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J'avais découvert le surf à cinq ans, sur la plage de Biscarosse. Le moniteur s'appelait Marco. Dans ma tête d'enfant, il était un adulte à part entière, il n'avait certainement pas plus de dix-neuf ans. Je me souvenais encore de la forme de son torse dans sa combinaison noire. J'aurais pu dessiner son visage les yeux fermés. Combien de mes nuits avait-il habité sans que je ne comprenne la portée de ces pensées ?

L'enfant étrange et solitaire que j'étais avait proposé à Ethan, pour ses quinze ans, de venir les célébrer dans la maison de famille de ma mère. Nous avions pris le train depuis Paris, seuls et nous avions passés deux jours seuls avant que ma mère n'arrive à son tour. Sans aucun doute, les deux plus beaux jours de ma vie. Je lui avais fait découvrir le surf et nous 'n'avions pas arrêté, tant qu'il faisait jour. Je m'étais gorgé de cette image de lui que je voyais pour la première fois, de son corps dans toute sa splendeur qu'il m'offrait à moi seul. J'avais quinze ans, j'étais avec mon meilleur ami et j'aurais voulu que les choses ne s'arrêtent jamais. J'avais cru qu'enfin je pouvais devenir la personne que je voulais être.

Cet été-là, il avait surfé pour la première fois et s'était blessé. Son pied sur une pierre cachée, qui l'avait entaillé. Il avait ensanglanté le sable sur les quelques mètres qu'il avait parcouru avant de s'effondrer. J'avais couru derrière lui, attrapant son pied pour voir les dégâts, le croyant gravement blessé. J'avais découvert une entaille à peine profonde alors qu'il battait le sol de ses poings.

« Mais quel bébé ! avais-je ri. »

Il s'était vexé, avait ramené son pied à lui pour admirer sa blessure.

« On voit que ce n'est pas toi qui es blessé ! miaula-t-il de douleur. »

J'avais récupéré des compresses et de quoi le désinfecter dans la maison avant de revenir à lui, toujours en courant. Mon cœur s'était serré en le voyant retenir des larmes qui lui semblaient douloureuses. Il ne saignait déjà plus quand je nettoyai sa plaie.

Je m'étais penché vers lui, écartant mes cheveux pour lui révéler une cicatrice derrière mon oreille, au-dessus de ma nuque.

« Je me suis fracassé le crâne quand j'étais gamin. J'en ai perdu la vue de l'œil gauche pendant deux jours. »

Ses doigts avaient à leur tour repoussé mes mèches, remplacé les miens, pour venir effleurer la boursouflure qui serpentait mon crâne. Je l'avais laissé caresser ma tête, tirer doucement sur mes cheveux pour que ma tête s'incline un peu plus. J'avais laissé ses doigts tomber sur ma pommette, dégringoler sur mes lèvres. J'avais mordu le bout de son index sans le lâcher des yeux. J'avais penché mon visage sous le sien ; sans rien dire. Ma tête et mon cœur savaient que c'était une erreur, que si je le laissais m'embrasser, plus rien ne serait pareil entre nous. Et si mon esprit m'avait cri si fort de tout faire cesser, mon cœur s'était emballé avec force en goutant sa bouche brûlante.

Ce fut la seule et unique fois. Le seul baiser que nous échangeâmes, comme si lui et savions que nous ne pouvions pas, que nous ne pouvions pas nous compliquer plus les choses. Mais rien n'avait jamais plus été pareil. Nous n'en avions pas reparlé des vacances, et à notre retour, était arrivée Lola.

Le dernier arrêtWhere stories live. Discover now