ASCENDANCE

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Livre troisième : les Phénomènes, ou livre du majeur ; Ascendance

Je marche, solitaire,
Le pas à son recueil,
Entre les stèles funéraires
Et les cyprès de mon deuil.

Et jusqu'à la nuit noire,
La lune pleure son absence.
Mon cœur se verse à sa mémoire
Que je regarde. Et je me panse.

Mon père est là, sous cette dalle
Où sais-je encore s'il est ailleurs,
Pleurant le saule magistral,
Ou bien le chêne à son ampleur ?

Il était l'homme des jardins,
Celui des couleurs et des parfums,
Qui murmuraient à chaque fleur
Les grands bonheurs de leur destin.
C'était mon père à son ardeur
De la vie cueillant les fruits :
La framboise et la groseille,
La cerise et la noisette,
Le basilic, la ciboulette,
Toute saveur à leur merveille.
Mais voilà, blême aujourd'hui,
La solitude est à son heure.

Car comme les feuilles à leur chagrin
Glissant des branches à leur automne,
Il est venu l'hiver sylvain,
Des chrysanthèmes en couronnes.

Et sous ce ciel de triste étain,
Ma mémoire me fredonne
Son souvenir comme un refrain
Que la musique du vent entonne :

« Il était mon grand poète
Mon philosophe, mon mandarin.
Il était le grand esthète
Qui inspirait tous mes desseins. »

Il était avant ce vil septembre,
Avant que sa vie ne soit à l'ambre,
Aux temps des jasmins et des lilas,
Aux temps de gloire de mon papa.

Le sens des sensOù les histoires vivent. Découvrez maintenant