Vagues

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   La violence des vagues projetait son corps comme un fétu sur les roches acérées. Les dents serrées, Fiollya luttait du mieux qu'elle pouvait pour ne pas se faire engloutir par les flots.

   Son cœur, quant à lui, était transpercé de mille éclats de douleur. Les souvenirs qui revenaient dans son crâne par vagues heurtaient son esprit, manquant de lui faire lâcher prise de son frêle rocher auquel elle s'accrochait désespérément.

   Elle ne savait même plus pour quelle raison elle continuait de lutter, de se battre pour sa vie. Elle venait de perdre sa seule raison d'exister.

   Elle était partie, s'enfonçant dans les flots avec un sourire mesquin, comme si rien de tout ce qu'elles avaient vécu ensemble n'avait existé. Elle s'était éclipsée sans un bruit, mais elle avait fait naître un chaos innommable dans les sentiments de Fiollya. 

Elle se demandait sans cesse ce qu’elle avait bien pu faire pour qu’elle parte avec une autre, comme si leur histoire n’était qu’une pauvre algue échouée sur le sable fin. Avait-elle commis une erreur irréparable, une chose qui avait fait qu’elle se sente obligée de partir sans une seule explication ? C’était certainement de sa faute si cette relation avait échouée, si elle avait glissé un collier de fines perles à une autre femme, Fiollya en était certaine.

   Cette dernière ne savait plus quoi faire. Elle était détruite, perdue et désemparée sur ce rivage qui marquait la frontière entre les mondes. Si elle revenait chez elle, dans sa verte forêt aux arbres centenaires, sa famille lui reprocherait d'être partie pour une cause perdue. Leur séparation s'était faite dans les larmes et la colère, et même si elle désirait ardemment revoir son petit frère, elle savait que l'accueil serait glacial. Après tout, tous lui avaient dit que les sirènes n'étaient pas dignes de confiance et qu'elle faisait une énorme erreur en abandonnant tout pour elle.

   Elle ne pouvait pas non plus rester ici, dans l'eau, sur son territoire. Tout ce qui passait devant ses yeux lui rappelait la femme qu'elle avait aimée, que ce soit les vagues où elles naviguaient ensemble auparavant ou bien le sable fin empli de secrets.

   De plus, sa famille ne l'avait acceptée que grâce à elle, et maintenant que celle-ci ne lui accordait plus aucune importance, elle se ferait assurément rejeter.

   Cette dernière pensée fit exploser la douleur dans son cœur telle une boule de feu incandescente, qui dévorait tout sur son passage. Ses pleurs reprirent de plus belle, mais rien n’y faisait, les larmes n'éteignaient pas les flammes de sa détresse. 

   Lâcher prise. Sa plus grande envie était de lâcher prise. Ne plus lutter contre les vagues, se faire projeter contre les rochers et devenir un énième cadavre qui nourrirait les poissons. Quelle idée plaisante pour Fiollya. Son cœur brisé mettrait peut-être un peu de temps avant de s'éteindre, les elfes possédaient un corps plutôt résistant. Mais une fois ceci fait, elle n'aurait plus à souffrir. 

   Il lui suffisait juste de lâcher prise, tout oublier et se noyer dans sa douleur.

   Son corps crispé refusa tout d'abord d'obéir à ses injonctions. Mais elle finit par retrouver le contrôle de ses membres, ferma les yeux et poussa un long sourire. Sa prochaine respiration fut engloutie par la mer déchaînée qui dévora goulûment ce corps à l'âme brisée.

***

Bonjour ! Me revoilà pour un nouveau texte. Il a été écrit dans un contexte similaire au précédent. Sur le serveur Discord, le défi du jour #26 était d'écrire une histoire à partir d'une image, celle-ci représentant une femme accrochée à un rocher. Il n'y a pas d'univers autour, c'est juste une scène qui est venue comme ça et je ne compte pas continuer à écrire avec ces personnages (plutôt logique, Fiollya est morte.)
Bonne journée et merci de votre lecture !

Comètes De MotsWhere stories live. Discover now