Fangs and Roses

𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝟷𝟿, 𝙰𝚍𝚛𝚒𝚊𝚗

— Merci d'être venue, dit-il alors qu'ils s'éloignent tous les deux jusqu'à sortir de la grange.

Elle hausse les épaules.

— C'est normal. C'est juste que... tu penses vraiment que c'est son âme sœur ?

— C'est elle qui l'a dit. Tu sais bien que personne peut savoir à notre place.

Le regard de Leyna se perd légèrement ailleurs, et elle hoche la tête.

— J'espère qu'elle va bientôt redevenir humaine.

Adrian tourne son regard vers l'intérieur, où Mika chuchote doucement à l'oreille de la louve. Son museau est collé contre son sweat-shirt.

— Et moi donc, soupire-t-il.

☾

— Je te fais confiance sur ce coup-là, mais c'est bien parce que...

— ... je suis un Descendant. J'en suis conscient, monsieur. Et je vous remercie pour ça.

Droit, les mains dans le dos, Adrian garde le regard posé sur le grand homme large derrière le bureau. Ses épaules carrés sont serrées dans une chemise qui semblent presque trop petites pour ses imposants biceps.

Pour un humain, Adrian se sent presque petit à côté du responsable des crimes magiques de la police. En règle générale, ce sont Ruby et d'autres personnes de l'administration dont c'est le boulot qui se charge de faire la liaison entre les activités de l'Agence et la fin des opérations au sein de la police humaine. Quand il s'agit d'emprisonnement, temporaire ou à longue durée, ou de procès, les équipes ne sont plus compétentes et toute la suite doit se faire par les humains, qui représentent tout de même la grande majorité de la population.

— Combien de temps ça prendra, d'après toi ?

— Je l'ignore, monsieur. Ces cas sont extrêmement rares, je n'en ai rencontré que deux, en incluant celui-ci.

— Comment s'est soldé le premier ?

— Presque immédiatement, répond-il honnêtement. Le loup a repris sa forme humaine sans problème, avec mon intervention.

Le responsable Kerton acquiesce lentement, les lèvres serrées.

— Vous vous en portez garant pour le moment ?

— Cette louve sera surveillée, confirme-t-il. Mais, pour être honnête monsieur, elle ne représente aucun danger. Elle a simplement l'air perdue et effrayée. Peut-être qu'une fois rassurée, elle reprendra son apparence tout naturellement.

Dans son dos, Adrian contracte doucement les poings.

— Si vous la prenez sous votre aile, je m'en doute. Mais même si les blessés n'ont pas porté plainte, il doit quand même y avoir un jugement. Tout usage d'une force magique à l'encontre d'un humain, même involontaire, doit être corrigé par une formation encadrée. Tu connais la loi.

Adrian se raidit.

Le responsable Kerton n'a sûrement pas dit ça pour le blesser ou lui rappeler de mauvais souvenirs, mais Adrian y pense à chaque fois qu'ils arrêtent un vampire nouveau né complètement paniqué, un loup qui a dérapé, une sorcière qui ne s'est pas contrôlée, ou un mage dont l'élément s'est soulevé par inadvertance.

Il pense à ces vingt mois qu'il a dû faire dans le centre pour mineurs à la sortie de la ville. Il venait d'avoir 12 ans, et n'avait obtenu que quelques heures de permission pour l'enterrement de sa mère.

— Je la connais, oui. Et je comprends. Je vous recontacterai si jamais il y a du nouveau.

La veille au soir, ils ont passé des heures à essayer de la faire se détransformer. Chaque fois qu'Adrian grondait en utilisant ses pouvoirs, ou tentait n'importe quelle technique pour la faire se soumettre — même de force — elle finissait juste par trembler et se recroqueviller.