Chapitre 20

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Je suis assise sur le canapé en face de la télé et je déguste le reste des frites qui accompagnaient mon burger. Jordan lui, assis parterre à côté de moi, vient de terminer ses fameux raviolis. Il est maintenant concentré sur le film qui passe à l'écran. Une bande d'ami.es essaye de survivre à une attaque de cannibales dans un camp de vacances. À une certaine distance de là, alors qu'ils cherchent désespérément à sortir de la forêt, l'une des filles s'éloigne du groupe pour faire pipi, en refermant sa culotte elle entend un bruit dans le feuillage et s'avance avec hésitation vers l'endroit.

— Mais elle va où ? s'écrie Jordan. Elle est bête ?

— Ça se voit qu'elle n'a pas regardé beaucoup de films d'horreur dans sa vie.

Un cannibale surgit du buisson et lui transperce le ventre à l'aide d'un pieux en bois. Je commente :

— Voilà. Elle l'a bien cherché.

Jordan s'est couvert les yeux pour ne pas voir la scène. Ça me fait marrer.

— Ne me dis pas que tu es sensible à ça.

— Je supporte pas beaucoup les scènes sanglantes.

— C'est ce que je dis... Tu es une chochotte.

— Pas du tout, s'insurge-t-il alors que je n'arrête plus de me moquer.

— Ok. Voyons voir si tu es cap de regarder la suite sans te couvrir la vue.

Il accepte le défi et le relève vaillamment, jusqu'à ce qu'advienne un passage de décapitation. Cette fois avec une hache, le monstre s'en prend à tous les membres du corps d'un jeune homme. Jordan hurle de stupeur et s'agrippe à mes jambes dans lesquelles il fourre également sa figure.

— Shh ! fais-je en riant doucement. Ton frère va s'énerver.

Il ne se détache pas de mes jambes pendant un moment. Je me sens subitement très à l'étroit. Mes pensées vont dans tous les sens : contrôle ta respiration, Kelly, il peut la sentir. Ne bouge surtout pas, en gesticulant tu ne feras que prouver que la situation ne te laisse pas indifférente. Mais comment rester indifférente ? Ou du moins, comment feindre l'indifférence dans ce cas ? Que dire ? Que faire ?

Heureusement, le garçon ne tarde pas à reprendre sa position précédente et nous continuons le film dans un silence de cimetière.

Puis vient le moment auquel j'ai sciemment évité de songer depuis le début de la soirée : le coucher.

— Tu peux dormir dans ma chambre, je prendrai le canapé.

— Mais non !

— Si si, t'inquiète.

— Non. Il est assez confortable pour moi aussi (en bondissant sur le long fauteuil comme pour le tester), en plus ta chambre est crade.

Il esquisse une grimace d'indignation.

— Détrompe toi : Je l'ai nettoyée quand j'ai su que tu débarquais.

— Comment ça alors que tu n'arrêtais pas de dire que tu ne me crois pas ?

— On ne sait jamais.

Il m'adresse un sourire entendu. Je roule des yeux, l'air blasé.

— Il ne s'est même pas écoulé vingt minutes entre le moment où je t'ai dit que j'étais en route et mon arrivée. J'aimerais bien voir ce que tu prétends avoir nettoyé.

— Fais-toi plaisir, accorde-t-il en me désignant des deux mains la direction de sa chambre.

J'ouvre la porte et à ma grande surprise, l'endroit semble bien clean, à l'exception du lit qui est dressé un peu maladroitement. Je guette Jordan dont l'expression fière est devenue intarissable devant mon ébahissement.

Le roman de Kelly حيث تعيش القصص. اكتشف الآن