Inès (la bête)
— Abel, je crois que vous allez devoir me supporter ! je prononce avant même de voir qu'il est en très bonne compagnie. Marraine, que faites-vous encore ici ?
— Je disais bonjour à mon filleul, que je ne vois pas beaucoup ces temps-ci !
— Votre filleul ?
— Oui, ma chérie, tu n'es pas sans savoir que j'en avais un !
Bien sûr, que je savais que Rosa était également la marraine d'une autre personne, même si elle n'est pas vraiment la mienne, du moins pas aux yeux de l'église, mais de mon cœur oui, mais j'étais loin de me douter qu'elle était celle d'Abel... Je sais qu'elle considère, ma sœur et moi, comme ces propres filles. Elle n'a jamais eu d'enfants, son plus grand regret. Elle ne sait jamais mariée non plus, mais cela a été son choix, car elle a eu de nombreux amants. Comme elle aime le dire, elle a épousé son travail, son restaurant, la cuisine, sa passion ! Elle est persuadée que jamais elle n'aurait fait cette carrière, si elle s'était mariée.
— Vos mères et moi, on était très proches et très soudées. Et quand elles m'ont demandé de veiller sur vous, je n'ai pas pu refuser ! Vous êtes comme mes enfants !
Alors, quand elle me parlait de son filleul insupportable mais très attendrissant et au cœur d'ange, il s'agissait en réalité du fils Faro. Comment j'ai pu passer à côté de ça ? J'aurais dû être un peu plus curieuse, mais j'étais persuadée de ne pas connaître cette personne de qui elle me causait tant.
— Je suis très surprise de voir mon filleul ici, près à aider les plus démunis... poursuit Rosa avant de m'apprendre des choses que j'ignorais : Pas qu'il n'a pas la main sur le cœur, car quand il s'agit de faire un chèque pour les personnes en besoin, il répond toujours présent, mais car il n'est pas du genre à se salir les mains pour les autres, à part quand il cuisine dans mon restaurant.
Abel Faro cuisine ? S'il y a bien un truc, que je ne me doutais pas le concernant, c'était bien le faite qu'il aime être derrière les fourneaux. J'aurais bien voulu le voir à l'œuvre, mais dommage pour moi, le cuisinier de l'association n'a pas besoin de renfort aujourd'hui. Il vient de m'attester que tout était entre de bonnes mains. Donc, il va me falloir attendre une autre opportunité, afin de voir monsieur le prétentieux, viril et aux gros muscles devant un plan de travail...
— C'est bon, assez parlé de moi ! réplique Abel, n'aimant pas être le centre du monde. Que fais-tu là ? s'adresse t-il à sa marraine. Je ne pensais pas te rencontrer ici, hors de ton restaurant ?
— Moi aussi, j'ai mes petits secrets ! lui sourit-elle, sans entrer dans les détails.
Secret, qui n'en est pas un pour moi. Elle apporte une fois par mois à l'association, les desserts qu'elle fait elle-même pour l'occasion. Et en plus d'être une excellente cuisinière, elle est également une remarquable pâtissière. Tous les adhérents sont ravis de goûter à ses délicieuses créations, et moi, je ne fais pas exception.
— Bon, ce n'est pas que je m'ennuie, mais il faut que j'ouvre mon restaurant. Passez me voir à l'occasion ? Je serais ravie de vous avoir tous les deux à ma table !
Elle m'embrasse et au moment de dire au revoir à Abel, elle lui murmure quelque chose à l'oreille à peine inaudible.
— Elle aurait été certainement d'accord ! Elle se doutait un peu qu'il existait un truc entre vous...
De qui elle parle ? Il aurait quelqu'un dans sa vie ? Elle pourrait parler un peu plus fort, car j'ai beaucoup de mal à entendre la suite, en faite, je ne perçois plus rien de ce qu'elle lui dit. Je sais que ce n'est pas bien d'écouter, mais c'est plus fort que moi, ma curiosité prenant le dessus.
— Allez les enfants, je vous laisse ! Prenez soin de vous ! finit-elle par partir me laissant un peu déboussolée.
— Bye !
***
— Coucou ! me surprend par derrière ma petite sœur chérie, alors que je m'apprêtais à déposer un énorme plateau d'entrées sur le devant de la table afin que toutes les personnes y aient accès.
— Que fais-tu ici ?
Je ne m'attendais pas à elle aujourd'hui. D'ailleurs, c'est étrange ! Elle est sortie hier soir, et est entrée à point d'heure ce matin. Comment fait-elle pour être aussi en forme à cette heure-ci ?
— Je suis venue te donner un coup de main !
Mais bien sûr ! Je ne suis pas née de la dernière pluie. Elle me prend pour qui ? Elle est présente car elle a su que c'était le jour des gâteaux, ou bien c'est mon père qui l'envoie... Mais j'opte pour le sucré ! Elle n'a jamais su résister à une petite gâterie, surtout si ça vient de Rosa. Le mois dernier, elle m'a fait tout un scandale, car je ne lui avais pas apporté la gourmandise tant espérée. Il faut dire qu'il n'en restait aucune au moment de mon départ, tout avait été mangé.
— Dis plutôt que ta présence ici, est due aux pâtisseries de Rosa ?
A sa mimique, j'en conclu que ce n'est pas ça ! Elle ignorait que c'était le jour des pâtisseries de ma marraine. Mais alors, pourquoi est-elle venue ? Elle n'est pas du genre à écourter son sommeil pour aider à l'association... Non, elle, c'est plus repos que travail, surtout le week-end.
— Je ne vais pas le nier ! Quoi ? Ne fais pas cette tête ! Tu sais que je suis une gourmande !
— Oui, autant que moi ! Mais tu ne peux rien me cacher, je te rappelle ! Tu n'es pas ici pour les moelleux au chocolat, alors je t'écoute ?
— Je ne peux plus venir t'aider, sans être assaillie de questions ? Ok, tu as gagné ! C'est bientôt Noël, et j'ai voulu obtenir tes bonnes grâces.
Elle se fout de moi ! Elle sait que quoiqu'elle fasse, elle est certaine d'avoir ce qu'elle veut de moi. Alors ça ne marche pas ! Elle peut trouver toutes les excuses bidons qu'elle souhaite, rien ne fonctionnera ! Je ne suis pas dupe, et surtout je la connais, je sais quand elle me ment.
— Liliana ? Quelle surprise de te voir ! apparaît Abel avec un autre plateau plein de mignardises.
Aujourd'hui, on fête Noël avant l'heure. Beaucoup de personnes a tenu à participer, chacun à sa manière, certains ont apporté des salades, des boissons, des chocolats, d'autres des petits cadeaux pour les enfants... C'est l'occasion de se faire plaisir tous ensemble autour d'un bon déjeuner.
Lili ne quitte pas des yeux Abel. On croirait même qu'elle a vu un fantôme !
— Où dois-je poser tout ça ? me demande celui que fixe ma sœur sans cligner des yeux.
— Au centre de la pièce, je lui montre une table qui trône en plein milieu.
Alors qu'il s'exécute, je m'approche de ma sœur pour lui demander des explications :
— Je peux savoir ce qui te prend ?
— Je ne voulais pas le croire, mais il est bien là ! m'annonce t-elle encore sous le choc de voir son pire ennemi en face d'elle.
— Alors voilà pourquoi tu es ici ! Je comprends mieux !
— Pourquoi tu ne m'as rien dit ? me sermonne t-elle.
— Car moi-même, j'ai été surprise de le voir ce matin à l'église !
— Quoi ? Non ! Ce n'est pas possible ! Abel Faro est allé à la messe ?
— Oui, où est le soucis ? nous surprend le principal concerné en plein milieu notre conversation.
— Euh...
Lili ne sait plus quoi dire et moi non plus. Donc, je fais en sorte de changer de sujet.
— On n'a pas de temps à perdre à jacasser ! Il y a encore beaucoup de travail devant nous, avant qu'on puisse ouvrir les portes !
On se met tous à l'œuvre, même ma petite sœur, et on ne chôme pas. Il est 12h15 quand enfin les portes s'ouvrent au public.
Publié le samedi 27 avril 2019
**************************************************
La suite du chapitre tout de suite, tournez la page !