Les hortensias

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       Après ce week-end particulièrement horrible, je ne m'étais pas rendu au travail. J'avais simplement envoyé un SMS à Shoto ce matin. Je ne répondais à aucun appel ni au coup donné à la porte. Ce lundi soir, j'arrivais chez ma psychologue le visage bouffi et des cernes grandes comme des soucoupes.

        J'avais commencé un suivi avec elle, il y a désormais deux ans. En plein burn-out, on se voyait plusieurs fois par semaine, puis de façon hebdomadaire, enfin quelques mois plus tard tous les 15 jours. Maintenant, je venais de manière mensuelle et pour juin, c'était donc aujourd'hui. Ça tombait bien je me sentais au bout du rouleau.

       J'attendais seulement quelques secondes avant qu'elle ne me fasse entrer dans son bureau. Je laissais mon regard vagabonder dans cette pièce aux tons jaune et vert. Les quelques meubles étaient en chêne vernis. Mes émeraudes s'attardaient sur le bonzaï qui prenait place sur le bureau dans un coin de la pièce. On n'allait jamais à cet endroit. J'étais soulagé de ne pas être dans un climat si formel. Mes pas me conduisaient désormais au centre de la pièce, où se trouvait une table ronde avec divers fauteuils autour. Il y avait quelques jeux pour les enfants sur le côté. Je trouvais cet endroit particulièrement reposant. Ça sentait toujours la pêche et l'odeur particulière du cuir.

      Après de brèves salutations, je m'affalais dans un des fauteuils du cabinet. Je m'asseyais toujours à la même place. Toru Hagakure, ma psychologue s'installait constamment face à moi. La table nous séparait. Je la regardais, régulièrement, noter des éléments son calepin violet. Notre routine était bien huilée.

      Elle me détaillait quelques secondes de ses grands yeux marron et ses longs cils touffus. Elle prenait la parole en me souriant gentiment.

- Vous voulez me dire comment vous vous sentez aujourd'hui.

        Je réfléchissais sérieusement à sa question. Je me sentais comment ? Mal, fatigué, à bout. Néanmoins, je savais déjà qu'elle voudrait plus de détails alors je m'interrogeais réellement.

- Je me sens à la fois triste et en colère.

- Est-ce que vous savez pourquoi ?

- J'ai fait des choses qui on ruinait un couple. Je ne pourrais plus jamais revoir des personnes que j'aimais beaucoup.

- D'accord, est-ce que vous voulez m'en parler davantage ?

       Après quelques secondes pour mettre en mots, je racontais donc cette fin de semaine : le départ de Yuga, la séance piscine, la présence des Todoroki et de Keigo. Je relevais doucement mon regard pour rencontrer celui de Mme Hagakure. Elle notait quelques éléments sur son carnet et me souriait délicatement.

- Il s'est passé beaucoup de choses dans ce week-end. On va essayer de décortiquer un peu, si vous voulez bien.

     Après un hochement de tête de ma part, elle reprenait la parole.

- Comment vous sentiez vous après la conversation avec monsieur Aoyama ?

- Soulager. Je savais au fond de moi qu'on était plus des amis proches qu'un couple. Je me sentais heureux qu'il fasse le premier pas pour arrêter cette relation. J'avais peur de le perdre alors j'étais apaisé que tous se passent bien.

- D'accord. Et ce temps à la piscine ? Comment vous sentiez vous ?

- Triste, perdu, coupable.

- O.K. ça c'est que vous ressentez maintenant. Avez-vous ressenti la même chose, pendant ?

        Depuis mon départ précipité, je ne m'étais pas réellement questionné sur ce que j'avais éprouvé auprès d'eux sur le moment.

Le temps des fleursWhere stories live. Discover now