Chapitre 6

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Lorsque je me posai sur le sol, un souffle de rage tourbillonna dans mon estomac. Les Enfants Perdus étaient déjà entrain de sommeiller paisiblement, pendant que cherchais Jeanne sans résultats concluant. Furieux, je leur ordonnai de se lever en les cognant contre un arbre à distance grâce à la magie, ou en les frappant de mon propre pied.

- Désolé, Peter, s'excusa Will. On voulait t'attendre, mais tu ne revenais pas alors on a dîné pour s'occuper et on s'est endormis.

- Oh, je vois. Pourquoi vous ai-je réveillé ainsi ? Tu as raison, j'aurais dû rentrer plus tôt. Vous deviez mourir de faim, affirmai-je d'une voix mielleuse.

- On se doutait pas que tu allais comprendre.

- Évidemment que non, sombre crétin ! criai-je. Retrouvez-moi Jeanne immédiatement ou je vous bannis à jamais du Pays Imaginaire !

Affolés et craintifs de ma colère, ils s'agitèrent et formèrent des binômes avant de partir en expédition dans la forêt. Clochette, qui scintillait toujours dans les parages pour rester auprès de moi, attendit elle aussi mes ordres.

- Tu sais quoi faire.

Elle hocha la tête et alla au Jardin des Fées pour mettre au courant les créatures ailées de la disparition de Jeanne. Enfin, pour avoir toutes les chances de mon côté, j'invoquai mon ombre. À ma plus grande surprise, elle n'apparut pas. Alors, je tentai de m'envoler pour la retrouver, mais mes pieds restèrent fixés au sol mon corps ne décolla pas, aspiré par la force de la gravité. Levant les bras, j'essayais tant bien que mal d'atteindre le ciel couvert de sombres nuages obscurs, mais j'avais sûrement l'air d'un pauvre lutin entrain de sautiller.

- Tu as l'air en difficulté, Peter Pan, intervint la voix grave du Chef indien.

- Pas du tout, je pratique de l'exercice. Votre peuple doit savoir que ça renforce le cœur, argumentai-je.

- Tu n'as pas de cœur.

Je tournai vivement la tête, convaincu qu'il mentait, je sentais d'ailleurs mon organe vital se compresser chaque fois que je pensais que Jeanne était en danger.

- Vous savez tout comme moi que je l'aime, dis-je en faisant allusion à la Fille Perdue.

- C'est faux, désapprouva-t-il. Tu aimes Wendy. Et tu l'aimeras toujours. C'est ainsi que tu gelas l'île toute entière tant ton cœur était froid. Tu sais que si la nature fournissait un remède contre cette douleur atroce, je te l'aurais offert. Mais tu as brûlé nos maisons car ton cœur était en cendres d'amour. Et tu as détruit nos vies car il était brisé. Tu crois que le remède est Jeanne, mais il n'en est rien.

Je le regardai, sans réaliser à quel point ses paroles percutaient mon cœur de plein fouet tant il m'était douloureux de comprendre que seule la vérité sortait de sa bouche.

- Je peux m'attacher à elle et oublier Wendy, dis-je d'un ton qui se voulait assurant, mais en vain, j'entendis ma voix trembler tandis que ma gorge sèche se nouait.

- Qui essayes-tu de convaincre, Peter Pan ?

Je baissai les armes, me laissant tomber au sol, replié sur moi-même.

- Vous avez raison, je ne sais plus. Je suis entrain de perdre ma magie, même mon ombre ne me répond plus.

Dans mon désespoir, j'entendis la voix grave du chef qui ricana. Persuadé qu'il se réjouissait de me savoir aussi vulnérable sans magie, je ne pris pas la peine de riposter.

- Tu dois savoir, Peter Pan, que la nature humaine est mauvaise, tu es l'exemple même.

Peut-être attendait-il que je réagisse, mais je n'en fis rien, bien trop inquiet au sujet de Jeanne.

Peter Pan et la Fille PerdueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant