Chapitre 2 : Oscar

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Il serait carrément vulgaire de dire que j'avais mal au cul, mais en toute franchise c'était bien le cas. J'avais vraiment mal au cul. Bien sûr je ne pouvais m'en prendre qu'à moi-même mais pour être totalement honnête, si perdre sa virginité dans la backroom d'une boîte gay était sans soute à mille lieux de la première fois idéale qu'imaginait la majorité des ados homos, j'avais quand même bien du mal à regretter quoi que ce soit.
Enfin, tant que je n'essayais pas de marcher...Ou de m'assoir...Ou de rester allongé, aussi...

Heureusement que nous étions dimanche.

À la base, mon plan initial avait été un peu différent. Certes je connaissais la réputation de la Divine Comédie, puisque j'avais longuement réfléchi avant de choisir cette boîte comme terrain d'exploration. J'avais passé des heures sur les ordis de la fac, jamais à la maison, j'avais encore quelques neurones valables, merci, à compulser les blogs et les journaux gays pour évaluer mes options et décider de ma destination. Je connaissais parfaitement l'existence de la backroom mais à la base, je n'y avais pas tellement prêté attention. La Divine Comédie était le lieu parfait de sortie pour trois raisons: il était le plus éloigné possible de notre appartement au sud du quinzième arrondissement, nous n'avions, à ma connaissance, aucune relation dans ce secteur, et enfin il n'était pas en plein quartier gay. Si le pire se produisait et que je croisais une des connaissances de mon père, je pourrais toujours avoir recours au déni plausible et prétendre avoir révisé chez un camarade. Au pire, j'avouerais avec remord avoir bu un verre dans un des nombreux troquets du quartier, ce qui me vaudrait une paire de claques et une punition mais détournerait mon géniteur de la réalité. Car s'il la soupçonnait, me prendre quelques baffes serait bien le cadet de mes soucis...

Bref, dans mon programme pour perdre ma virginité j'avais planifié de me laisser draguer dans la boîte puis de suivre un mec mignon chez lui, afin de régler le problème une bonne fois pour toute. Je savais que ce n'était pas forcément très malin, voire carrément inconscient, mais je ne voyais pas trop quelles étaient mes autres alternatives. Avoir un petit-ami était impossible, bien trop risqué pour moi. Draguer pour trouver un plan-cul à la fac l'était tout autant, au vu de la manie flippante de mon père de m'y traquer comme un psychopathe. En gros, j'étais planqué dans un placard si profond que j'étais à deux doigts de débarquer à Narnia alors la Divine Comédie m'était apparu comme la solution parfaite à mon ennuyeux problème de frustration sexuelle. Mon meilleur ami Rémi, seul être vivant au courant de mon orientation, et ce depuis mes quatorze ans, avait tenté de me convaincre que coucher n'était pas une fin en soi et que je devais attendre le bon. Mais j'y voyais une bonne dose d'hypocrisie de sa part dans la mesure où lui se tapait des meufs depuis ses seize ans. Alors ouais, à dix-neuf ans et la tête pleine de fantasmes, j'avais pris le taureau par les cornes et j'avais suivi Dante aux enfers.

Les enfers s'étaient avérés assez désinhibants pour un garçon aussi sage que je l'étais. J'avais du paraître franchement crétin les premières minutes alors que je dévorais des yeux sans réussir à me réfréner les multiples hommes, pas toujours très habillés, qui parlaient, dansaient et s'embrassaient en toute liberté. C'est exactement ce que j'avais espéré trouver ce soir et ce que j'avais attendu depuis des années de dissimulation et de répression. Un lieu où j'allais enfin pouvoir être moi-même et me libérer de mon carcan.
Un lieu où me taper des gars bandants, aussi...

J'avais d'abord craint de faire un peu tâche dans cet environnement. Je ne m'étais jamais confronté aux regards d'autres mecs et je n'étais pas du tout certain d'être à la hauteur, surtout en examinant tous ces clubbeurs super bien foutus et sapés de folie sur la piste de danse. Rémi, que j'avais lourdement interrogé, avait décrété que j'étais mignon mais après tout il était hétéro, alors qu'en savait-il ?

La Divine Comédie - Oscar et Dante [MxM] (retrait pour édition Septembre 2024)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant