Les ailes de papier [Vkook/Yoonmin]

Chapitre 86

Yoongi en demeura bouche bée, Jimin aussi.

D'interminables secondes s'écoulèrent, au terme desquelles Taehyung quitta Jungkook des yeux et adressa un sourire peiné à ses deux amis.

« Bon, je suis rassuré de voir qu'il va bien. Je vais pas vous ennuyer plus longtemps, à bientôt. »

Il sortait de la chambre quand il entendit des pas derrière lui. Il ne ferma pas la porte après son passage ; Yoongi s'en chargea à sa place. Dans le couloir, il poussa un soupir puis se tourna vers son aîné, l'air désinvolte.

« Si c'est pour me dire que j'aurais jamais dû faire ça et que Jungkook me hait, t'embête pas : je me moque que Jungkook me déteste, et je me fous de ton avis. Je fais ce que je veux de mon argent et je ne demandais rien de plus que de le voir après son retour pour m'assurer qu'il se portait bien. J'avais même prévu d'arriver pendant qu'il dormait, comme ça je lui crée pas plus de stress. J'attends rien en retour, et je continuerai de penser que j'ai bien fait de lui donner un coup de main, parce qu'il était hors de question qu'il perde l'usage de son bras si mon fric à la con pouvait l'en empêcher. C'est bon, je peux y aller, maintenant ? »

Son ton, agressif mais mélancolique, témoignait de la douleur qu'il éprouvait. Or, au contraire de ce qu'il avait imaginé, Yoongi ne cria pas, ne s'énerva pas.

« C'est toi qui as payé son opération ? souffla-t-il.

— Tu m'as dit le prénom de son kiné l'autre fois par SMS. Je l'ai retrouvé, j'ai pris contact avec lui, et j'ai proposé de demander à une clinique que je connais de prendre en charge l'opération : j'ai donné pas mal d'argent à Noël dernier pour que les enfants de leur service pédiatrique reçoivent des jouets. J'espérais que de cette façon, Jungkook accepterait, puisqu'il n'aurait pas la sensation de devoir quoi que ce soit à quelqu'un. Mais... la directrice a refusé. Alors j'ai décidé de tout prendre en charge à deux conditions : que Jungkook n'apprenne jamais que c'était moi qui avais payé pour tout, et que je sois averti dès qu'il sortirait de la salle de réveil. Je pouvais pas le laisser dépérir alors que... alors que le seul obstacle entre lui et une vie heureuse, c'était cette opération qu'il refusait. Tu pourras m'en vouloir d'avoir agi dans son dos et d'avoir menti, mais je ne regretterai jamais ce que j'ai fait. »

Yoongi, à ces mots, se mordit la lèvre inférieure, et il planta son regard dans celui de l'auteur.

« Dans ce cas, puisque Jungkook ignorera toujours qui l'a sauvé, je te remercie pour nous deux. Merci pour ton geste, pour ta générosité, pour ton aide. »

Il s'inclina à quatre-vingt-dix degrés.

« Merci d'avoir aidé Jungkook en dépit de tout ce qui s'est passé, je pense sincèrement que tu lui as sauvé la vie. Il ne souriait plus depuis si longtemps, il... il était toujours si angoissé... Taehyung-ah, merci pour ton bon cœur. »

Il retint son émotion de son mieux et se redressa, les prunelles de nouveau brillantes. Taehyung, stupéfait de cette réaction qu'il n'avait pas prévue, demeura coi. Puis à son tour il parut sur le point de verser une larme. En dépit de son apparence soignée et de son port fier, l'auteur se laissait dépérir. Il avait perdu du poids ces derniers temps, et si Jimin ne l'avait pas accueilli chez lui, il aurait sans doute passé l'essentiel de ses journées à se lamenter dans son lit, partagé entre les souvenirs de Jungkook et ceux, bien plus anciens, de son enfance.

« S'il te plaît, hyung, est-ce que tu pourras me tenir au courant de son état ? Je voudrais savoir s'il se sent mieux, s'il se rétablit, s'il sourit à la vie de nouveau, s'il assume son corps et s'aime enfin comme il le devrait. Je t'en supplie...

— Je te tiendrai au courant comme je l'ai fait jusqu'à présent, opina Yoongi. Compte sur moi. Mais... j'en reviens toujours pas. Que t'aies fait tout ça sans rien demander en retour, sans même qu'il sache que c'était toi qui avais sauvé son bras... Tae, c'est magnifique, j'arrive pas à y croire.