Les camélias

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      Yuga était parti depuis deux semaines et je ne m'étais pas effondré comme je le pensais. J'évoluais réellement auprès de lui. Je me rendais compte que, peut-être, je pouvais vivre sans avoir toujours besoin de quelqu'un. Je commençais à développer une certaine confiance en moi que je n'imaginais pas avoir.

       Ce soir, j'allais essayer de me socialiser encore davantage. Shoto organisait un repas chez lui. Il y avait les filles, le frère du bicolore et son copain, Hanta et des amis à lui. Je connaissais plus de la moitié des invités ce qui me rassurait.

       J'étais d'ailleurs en retard. J'avais passé du temps à échanger avec ma mère et mon beau-père au téléphone. Elle stressait particulièrement pour moi, depuis tout petit et encore davantage depuis mon burn-out. Je me questionnais peu, sûr d'où venait ce trait de caractère chez moi.

      En ce moment, je m'interrogeais beaucoup sur moi-même, mes caractéristiques, mes choix et sur ma vie. Les propos de Yuga me revenaient régulièrement en tête : vivre pour moi. Il voulait dire quoi par-là ? Vivre pour soi, c'était savoir ce qu'on souhaitait, non ? Mais pour ça, je devais découvrir qui j'étais vraiment. Quels désirs m'habitaient ? Je ne m'étais jamais posé réellement la question auparavant. Quels pouvaient être mes goûts, mes valeurs ? Je m'assimilais toujours au modèle de mes parents ou/et de la société.

       Je m'interrogeais désormais. Je me lançais à corps perdu dans cette quête identitaire. Je tentais d'y tracer les contours, les limites. On parlait bien de la crise d'adolescence ou celle de la quarantaine. Il devait y avoir un truc à 30 ans aussi. Mes pensées furent coupées par la vibration de mon téléphone. Un message de mon meilleur ami apparaissait sur l'écran.

« Où es-tu ? Toya va me rendre chèvre ! »

« Sur le parking, j'arrive »

      À peine descendu de ma voiture, la porte de la maison s'ouvrit sur un homme athlétique à la chevelure carmin.

- Izu, enfin te voilà !

       Je m'avançais le plus rapidement possible vers cet homme. Mon pied frôlait seulement le perron qu'il m'avait pris dans ses bras. Je restais captivé par ses yeux turquoise. Il me rappelait la douceur de Yuga.

- Toya, on s'est vu la semaine dernière.

- Oui, mais tu t'occupes que de Sho.

       Le jeune homme frottait son visage contre mon crâne comme un chien content de retrouver son maître. Cette étreinte fraternelle m'apaisait. Je sentais mes épaules se relâcher. Je n'avais pas remarqué jusqu'à présent que je me contractais autant, à la simple perspective de cette soirée. Je soupirais doucement. Finalement, on ne changeait pas si facilement.

       Toya Todoroki était le grand frère de Shoto. Il se montrait très présent pour moi. Il trouvait toujours une façon de m'apaiser. On connaît tous des personnes qui savent manier les mots et moi dans ma vie cette personne, c'était Toya. Son copain, Keigo Takami, n'était d'ailleurs pas en reste dans ce domaine.

       Ils se correspondaient si bien. Keigo tout aussi adorable que Toya, mais je le qualifierais plutôt comme ayant une main de fer dans un gant de velours. Il paraissait doux au premier abord, mais il ne fallait pas s'y fier. D'ailleurs, Keigo, le seul blond qui ne m'avait jamais fait craquer. Leur amour paraissait tellement évident que je n'envisageais même pas Keigo avec quelqu'un d'autre que Toya.

       J'échangeais pendant des heures avec eux sur le fait de s'accepter en tant qu'homme qui aime d'autres hommes. Ils écoutaient toujours d'une oreille attentive. Cette attention singulière s'accentuait depuis que je revenais du fond du gouffre. Toya se montrait particulièrement tactile et très démonstratif, tel un grand frère protecteur. Je dirais même parfois un chien qui s'occupe de sa portée. Il pouvait avoir tendance à m'infantiliser et dans ce cas Keigo ne se trouvait jamais loin.

Le temps des fleursWhere stories live. Discover now