Chapitre 22

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"Si l'amour pouvait sauver, tu serais immortel."

- Elsa Stucki

Devant le large bureau de la directrice, j'observe avec intérêt les différents objets soigneusement entreposés et polis qui n'ont pas bougé depuis ces longues années. Un balai, une boule de cristal, des baguettes en tout genre et également une photo d'un homme qui m'est totalement inconnu dont je me souviens clairement avoir remarqué durant mes nombreuses convocations.

Mais c'est quand mon regard dévie sur les larges cadres en chêne que je laisse la nostalgie m'envahir. Découvrir le souvenir de Dumbledore, les mains croisées et le visage serein magnifiquement représenté au centre d'une pièce qui me fait faiblement penser à la salle commune, inscrit en moi un pincement douloureux. Comme moi, ses yeux me détaillent avec attention et, d'abord dans un long silence, c'est lui qui le brise en premier.

"Tu as bien grandi, se meut les lèvres cachées par la longues barbes du vieux."

Mon regard se brouille instantanément, le cœur battant de culpabilité.

"Quant à vous, vous n'avez pas changé, je souffle d'ironie.
- Oh, c'est l'avantage d'être une peinture incroyable. À moi la vie éternelle. Quoi que, peut-être aurai-je préféré qu'on me peigne un habit rouge, j'ai toujours aimé le rouge. Il me semble que c'est aussi ta couleur préférée ?"

Je lâche un faible rire nerveux face à son intérêt et je dois baisser le regard pour ne pas fondre en larmes.

"Oui, je réponds la lèvre tremblante, incapable de balayer le fait que malgré sa présence, le corps de cet homme repose au sein d'une tombe bien froide et sûrement sombre. Pardonnez-moi, je finis par dire, craquant à ce désarroi qui me dévore.
- Te pardonnez quoi ? il ajoute, détaché et, paternel.
- De vous avoir exclu de la vie d'Harry. De vous avoir exclu de la vie de tout le monde... Peut-être qu'il n'aurait pas autant souffert si...
- Voyons. Tu penses toujours que le monde te déteste pour tes erreurs cependant, regarde-toi. Fils d'une famille de Mangemorts qui a pactisée avec les ténèbres. Regarde qui tu es aujourd'hui. Je pense que tu n'as pas si mal tourné.
- Je ne suis pas celui que vous espériez... j'ajoute, apposant mes doigts sur mes paupières.
- Bien au contraire. J'ai cru en toi. Harry Potter a cru en toi. Et aujourd'hui, tu enseignes ton savoir et ta force. Il serait temps que toi aussi, tu commences à croire en toi.
- J'ai fait tant de mal...
- Il faut parfois subir de lourdes épreuves afin d'atteindre la lumière.
- Je suis d'accord avec lui, ajoute sans prévenir la nouvelle directrice de l'école, sagement placée derrière moi.
- Bonjour, Minerva, répond le vieil homme.
- Bonjour, Albus."

Dans un sursaut, je m'étais tourné vers elle, balayant d'un revers rapide les larmes qui avaient pu m'échapper.

"Vous me cherchiez, Monsieur Malfoy."

Sans voix, je regarde à nouveau vers le tableau dont le personnage envahissant normalement la toile s'était soudainement éclipsé.

"Il a toujours eu la politesse de ne pas écouter aux portes."

D'un pas gracile, elle glisse jusqu'à la marche menant à son siège de directrice. Sans même s'assoir, la Mage se tourne et me fait face, l'air réconfortant apposé sur son visage déjà alourdi par les lourdes responsabilités qui planent au-dessus d'elle.

"Que me vaut votre venue ? N'étiez-vous pas encore sous soins?"

Je ne l'écoute plus, déjà envahit par tout ce que je pourrais dire. Tout ce que que je pourrai faire.

Au fond, je sais exactement pourquoi je suis ici.

Ce ne fut d'abord qu'une idée.

Puis, une pensée recurrente.

Mais aujourd'hui s'en est devenu une certitude.

Je repense au cou du brun, sévèrement marqué et à sa colère, elle aussi, sévère.

Closant un instant mes yeux, j'encourage mon être intérieure et lui murmure qu'effectivement, je prends la bonne décision.

"Je viens, Madame, vous donner ma démission."

Surprise par la nouvelle, elle en reste statufiée comme prise de court mais, les yeux rivés sur la table en frêne, elle finit par inspirer.

Je la coupe, le stress grondant déjà mes jambes :

"Je compte évidemment rester jusqu'à la fin de l'année, je ne voudrais pas qu'un manque de professeur devienne un problème. Mais, il fallait quand même que je vous avertisse assez rapidement afin que vous puissiez vous organiser..."

Je baisse le regard tandis qu'elle m'observe de ses pupilles océan, attentive et le sourcil levé.

"Et bien, Monsieur Malfoy, commence-t-elle, encore prise de la nouvelle. Vous êtes un très bon professeur, de plus, beaucoup d'élèves aiment votre compagnie. Un mage tel que vous. Ce serait dommage de vous perdre.
- Madame, je réponds plus sèchement que je ne l'aurais voulu. J'ai l'impression que parfois, les gens oublient que rien n'est normal. Pour vous, 9 ans se sont écoulés. Le monde a continué de tourner et de mûrir tandis que moi, je ne suis encore qu'un adolescent. Si vous avez la sensation que mon corps me donne vers la trentaine, mon dernier procès s'est passé il n'y a seulement quelques mois... Je... Je ne veux pas vous insulter... Mais vous avez oublié que je n'ai pas passé mon diplôme... Je n'ai pas eu d'expérience professionnel... Je ne suis qu'un adolescents de 20 ans, qui vient tout juste de perdre ses parents. Qui vient d'échapper à une justice lui offrant la mort. De plus, le destin semble trouvez un malin plaisir à s'amuser avec moi."

Mes poings s'étaient serrés de culpabilité, comme si je n'avais pas droit de me plaindre sachant qu'une deuxième chance de vie m'était offerte.

Je fixe le sol, à deux doigts d'à nouveau me laisser aller.

"Monsieur Malfoy. Je n'ai en rien oublié qui vous êtes. Et c'est bien pour ça que je vous ai offert le post de professeur des potions."

Je relève le regard, surpris, tandis qu'elle sourit.

"En apprenant que vous étiez entre les griffes du Ministère et, en vie, ce fut normal de devoir vous tirez rapidement de là et il m'a paru certaine de vous voir en tant que professeur. Sevrus ainsi que le Monsieur Slughorn n'ont pas cessé de vanter vos mérites durant votre scolarité. Ne vous méprenez pas, vous savoir vivant n'était pas l'occasion d'avoir un employé en plus malgré que vous soyez compétent, mais bien de ne plus vous voir avec ces vipères.
- Vous souhaitiez m'aider ?
- Évidemment. Certes, dans un contexte tel que celui-ci, c'est difficile de vous voir aussi esseulé et aussi perdu. Cependant, vous avez mûri vous aussi."

J'inspire, avalant ses mots comme un baume au cœur.

"Je prend note de votre démission et je suis sûre que vous saurez vous diriger avec grand soin."

Je laisse un sourire couler sur mon visage. Le poids installé sur mes épaules s'allège quelque peu, me permettant de faire demi-tour, rassuré sur ce plan.

"Oh, et, Monsieur Malfoy."

Je pivote vers la Mage, droite et impressionnante.

"Évitez de voler dans l'enceinte du château. J'ai installé des sortilèges coriace.
- Vous nous avez vus ? je réponds, me rappelant de ma course effrénée avec le Gryffon sur nos balais.
- Évidemment. Il n'y que vous deux pour semer une telle pagaille."

¤

Apposée dans la cheminée du bureau d'Harry Potter, je fixe la boîte enfermant les gélules empoisonnées et vient la frôler de ma baguette, allumant un feu. Refusant d'en reprendre en vue des événements, j'en reste pour le moins en manque dans certaines situations. Pourquoi ne me laisse-t-on pas en paix ? N'ai-je pas assez subi ?

Enfilant mon manteau, je sens malgré moi toute la rage glisser le long de ma gorge, le serrant. Le Ministère m'a fait faire tant de mal. Et aujourd'hui, je dois lui refaire face.

"Tu es prêt, me demande Harry, le regard noir et le cou encore marqué de mon acte ignoble.
- Plus que prêt, je grogne tandis qu'il  me tend son bras pour transplaner."

Antidote - Drarry [Tome 2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant