Chapitre 4

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Quand j'étais gamin, j'adorais le samedi. C'était le jour parfait. Tu ne penses pas à l'école ou autres obligations. Tu joues, tu regardes la télé, tu dessines. À l'époque, j'étais même heureux de passer l'après-midi avec mes potes dans le square du quartier ou chez l'un de nous. Je pouvais me coucher plus tard, mes parents ne me disaient rien. C'était fantastique.

Maintenant que j'ai trente ans, mon jour parfait a changé. C'est devenu le dimanche. Les raisons sont bien différentes parce que ma vie d'aujourd'hui ressemble beaucoup à une succession de samedis les uns après les autres – si on fait abstraction de l'histoire de goûter chez les copains et le square bien sûr. C'est parce que c'est le moment de la semaine où je me retrouve toujours seul.

En effet, Céleste est de repos et retrouve sa famille. C'est sa règle d'or. D'ailleurs, c'était sa seule requête quand elle a commencé à travailler pour moi. Je peux l'appeler à n'importe quelle heure du jour ou de la nuit sauf le dimanche. Autant dire que ça ne me force pas trop comme condition.

Mes parents habitent en banlieue et ont depuis longtemps décidé qu'être avec mon frère et ses enfants à lui était ce qu'ils préféraient. Je ne leur en veux pas, je les comprends. Mes neveux grandissent et changent alors que moi, je suis le même depuis mon adolescence.

Donc je suis seul. Pour mon plus grand plaisir.

En ce dimanche, assis sur mon canapé, j'hésite sur ce que je vais faire de mon temps libre. Céleste m'a parlé d'un drama à l'humour décapant. Mais j'ai bien envie de lire. J'ai pas mal de retard dans la lecture d'un webtoon, un yaoi assez palpitant. L'humour n'y est pas incroyable mais les coups de crayon sont d'un réalisme déroutant.

Je fais craquer mes doigts et fixe un long moment la télécommande à l'autre bout du canapé. Mais une petite moue apparaît sur mes traits et je me lève. Ça sera webtoon. Un problème se présente alors. Où se trouve ma tablette ? Je commence par regarder dans tous les placards du meuble TV puis de la table basse. Rien. Je fronce les sourcils en réfléchissant à l'endroit où elle peut se trouver.

Je ne suis pas quelqu'un de très organisé, j'ai même une tendance à mettre le bordel dans n'importe quelle pièce où je passe, en dehors de mon atelier. Je prends toujours soin de cet endroit, j'ai besoin de m'y sentir bien et à l'aise pour dessiner et écrire. Donc Céleste range tout le reste de l'appartement. Sans me préciser où se trouvent mes affaires.

Les minutes qui suivent, je les passe à retourner tout le salon puis ma chambre. Je retrouve ma tablette dans un placard de la cuisine. Je la récupère, étonné de cette cachette. Je la tourne dans tous les sens comme si je la découvrais pour la première fois, un sourcil levé.

— Qu'est-ce que tu fiches là ?

Tout en marchant vers le salon, je l'allume.

— Pourquoi Cély t'avait mise... Ah mais oui ! m'exclamé-je.

Elle l'avait planquée le jour où j'ai commencé le webtoon que je m'apprête à continuer. Je refusais de dessiner ou même de me doucher si je ne connaissais pas la suite de l'histoire. Elle s'était énervée et avait joué les mamans autoritaires pour me faire travailler.

Je ricane et m'allonge sur le dos. Mon index virevolte sur l'écran et cette fois, je retrouve sans problème ce que je cherchais. Je fais tomber sur mon corps le plaid posé sur le dossier. Sans attendre, je me plonge dans ma lecture.

Les dessins, le réalisme, la narration, tout est fait pour attiser, pour exciter. L'auteur est vraiment doué. Mon corps se ravive après des jours, des semaines d'un sommeil sans rêve. Il est stimulé grâce à mon esprit et à ces images.

J'en ai écrit pas mal pendant toutes ces années des histoires et des scènes de sexe. Un bon nombre. Tellement que je serais incapable de les compter. Tellement que j'ai toujours refusé que mes parents lisent mes bouquins. Ils savent juste que je suis dessinateur et que je publie sous un pseudonyme. C'est déjà bien suffisant pour la survie de notre relation.

In the starsWhere stories live. Discover now