Chapitre 3 - L'Horizon des Evénements

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Je m'éveillai dans une vaste pièce blanche où les lits étaient isolés par des cloisons de verre dépoli. Je n'étais plus sur une table d'examen mais dans un lit confortable et les bruits feutrés et les chuchotements autour de moi avaient quelque chose d'apaisant. Je me souvenais de presque tout maintenant. L'annonce de l'éruption de l'étoile, les heures d'angoisse qui l'avaient précédée, les préparatifs inutiles, le regard braqué vers la boule de feu qui semblait vouloir nous incinérer. Je me souvenais de la voix du spécialiste à la radio, la façon grave dont il avait dit les mots « catastrophe sans précédent », et « notre survie n'est pas certaine ». Je me rappelais quand il avait dit « je recommande à chacun de rester avec ses proches ».

Je me souvenais du transmetteur de mon père qui ne répondait pas. Il était avec les autres mineurs, il était avec ses proches et je n'en faisais pas partie.

Quelqu'un apparut soudain derrière le panneau de mon box.

― Bonjour Seo ! me salua la voix connue d'Opsoei.

J'écarquillai les yeux, et dévisageai l'inconnu. La veille, quand il s'était occupé de moi, la lumière était tamisée pour ne pas m'éblouir et j'avais encore la vue floue et l'esprit égaré. À présent, je le voyais parfaitement. Sa peau était d'une texture veloutée aux reflets violets, il avait des yeux fins en amande, ses iris étaient deux orbes améthyste cerclés d'une bordure noire et percés d'une pupille en forme d'étoile aux pointes irrégulières qui s'agrandissaient ou s'étrécissaient en fonction de la lumière. Ses cheveux indigo semblaient avoir la texture de douces plumes et son sourire était plein de chaleur.

Il n'y avait que des humains sur Sénéry, c'était la première fois que je voyais de mes yeux une autre espèce que la mienne.

D'autres choses me revinrent.

La manière dont il m'avait caressé, le contact de ses doigts sur mon intimité, ses mots de réconfort juste avant de m'introduire l'espèce de petite sphère. Je me sentis rougir jusqu'à la racine des cheveux.

― Eh bien ? Tu ne me reconnais pas ?

― Si... Si, pardon, je suis encore un peu déphasé. Bonjour Opsoei. Combien de temps est-ce que j'ai dormi ?

― Quatorze heures ! Bien plus que la durée d'effet du somnifère. Tu étais épuisé. Comment est-ce que tu te sens ?

― J'ai l'impression que ça va.

― Tes yeux ?

― Aucune douleur, et ma vue est complètement revenue.

― Bien. Tu as mal quelque part ?

― J'ai de légères courbatures.

― Mh. Je ne pense pas que ce soit un effet du voyage en caisson, ça a plutôt tendance à ramollir les muscles quand le trajet se prolonge plusieurs années. À mon avis, ça vient plutôt du traitement.

Du traitement ? Ah oui. Oh...

Il souleva la couverture blanche qui me recouvrait et sous laquelle j'étais entièrement nu, et la repoussa jusqu'à mes genoux.

Je me crispai.

― La pudeur, ça ne vous dit rien, hein ?

Il rit et m'adressa un regard pétillant.

― Excuse-moi, je n'ai pas l'habitude des mœurs de ta société, je n'ai jamais travaillé avec un humain qui n'appartienne pas à l'Intelligence. Mais je peux te promettre que je ne te veux aucun mal. Et nos méthodes sont approuvées par l'Intelligence, donc elles fonctionnent. Tu peux me faire confiance.

Et avec douceur, ses mains se posèrent sur mon ventre. Il me palpa doucement.

― Où sont tes contractures ?

IntricationWhere stories live. Discover now