Les paumes plaquées contre le marbre, je laisse l'eau couler indéfiniment.
Par ma faute, un homme s'en est allé. J'aurais aimé ne jamais commettre un acte aussi terrible ; me dire que, malgré la déraison de m'enfuir avec l'un des jouets d'Artheus, je reste loin de tous ces grands criminels.
« La liberté vaut tous les sacrifices... »
Les propos inquiétants du prototype accompagnent la découverte de mes mains. J'ai beau m'être déjà savonné plusieurs fois, elles me donnent toujours l'impression de sortir d'une mare de sang.
Avec ce que tu as fait, Owen, n'espère pas monter un jour au paradis.
Je récolte une énième noisette de gel douche pour l'appliquer sur mes avant-bras. Frotter vigoureusement ma peau finira par effacer ces taches tenaces.
Tu te rends compte qu'elles n'existent que dans ta tête ?
Le jet rince la fine mousse, puis je réitère l'opération.
- Andrew... Je suis tellement désolé...
L'hémoglobine continue de ruisseler le long de mes muscles. Quelques gouttes colorent le carrelage à mes pieds avant de se retrouver aspirées à l'intérieur du siphon.
Je n'ai pas... C'est impossible... Je n'ai pas pu faire ça...
L'environnement prend le pli de ma folie et se met à tournoyer. La vapeur qui stagne au sein de la cabine devient suffocante.
Endosser le rôle du prédateur ou devenir la proie ?
Pourquoi faut-il qu'on soit confrontés à des choix aussi ignobles ?
- Je suis... tellement...
Un genou à terre, j'essaie de me concentrer sur la pluie artificielle martelant mes épaules. J'essaie d'oublier le regard accusateur installé dans un coin de mon esprit.
La vengeance d'une victime.
Le reliquat d'un choc violent.
Je crois percevoir l'écho de cette détonation fatale. Même en couvrant mes oreilles, elle me tourmente encore.
- ... désolé...
Me balancer d'avant en arrière.
Bien que mon cœur se serre, je ne parviens plus à pleurer. La souffrance est trop importante pour s'extérioriser...