colère...

Et même si je le comprends, je n'arrive pas à m'empêcher de ressentir la même chose. Je sais que c'est puéril, que je suis la seule à m'être mise dans cette situation en restant silencieuse, mais je n'arrive pas à occulter le fait que tout ça est injuste. Bien sûr, Thésée doit penser la même chose que moi et je suis sûre qu'il doit imaginer que je ne lui fais pas confiance ou quelque chose comme ça, mais je ne peux pas m'empêcher d'être frustrée d'être incomprise.

Si seulement je pouvais expliquer ma situation...

Je suis sûre que tout le monde pourrait se mettre à ma place et comprendre mon trouble, mais je ne peux pas...

Alors je passe juste pour la chieuse de service ou la fille torturée qui ne dit jamais rien. Mais tout ça ce n'est pas dans ma nature. La vraie moi n'est pas comme ça.

« T'as fais quoi ce week-end du coup ? » entends-je d'autres voix en traversant le couloir, le long du réfectoire pour me diriger vers l'amphithéâtre.

Je suis un peu en avance, comme d'habitude, mais peu importe. Je crois que ce matin j'avais besoin de me retrouver un peu seule. En ce moment, tout me semble quelque peu étouffant... Déstabilisant. Je ne me sens pas très bien, mais je peine à expliquer avec précision pour quelle raison, alors je rumine en silence et j'attends de voir jusqu'à où ma patience va pouvoir aller.

« Je suis allée en week-end à New-York. »

Je me retiens de lever les yeux au ciel en entendant mes congénères glousser.

La vie n'est pas désagréable pour tout le monde en tout cas.

Moi aussi j'aimerais bien que mes pensées ne soient accaparées que par ce genre de choses. Alors que je marche en fixant mes pieds, j'arrive rapidement dans l'aile du bâtiment réservée aux salles d'étude et aux bibliothèques et je marche le long du comptoir en silence, là où tout le monde se réunis toujours avant les cours, à cause de tous les canapés super confortables qui sont installés là. C'est là que je remarque une tignasse brune bien familière, dépasser de l'un des dossiers. Au début, j'hésite un peu en la voyant, considérant de passer mon chemin en l'ignorant. Pourtant, presque par désespoir de penser à autre chose, je commence à faire un pas dans la direction de Chris qui est assis de dos à moi dans le grand hall.

« Alors, où t'en es ? » demande une fille, dont je reconnais vaguement la voix.

C'est son amie.

En entendant que quelqu'un l'accompagne, je suis soudainement prise d'une espèce d'angoisse étrange, qui me pousse à m'arrêter dans mon sillage. Pour une raison que je n'arrive pas bien à m'expliquer, je commence à reculer et à me tenir un petit peu à l'écart d'eux, mais juste assez prêt pour les entendre discuter.

Maintenant j'espionne les gens.

Je ne suis pas certaine de savoir pourquoi je me retrouve dans cette position, mais j'ai comme qui dirait un drôle de sentiment... Comme une petite voix qui me chuchoterait d'attendre un peu avant d'y aller.

« De... ? » il demande et je ne peux m'empêcher de noter que sa voix est bien moins enjouée que d'habitude.

Il me semble étrangement plus détaché et presque froid. En l'entendant ainsi, je commence à me demander ce dont il peut bien parler pour avoir ce genre d'attitude.

Shitty transmigrationWhere stories live. Discover now