J'essaie de ne pas ressasser ma discussion avec ce fameux Miller, qui ne m'a toujours pas donné son prénom. En plus, il a coupé la prof avant qu'elle ne le prononce, donc je meurs de curiosité.

Mais pourquoi est-ce que ça m'intéresse autant ?

Peut-être parce que c'est la première fois, depuis longtemps, que j'ai une discussion aussi profonde avec un homme qui n'est pas Alec.

Alors je cède et demande :

— Dites, c'est quoi votre prénom ?

Je continue de le vouvoyer pour ne pas qu'il pense que je veux devenir son amie.

— Nous ne sommes malheureusement pas assez proches pour que je puisse vous divulguer des informations pareilles me concernant, réplique-t-il d'un air condescendant.

Oh le chien.

Il retourne mes propos contre moi...

Il veut me chercher ou quoi ?

— Très drôle, réponds-je cynique. Alors c'est simple, je t'appellerais Miller.

Sans m'en rendre compte, je viens de le tutoyer. Je commets toujours des erreurs quand je suis en colère. Il faut que je sois plus vigilante.

J'espère qu'il n'a pas remarqué. Surtout que c'est moi qui lui ai interdit de le faire. Ce n'est pas de ma faute, je n'ai pas l'habitude de parler à d'autres étudiants qu'Alec.

Pour mon plus grand malheur, il ne loupe rien.

— Alors comme ça on se tutoie déjà, me dit-il d'une voix langoureuse. Je trouve que ça va un peu vite entre nous. Tu te laisses attendrir aussi vite avec tous les garçons ?

Mais ? Je vais le gifler, ce n'est pas possible.

Il m'énerve avec ses blagues idiotes. Je décide de le remettre à sa place avant qu'il ne se permette d'aller plus loin.

— Ah merde, tu es un garçon, désolé. C'est juste que mes yeux me font défaut, parfois. Alors ça sera vous, pour toi.

Et là, contre toute attente, je l'entends rire. Un rire qui me réchauffe sans même que je comprenne pourquoi. Comme si un sentiment de familiarité m'envahissait. À nouveau.

— Tu viens vraiment de faire de l'autodérision sur le fait que tu es aveugle ? me questionne-t-il abasourdi.

Je souris et lui répond :

— Oui et alors ? Je ne laisserai personne se moquer de moi, mais ce n'est pas pour autant que je n'ai pas le droit de le faire moi-même.

L'autodérision est une belle arme. En effet, ça permet de faire croire aux autres que nous avons confiance en nous au point de nous moquer de nos propres complexes.

Bien sûr, ce n'est pas toujours le cas. Parfois, c'est juste pour tromper les autres. Dans mon cas par exemple, ça l'est. Je sais que je suis vulnérable, mais hors de question de le montrer aux autres.

Hors de question d'être une victime.

— Si ça peut te faire plaisir, balance-t-il avec un rire emplie de jugement.

Il se fout de moi ? Pourquoi il se montre aussi familier ?

C'est fou comme sa voix me met hors de moi. Je ne comprends pas ce qu'il m'arrive.

— Ne me tutoie pas, le prévins-je à nouveau.

C'est impensable que je le laisse penser que l'on pourrait être ami. S'il croit qu'il peut outrepasser les règles instaurées ici, il se trompe.

BLINDLYNơi câu chuyện tồn tại. Hãy khám phá bây giờ