Long chapitre aujourd'hui, bonne lecture et plein de bisous.
❤️
Quelques secondes plus tard Clem m'ouvrait la porte avec un air surpris.
— Ah, il t'a confié sa bête.
Je souris alors que la jeune femme me serrait dans ses bras.
— Bon bah, entrez les filles, Sneazz est là mais vous occupez pas de lui, dit-elle.
Entrant dans l'appartement, je détachai la laisse du collier d'Hydra qui se dépêcha de renifler tout ce qui l'entourait.
— En fait ici c'est le club des meufs qui en branlent pas une pendant que leurs hlel charbonnent pour ramener de quoi grailler, plaisanta Mohammed en me faisant la bise.
Je haussai un sourcil, trouvant que ce n'était pas forcément le moment idéal pour faire des blagues là dessus. Et puis quoi ? Ni Hakim ni moi n'avions officialisé quoi que ce soit.
— Fais pas l'innocente Maya l'abeille, tu crois que j'vous ai pas cramé par la fenêtre à vous rouler des patins dans la rue ?
C'était tellement faux que je m'étranglai presque en déglutissant.
— T'inquiète Maya, Sneazz aussi est presque au chômage, il vient de finir le tournage d'un film et il déprime. Bon on a beaucoup de choses à voir ensemble, j'ai géré les réseaux tout le week-end, ça a vraiment bougé. J'espère que ça a été pour vous.
Je me laissai tomber sur le canapé et Hydra vint s'assoir à mes pieds, posant sa tête sur mes genoux.
— Eh ben vous êtes super copines toutes les deux ! Je crois qu'Haks l'a un peu délaissée ces derniers temps parce qu'il a beaucoup de boulot avec Creed.
Clem me jeta un regard attendri pendant que je caressai le pelage de la chienne.
— Ouais, elle est cool. Clem... je vais casser l'ambiance mais ça va pas trop là... Hakim est convoqué mercredi chez les flics. Benoit a dû porter plainte.
La jeune femme grimaça et Sneazz, jusqu'alors concentré sur l'écran de son ordinateur, releva brusquement la tête.
— Merde... dirent-ils en cœur.
— Oui ça craint, il va y avoir une enquête, je pense qu'ils vont l'interroger, peut-être même le garder en garde-à-vue. Il y a pas mal d'éléments contre lui...
Je ne révélais pas ce qu'Hakim m'avait appris le matin même, il me faisait confiance et je n'avais aucune envie de le trahir.
— Oh Maya... Je suis désolée... murmura Clem.
— Bon, on ne va pas parler de ça toute la journée, de toutes façons il n'y a rien à faire. Explique moi ce qui s'est passé ce week-end.
Elle acquiesça puis récupéra son PC avant de s'installer à côté de moi. J'en profitai pour initialiser mon nouveau téléphone.
— Alors, concernant Hakim, Je ne pense pas que les tweets de Benoit lui portent vraiment préjudice, ça va se tasser. On a vraiment bien fait de publier ton thread en premier. Les gens qui ne connaissent pas le S-crew en avaient un peu rien à battre, à part certains qui sont partis dans des clichés délirants sur le rap et les arabes. En fait c'est surtout la vidéo où il te fout de force dans sa voiture. Même moi ça m'a un peu choquée, vu comme tu te débats... Les bleus, on a réussi à justifier le truc avec la baston en boîte, mais c'est vrai que cette vidéo passe difficilement, les fan étaient derrière lui jusqu'à ce qu'elle sorte et puis ils ont été un peu plus prudents.
Je soupirai... C'était fou comme sorties de leurs contexte, les images révélaient uniquement ce qu'on voulait leur faire dire.
— En vrai c'est rien... J'avais « largué » Haks par texto et il voulait me forcer à lui dire en face. Ok il s'y est mal pris, mais si j'avais vraiment voulu partir je pense que j'aurais pu. Il m'a pas fait mal ou quoi et je commence à penser qu'il ne serait pas capable de m'en faire.
J'étais un peu gênée d'avoir cette conversation devant Sneazz, Clémentine le comprit et se leva pour récupérer un casque audio dans sa chambre.
— Tiens, dit-elle à son meilleur ami, T'as la nouvelle mixtape de Népal à écouter.
Pour une fois, il ne rechigna pas et saisit le casque qu'il enfonça sur son crâne avant de le connecter à son ordinateur.
— Vous avez avancé tous les deux ? demanda Clem en se rasseyant à côté de moi.
Je rougis, c'était vraiment nouveau pour moi d'avoir à parler d'une relation amoureuse. Moi qui n'était effrayée par rien et qui n'étais en aucun cas timide, je me retrouvais à chercher mes mots pour exprimer ce que je ressentais sans trop en révéler.
— Euh... Ouais.
Bravo Maya.
De toutes façons ce n'était pas comme si cela regardait les autres.
— Mais enfin, vous êtes ensemble ? Tu l'aimes ?
Je sursautai violemment, doucement jeune fille, ces questions étaient bien trop directes.
Clem rit devant mon air effaré.
— Bon, contente toi de répondre à ma première question, oublie la deuxième.
Toujours un peu chamboulée par les mots qu'elle avait employés, je soufflai un instant avant de finir par répondre.
— Hum... Euh, je sais pas ce qu'il dirait... mais je crois qu'on est ensemble. Ne fais pas cette tête, lui dis-je en voyant qu'elle commençait à s'exciter, S'il te plaît, on sera jamais comme toi et Ken à être démonstratifs ou quoi. Et puis en ce moment c'est la merde... Alors on a juste besoin d'être tranquilles.
Elle ravala son sourire niais mais je sentis qu'elle mourrait d'envie d'appeler la terre entière pour annoncer la nouvelle. Je me demandais pourquoi les histoires de cœur des autres passionnaient tellement les gens. Personnellement cela m'avait toujours plutôt écœurée qu'autre chose.
— Bref, on peut se reconcentrer sur l'important, demandai-je.
Elle opina de la tête et saisit de nouveau son ordinateur.
— Bon, concernant ton thread c'est un truc de malade, ça a explosé littéralement. L'Opéra a publié un communiqué en disant qu'une enquête serait menée en interne pour démêler cette histoire. Benoit va avoir des soucis, crois moi. Je pense qu'il est grand temps que tu rallumes ton téléphone parce qu'il risque de ne pas s'arrêter de sonner. Il y a pas mal de journalistes qui t'ont envoyé des messages privés pour avoir une interview, c'est hyper relayé par des associations féministes, mais aussi par plein de grandes gueules du show-business. T'as été RT par l'ex de Doums, Adèle, et par toutes ses potes actrices, tout le monde s'y est mis, en bref ils sont vraiment dans la merde.
Alors que Clémentine continuait de me raconter le buzz de mon histoire, je me sentis un peu mal. C'était assez déstabilisant de voir que tant de personnes savaient que j'avais été abusée. D'autant plus maintenant que ma relation avec Haks avait été rendue publique par Benoit. J'étais « la meuf de Mékra qui s'est faite violer pour le protéger » et je détestais ça. Je comprenais mieux ce qu'il avait ressenti lorsque que l'on avait publié le thread. C'était effectivement assez désagréable, un peu humiliant et totalement impudique.
— Ça va Maya ?
Clem avait dû lire mon malaise sur mon visage.
— Ouais... euh j'ai juste un peu de mal avec le fait que mon histoire soit sur les réseaux. C'est pas très agréable.
La jeune femme posa une main apaisante sur ma cuisse.
— Je suis désolée... De toutes façons ne t'en soucie pas. C'est moi qui gère ça d'accord ? Tu n'as à répondre à personne et surtout pas à voir ce que les gens disent. Je suis là pour ça.
J'étais reconnaissante envers Clémentine de tout ce qu'elle faisait pour moi. Elle avait passé son week-end à s'occuper de mon cas, c'était adorable. J'allais le lui signifier quand mon nouveau téléphone sonna, je venais de charger les contacts et fus surprise de lire le nom de Solange sur l'écran.
— Oui, dis-je froidement en décrochant.
— Maya ? Enfin tu réponds, j'ai essayé de t'appeler tout le week-end.
C'était une bonne chose que je n'aie pas pu l'avoir plus tôt, Hakim m'aurait pris le téléphone et l'aurait sans doute pourrie.
— J'avais besoin d'air. Qu'est-ce que vous voulez ? demandai-je.
— Écoute, nous avons sans doute été un peu radicaux en te demandant de quitter l'Opéra. Mais qu'es-tu allée raconter sur les réseaux sociaux ? Tu es folle ? La ministre est dans tous ses états, la direction menace de me renvoyer. Tu te rends compte de la gravité de la situation ? Jamais aucune danseuse n'a autant humilié l'ONP. Tout cela pour une vengeance ridicule.
Une vague de rage me submergea soudain, elle n'était jamais vraiment loin. Toutes les choses que je gardais enfouies depuis des jours pour empêcher Hakim de culpabiliser, sortirent d'une traite.
— HUMILIER L'ONP ? hurlai-je violemment en faisant sursauter Clémentine, HUMILIER L'ONP ?! Comment osez vous seulement parler d'humiliation ? Si quelqu'un a été humilié c'est moi et uniquement moi. C'est moi qui ait été forcée d'accueillir dans mon corps celui d'un homme dont je ne voulais pas ! C'est moi qui ait été souillée pendant des mois sous le chantage d'un homme que VOUS protégez aujourd'hui ! C'est moi qui ai été virée comme si j'étais coupable de ce qui m'est arrivé ! C'est moi qui assiste impuissante à l'humiliation de mon copain sur les réseaux, c'est moi qui vais devoir l'accompagner au commissariat en me disant que c'est ma faute ! C'est moi qui suis privée de ma raison de vivre, par un porc dont VOUS avez pris la défense. C'est moi qui vois son visage dans mon sommeil, moi qui suis affaiblie comme une adolescente alors que j'étais une femme plus forte que n'importe quel homme. C'est moi qui supporte le regard plein de pitié de mes amis, c'est moi qui fais comme si je n'étais pas atteinte, c'est moi qui me sens salie et indigne ! Alors ne venez même pas me parler d'humiliation, alors que par votre simple complaisance vous êtes toute autant coupable de ce qu'il m'a fait subir. Allez vous faire foutre.
Je raccrochai en me maîtrisant pour ne pas relancer mon nouveau portable à travers la pièce.
Le visage dans mes paumes, je cachai rapidement les larmes de rage et de frustration qui me montaient aux yeux. Hydra se redressa pour placer de nouveau sa tête sur ma cuisse.
Clémentine était interdite, j'entendais simplement sa respiration régulière, puis un sanglot lui échappa et deux bras entourèrent aussitôt les épaules. Je sentis une masse de cheveux recouvrir mon visage et son parfum frais et floral emplit mes narines.
— Maya... Jamais je n'aurais pensé que... Mon Dieu mais comment tu fais pour cacher autant tes émotions.
Je me laissai aller à son étreinte amicale, curieusement elle me faisait vraiment du bien. Ce n'était pas de la pitié, simplement du réconfort et du soutien.
— Merci, murmurai-je.
Elle déposa un baiser sur ma joue et me murmura que je faisais partie de la famille désormais.
— Bon les meufs quand vous aurez fini de vous pecho on pourra peut-être grailler quelque chose. Et je vais tout balancer à vos gars hein.
Visiblement l'estomac de Mohammed était plus fort que son sens du respect.
Clem se redressa pour adresser un doigt d'honneur à son ami.
— Tu me casses les couilles, Sneazzy West.
Il l'ignora et se leva en posant son ordinateur sur la table basse.
— J'suis pas en train d'golri Mandarine, faut que tu manges c'est l'heure.
Je fus surprise par le ton mature et sérieux qu'il venait d'employer. Quand il s'agissait de faire manger la frêle jeune femme, tous les gars perdaient leur sens de l'humour.
— C'est bon Moh... c'est pas pressé.
Mais il secoua la tête en enfilant son bomber.
— Si, mets ta veste et dépêche. On va chercher des trucs au monop', bouge pas Maya, on te ramène à graille. Faut que je parle à ta pote.
Clem se leva en grognant et suivit le rappeur. Il passa son bras autour de ses épaules et murmura quelque chose à son oreille. Elle lui adressa un regard surpris puis sourit et embrassa sa joue.
— À toute Maya l'abeille !
Je soupirai, satisfaite de me retrouver un peu seule. Me laissant tomber sur le canapé, je tirai un plaid sur moi et me mis aussitôt à sangloter. Comment allions nous gérer tout ça ?
Hydra jappa et grimpa à côté de moi, je n'eus pas le courage de la gronder et réfugiai mon visage contre son pelage. Pourquoi n'avais-je jamais pensé à avoir un animal domestique ? C'était vraiment rassurant et réconfortant, tout en étant muet. Une présence silencieuse et douce, qui valait bien plus que tous les mots artificiels que sortaient les êtres humains quand l'un des leurs souffrait.
(...)
— Oh non c'est trop mignon ! Passe moi mon portable dans mon sac, chaton.
La voix de Clémentine me tira de mon sommeil et j'ouvris doucement les yeux, pour la voir derrière l'écran de son iPhone en train de me prendre en photo.
— Clem... râlai-je.
Elle sourit puis pianota sur son téléphone. Pendant ce temps Sneazz déposait les victuailles sur la table basse du salon et je tapotai le dos d'Hydra pour la faire descendre. Cette dernière grogna, s'étira longuement, puis finit par obéir.
Quelques instants plus tard, alors que nous déjeunions dans une ambiance plus détendue, mon portable vibra m'annonçant un message de mon rappeur.
Hakim : J'AVAIS DIT : PAS CANAPÉ.
Fronçant les sourcils, je cliquai ensuite sur une notification Instagram qui m'annonçait que Clémentine m'avait identifiée dans une photo.
kenscred, framalentourage, lucetteg14, mekra_screw et 24 autres personnes aiment ça.
une_mandarine : Maya & Hydra
lucetteg14 : Trop chouuu @Maya_Courtois
kenscred : Haks et Creed ont actuellement une érection. #LesFemmesDeLeurLife #JdisPasQuiKiffeQui #PoilsSurLeCanap #CestPasVousQuiFaitesLesLessives #RespectezLeLitDeSNZ
—> mekra_screw : @kenscred Fais pas le fou alors que tu sors que des couplets de merde depuis ce matin.
—> une_mandarine : @kenscred Comme si c'était toi qui faisais les lessives.
—> sneazzysneazzy : D'acc avec @kenscred, respectez mon pieu wlh.
Je levai les yeux au ciel mais ne pus m'empêcher de sourire. Cette bande de crétins était quand même très attachante.
— Personne peut voir ça ? demandai-je quand même à Clémentine en lui désignant mon écran.
Elle secoua la tête en souriant.
— Non non t'inquiète, je suis en privé et j'ai quarante abonnés, tous de confiance.
Je me dépêchai ensuite de répondre à Hakim.
Moi : Désolée Tigrou, je sais pas comment c'est arrivé.