Shades of Blue - Face A

Chapitre 30 • The End of You

HARLEEN.
____________________

« I am just a broken record who can't read you anymore »
— Killing Corpse

Howie est parti. Mes yeux sont rivés sur la porte d'entrée qui vient de se refermer dans son dos, désirant le voir revenir. Qu'il me retienne. Seul bémol : j'ai déjà éprouvé cette sensation... Lorsque Mark m'a évincée de notre maison pas plus tard qu'hier.

Et, c'est lui que je m'apprête à retrouver après son appel qui, avouons-le, m'a soulagée. Il est ouvert au dialogue. J'ai peut-être une chance de sauver notre relation, au détriment d'une autre. À cette pensée, ma gorge se serre, tel l'étau qui se referme autour de moi. Je ne comprends plus rien.

C'est comme si Harleen avait disjoncté ! Les fusibles qui ont été remplacés ne sont pas du même ampérage que leurs prédécesseurs et je tente, tant bien que mal, de m'adapter au contexte. Sans grand étonnement, c'est un échec ! J'étais à deux doigts de recoucher avec Hayden. J'en avais envie. Ou besoin ?

Sur le chemin du retour, j'écoute en boucle Sunflower. Et, à ce moment-là, je ne sais plus ce qui me retient d'aller lui courir après. Il s'agit peut-être d'un signe de faiblesse, mais le mec m'a écrit une chanson, bordel ! Pas n'importe quel mec... Mon chanteur préféré, l'homme le plus gentil et brisé que j'ai pu croiser sur ma route. Celui qui a la capacité de rendre chaque jour inédit et intense.

Toutefois, j'ai conscience que la nouveauté a la fâcheuse tendance à nous amener à prendre des décisions irréfléchies. Soyons réalistes, je suis la reine de la spontanéité et, dans mon cas, cette caractéristique est loin d'être un atout !

Je me stationne à mon emplacement habituel et repère un véhicule familier garé devant le portail. En déviant le regard, je tombe sur ma meilleure amie qui progresse vers le perron. Avant qu'elle n'atteigne son but, je m'extirpe de ma voiture et me jette sur elle en la serrant fort contre moi.

    — Harleen ! Mais... laisse-moi respirer !

Elle s'agite pour se débarrasser de son pot de colle humain et je finis par la libérer en réfrénant mes sanglots. Ma débâcle interne est impossible à canaliser !

La présence de la rouquine est à la fois une bénédiction et une mise à mort. D'ailleurs, je devine à son expression qu'elle a saisi que quelque chose n'allait pas.

    — Pourquoi tu ne m'as pas rappelée ? Tu m'avais promis des explications, je t'en veux !

Malgré mon état, Izzy n'hésite pas à me remonter les bretelles. J'aurais réagi de la même façon à sa place.

Je foire sur tous les plans... Qu'ils soient amicaux ou romantiques, voire familiaux. Depuis quand n'ai-je pas vu ma sœur ou mes parents ? Mon monde ne gravite-t-il plus qu'autour d'Howie ?

    — Je sais, tu as le droit d'être en rogne contre moi. Je suis la pire des amies...

Elle opine exagérément, renforçant ma culpabilité.

    — On peut aller faire un tour ?

Izzy me lance une œillade étrange en haussant un sourcil.

    — Ce ne serait pas mieux de se poser au chaud dans ta baraque ?

    — Non, je préfère me geler les miches plutôt que de rentrer là-dedans. Tu comprendras vite pourquoi.

    — Tu me fous les jetons, Harleen... Qu'est-ce que tu as fait ? Tu as tué le clodo et tu cherches un moyen de cacher le corps ? Un alibi ?

On a vraiment un humour particulier... Et cette sale habitude de dissimuler nos craintes derrière des railleries grotesques. Comment les gens nous supportent au quotidien ?