— « Volets Bleus ». Ça en jette, hein ?

Asha s'arrêta et explosa de rire. Je savais d'avance qu'elle se moquerait, mais ce qu'elle ne savait pas, c'est que personne n'allait penser à un mot de passe aussi ridicule. Enfin personne sauf moi. Cinq minutes passèrent sans qu'Asha ne cesse de rire. À chaque fois qu'elle se confrontait à mon air sérieux, elle repartait de plus belle, manquant de s'étouffer à chaque fois.

— Tu m'appelles quand t'as fini, j'ai une Emma à retrouver.

Et je repartis sans l'attendre. J'eus même l'idée de faire des détours pour la perdre, mais ce n'était pas le moment de perdre du temps avec ce genre de gamineries. Elle va bien finir par s'en remettre, il y a pire comme mot de passe. Je regardais l'heure sur mon téléphone, et en profitais pour regarder si quelqu'un m'avait répondu. Liam avait lu mon message, mais n'avait pas pris la peine d'y répondre, ce qui m'agaçait. Je crois que j'aurai préféré un « ok », il pourrait au moins faire semblant de nous soutenir.

— Asha, on est bientôt arrivés ! criai-je. Qu'est-ce que tu fais ?

Asha courut pour me rattraper, et me fit une grimace en arrivant à ma hauteur. La maison d'Emma était la prochaine à droite, une grande maison blanche sur deux étages. Un portail électrique en gardait l'entrée. Je me mis ma main dans le lecteur biométrique. En reconnaissant mes empreintes, le portail s'ouvrit. Il y avait de cela quelques années, la famille d'Emma avait ajouté mes empreintes, au vu de mes visites régulières.

— J'adore ces portails, s'émerveilla Asha. Dire que ma mère tient à notre vieux tas de ferraille manuel. C'est tellement plus stylé comme ça.

Je m'arrêtai devant la porte et toquai, alors qu'Asha, qui ne faisait attention à rien, manqua de me rentrer dedans. Elle s'excusa et se concentra de nouveau. Une mauvaise nouvelle nous attendait très certainement et mieux valait s'y préparer. La porte s'ouvrit sur un homme de grande taille, les cheveux grisonnants, et les traits tirés par la fatigue. Il nous fit signe d'entrer, visiblement surpris de notre présence.

— Je suis navré, Emma n'est pas là, elle est partie ce matin, nous informa-t-il.

Asha réagit en même temps que moi. Nos regards se croisèrent avec cette même pensée en tête. Ce matin ?

— Vous savez où elle est ? demandai-je soudain rassurée.

— Pas vraiment, elle nous a dit qu'elle partait et n'a plus donné de nouvelles depuis. Je comptais t'appeler pour te demander si tu étais au courant de quoi que ce soit.

— En fait, intervint Asha, nous n'avons plus de ses nouvelles depuis qu'elle est rentrée vendredi. D'habitude, elle nous répond, mais là plus rien.

— On va aller se promener avec Asha, on en profitera pour chercher Emma. Si elle est partie ce matin, elle ne doit pas être bien loin. Merci de nous avoir prévenues.

Le père d'Emma nous raccompagna, et nous remercia. Je lui promis de donner de nos nouvelles si on croisait Emma.

— Alors, on commence par où ? s'impatienta Asha.

— Il y a un coin où on allait souvent, près de la mairie.

Je guidais Asha à travers la ville. La mairie était à plusieurs centaines de mètres, et l'endroit que je voulais vérifier, juste un peu plus loin. On ne s'y était pas rendu depuis longtemps, mais Emma adorait cet endroit. Il y avait plein d'arbres ; des saules pleureurs, un vieux moulin, une rivière et un banc juste au bord. C'était très calme, on pouvait y entendre les oiseaux chanter, et personne ne venait jamais nous déranger. Le mieux était de venir la nuit, lorsque tous les lampadaires et les spots abandonnés s'allumaient, illuminant l'eau d'une lueur bleutée. C'était notre cachette secrète, et j'avais grand espoir d'y retrouver Emma, plongée dans ses réflexions.

Dans l'Ombre d'un complotWhere stories live. Discover now